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Franz Ernewein

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Franz Ernewein
Prénom Franz
Nom Ernewein
Sexe masculin
Naissance 19 novembre 1916 (Gross-Hettingen)
Décès 5 juillet 1996
Profession du père Notaire

These Die paroxysmale Hämoglobinurie und ihre Beurteilung in der ärztlichen Gutachtertätigkeit (Reichsuniversität Straβburg, 1943)
Examen 12 février 1943
Directeur de thèse Johannes Stein
Profession Arzt

Titre Dr. med.


Francis (Franz) Ernewein (1916-1996) est un médecin français, né en Moselle et d’origine alsacienne. Après avoir obtenu son baccalauréat, il effectue ses études de médecine à l’université française de Strasbourg (1935-1939), puis à l’université d’Heidelberg (1940-1941). En octobre 1941, il réussit l’examen médical d’État (medizinisches Staatsexamen) et débute aussitôt sa carrière à la clinique médicale B (Abteilung I) de la Reichsuniversität Straβburg en qualité de Pflichtassistent. En 1942, il prépare sous la direction du professeur Johannes Stein (1896-1967) une thèse de doctorat de médecine consacrée à l’établissement du diagnostic de l’« hémoglobinurie paroxystique à frigore » (paroxysmale Kältehämoglobinurie). Après avoir été temporairement affecté au sanatorium pour tuberculeux de la Robertsau au tournant de l’année 1942-1943, il soutient sa thèse en février 1943 devant un jury composé des professeurs Stein, Lullies et Bickenbach et obtient la mention « bien » à son doctorat. Il poursuit alors sa carrière comme Volontärassistent, puis Assistenzarzt à l’Abteilung I de la clinique médicale.

Durant sa présence à Strasbourg, Ernewein participe à la résistance médicale qui s’opère dans les murs de l’hôpital civil, permettant à des jeunes compatriotes d’échapper à l’enrôlement dans l’armée allemande. Il aide même un détenu du camp de sûreté et de rééducation de Schirmeck-Vorbruck, Willy Burgmeier, à s’évader après avoir été admis à la clinique. En 1943, alors qu’il se retrouve directement concerné par l’incorporation, Ernewein multiplie pendant près d’un an les stratagèmes pour s’y soustraire, en simulant toutes sortes de pathologies. Finalement reconnu apte au service, il est envoyé en Pologne, où il travaille dans un hôpital militaire avant d’être muté dans une unité combattante envoyée en Belgique à l’été 1944.

Grièvement blessé lors de cette contre-offensive allemande, Francis Ernewein souffre de cécité pendant une année. Retrouvant la vue, il obtient à nouveau un poste au sanatorium Saint-François à Strasbourg après la guerre, étant alors « mis à la disposition du préfet du Bas-Rhin » pour assurer un service public antituberculeux jusqu’en 1948. À la fin de l’année 1948, il est nommé médecin adjoint au sanatorium départemental de Colmar, puis devient directeur médical du sanatorium de la SNCF à Munster dans le Haut-Rhin jusque dans les années 1980. Il meurt à Colmar le 5 juillet 1996 dans sa soixante-dix-neuvième année.

Biographie

Devenir médecin : de la scolarité aux études de médecine

Issu d’une famille alsacienne, Francis Ernewein naît et grandit en Moselle jusqu’à l’obtention de son baccalauréat. Il débute ensuite des études de médecine à l’université française de Strasbourg et se rend à Clermont-Ferrand lorsque l’université est évacuée en septembre 1939. De retour en Alsace après l’armistice, il poursuit ses études à l’université d’Heidelberg en Allemagne et termine son cursus de médecine par l’obtention de l’examen médical d’État un an plus tard.

Famille et scolarité

Francis (Franz) Ernewein est né le 19 novembre 1916 à Hettange-Grande, une commune mosellane située au nord de la ville de Thionville et à quelques kilomètres de la frontière luxembourgeoise. À sa naissance, durant la Première Guerre mondiale, cette petite ville d’environ 2000 habitants était rattachée au Reich allemand, en application du Traité de Francfort qui avait mis fin à la guerre franco-prussienne quarante-cinq ans plus tôt[1]. Né en Moselle, Francis Ernewein est en réalité d’origine et d’ascendance alsacienne, car ses parents sont tous deux issus d’une famille catholique installée à Haguenau dans le nord de l’Alsace depuis plusieurs générations. Son père, Josef Ernewein, né à Haguenau le 11 juillet 1879 et décédé le 29 mars 1938 à Strasbourg[2], était exerçait la profession de notaire[1].

Le 28 juillet 1913, Josef épouse dans sa ville natale Jeanne Ingwiller[3], née le 24 mai 1892 à Haguenau et décédée le 1er janvier 1979 à Strasbourg[4]. Le couple donne ensuite naissance à deux enfants, Paul et Francis, dont l’aîné est devenu une personnalité alsacienne. En effet, Paul Ernewein (12 septembre 1915, à Haguenau - 12 novembre 1976, Le Lavandou) avait fait des études supérieures de droit, de sciences politiques puis de philologie allemande à Strasbourg, et avait débuté une carrière politique à la Libération. Il commence par travailler comme attaché au cabinet du commissaire régional de la République en 1944, puis devient l’un des collaborateurs du sous-secrétaire d’État à la santé puis à l’économie Pierre Pflimlin (1907-2000) sous les gouvernements Gouin et Bidault I en 1946. Paul Ernewein est ensuite nommé sous-préfet d’Altkirch en Alsace (1946-1954), puis poursuit son engagement public comme directeur du service des Cultes d’Alsace et de Lorraine[5].

Durant la Première Guerre mondiale, la famille Ernewein quitte l’Alsace pour s’installer en Moselle et emménage alors à Hettange-Grande. Le père ouvre alors une étude notariale dans la ville voisine de Thionville, au 5, cour du château et tient cet office jusque dans la seconde moitié des années 1930[6]. Demeurant toujours à Hettange-Grande, où le père était délégué du Touring Club de France[7], les enfants Ernewein grandissent ainsi en Moselle et obtiennent la nationalité française « par réintégration » du fait qu’ils restent sur place aux lendemains de la Grande Guerre. Francis et son frère effectuent leur scolarité obligatoire à l’école de la République française dans l’entre-deux-guerres et grandissent entre Moselle et Alsace, où le reste de la famille est domicilié[8]. Francis obtient les deux parties de l’examen du baccalauréat en 1933 et en 1935, respectivement dans les universités françaises de Strasbourg et de Nancy[9].

Les études de médecine

Dès la rentrée universitaire suivante, à l’automne 1935, Francis Ernewein s’inscrit à l’université de Strasbourg pour débuter une formation médicale en vue de devenir médecin[9]. Comme de coutume en France, il commence par préparer le certificat d’études physique-chimie-biologie (PCB) à la faculté des sciences. L’obtention de diplôme, préparé pendant une année, était en réalité un prérequis pour prétendre à la première inscription à la faculté de médecine[10]. Une fois le PCB obtenu, à l’été 1936, Francis débute sa formation médicale à proprement parler. Après avoir suivi six semestres à Strasbourg, ses études sont soudainement interrompues par le déclenchement des hostilités en septembre 1939[1]. Si l’université et l’hôpital civil de Strasbourg sont évacués et repliés, l’une à Clermont-Ferrand dans le Puy-de-Dôme et l’autre à Clairvivre près de Périgueux en Dordogne, il semble qu’Ernewein n’ait pas fait partie des étudiants strasbourgeois immatriculés à Clermont-Ferrand[11].

Âgé de vingt-trois ans à cette époque et n’ayant pas encore accompli son service militaire, il est probable qu’il ait été enrôlé dans l’armée française lors de la mobilisation générale début septembre[12]. Dans son curriculum vitae, Ernewein parle en effet de septembre 1939 comme une période durant laquelle « ses études de médecine […] ont été interrompues par la guerre »[1]. Francis Ernewein n’ayant pas encore achevé son cursus – il n’a pu suivre en totalité que trois ans sur les six obligatoires en France (hors année du PCB), il est obligé de faire un choix pour la suite de son parcours. À la suite de son retour en Alsace à l’été 1940 – sans doute pour retrouver sa famille – et comme l’écrit Charles Béné dans son ouvrage L’Alsace dans les griffes nazies (tome 6), « il ne restait donc à l’étudiant alsacien qu’une solution : accepter de poursuivre ses études dans une université d’outre-Rhin »[13]. Francis Ernewein décide ainsi de s’immatriculer à l’université d’Heidelberg dès le mois de septembre 1940. Il fait alors partie d’un groupe d’étudiants alsaciens qui, une fois retournés en Alsace après l’annexion, poursuivent leurs études une unité de l’Altreich en 1940-1941 avant de pouvoir retourner en Alsace et servir à la Reichsuniversität Straβburg. Ici, après avoir suivi une nouvelle année de formation, Francis Ernewein termine ses études par l’obtention de l’examen médical d’État (Staatsexamen) en octobre 1941[14]. Entièrement intégré au système universitaire allemand, Ernewein bénéficie d’un aménagement par rapport au système français. En effet, la durée des études de médecine étant fixée à cinq ans en Allemagne (quatre semestres précliniques et six semestres cliniques), les Allemands ont ici compté l’année de préparation du PCB comme une année d’étude de médecine. Ainsi, Ernewein a fait l’économie de deux ans de médecine, puisque le cursus français en prévoyait en tout sept (année du PCB comprise).

De son passage à Heidelberg, Ernewein dévoile une image précise du sort des étudiants alsaciens : « un professeur allemand nous faisait chaque semaine un cours obligatoire de "Deutschtum" (germani[té]) pour nous apprendre ce qu’était la Grande Allemagne. Ne pas assister à ces cours pouvait entraîner l’exclusion de la Faculté ». Il évoque aussi la surveillance dont ils faisaient l’objet avec leur partage en « différents groupes à la tête desquels était placé un "Vertrauensmann" (homme de confiance) recruté parmi des gars qui avant la guerre avaient appartenu à l’une des trois associations d’étudiants autonomistes : "Alsatia", "Wilhelmkana" [sic. Wilhelmitana] et "Argentina" […] ». Hormis « la très grande prudence » qu’imposaient cette surveillance dans leurs conversations, Ernewein estime que les Alsaciens avaient « néanmoins un avantage » : « politiquement, on ne s’occupait guère de nous, alors qu’en Alsace, les gens faisaient l’objet de pression en vue d’entrer dans l’une des nombreuses formations politiques ». Enfin, ayant connu pendant plus de trois ans le système universitaire français, il déclare qu’en comparaison, l’organisation des examens à Heidelberg s’était déroulée « d’une manière bien bizarre ». En effet, les étudiants pouvaient « choisir les matières » sur lesquelles ils étaient évalués et pouvaient également être « examinés par groupes de quatre étudiants à des dates différentes », précisant que les étudiants savaient tout de suite s’ils étaient « reçu ou non »[15].


Médecin à clinique médicale B de la Reichsuniversität Straβburg (1941-1944)

Dès la fin de son cursus universitaire, Francis Ernewein décide de retourner en Alsace afin de trouver un emploi à l’hôpital civil de Strasbourg. Très rapidement, il obtient un poste à la clinique médicale B et débute sa carrière médicale. Il commence à se spécialiser dans la lutte contre la tuberculose et finit par devenir médecin-assistant (Assistenzarzt) à la clinique.

L’arrivée à Strasbourg

Une fois le diplôme d’État obtenu, Francis Ernewein doit, conformément à la législation en vigueur dans le Reich, réaliser une année en milieu hospitalier afin de pouvoir recevoir l’autorisation d’exercer la médecine (Approbation). Succédant à l’année pratique (Praktisches Jahr), la Pflichtassistentenzeit était une période d’une année durant laquelle le jeune diplômé travaillait comme Pflichtassistent et à l’issue de laquelle il pouvait pleinement porter le titre de « médecin »[16]. Dans son récit-témoignage, Ernewein évoque également la procédure habituelle à laquelle devait se soumettre le médecin à ce moment-là :

« Dès son retour à Strasbourg, l’étudiant muni de son diplôme de médecin devait se présenter au "Ärzteführer" (chef des médecins d’une ville) qui décidait de l'affectation du jeune médecin, souvent outre-Rhin ou à partir de 1943 dans la Wehrmacht. Étant rentré à Strasbourg au mois de novembre 1941, avec plusieurs de mes camarades alsaciens qui avaient également obtenu leur diplôme à Heidelberg, nous décidâmes de ne pas obéir à la consigne [de nous présenter au Ärzteführer] et de nous présenter directement au Dr. Joseph Oster, le directeur de l'hôpital civil de l'époque. Nous savions que cet hôpital était entre les mains de quelques médecins allemands, mais que l'effectif était nettement insuffisant. Le Dr. Oster nous conseilla d'aller nous présenter au "Dekan" (doyen), chef de la Médicale "B", le professeur Stein. Celui-ci nous recruta dans le courant de la semaine. N'avions d'ailleurs le droit de nous occuper que des malades alsaciens »[17].

Ainsi, quelques jours avant l’inauguration officielle de la Reichsuniversität Straβburg[18], Francis Ernewein obtient un poste à l’Abteilung I de la clinique médicale de cette université du Reich. Dès le 15 novembre 1941, il entre dans le service de la clinique médicale I en qualité de Pflichtassistent[9].

La carrière à la clinique médicale I : de Pflichtassistent à Assistenzarzt

Dès son arrivée en Alsace annexée, Francis Ernewein intègre l’Abteilung I de la clinique médicale. Début novembre 1941, le professeur Johannes Stein (1896-1967), directeur de la clinique, pouvait s’appuyer sur une équipe composée de vingt-cinq médecins répartis en plusieurs services : l’Abteilung I (neuf médecins, parmi lesquels deux femmes et seulement trois Alsaciens), l’Abteilung II (sept médecins dont six Alsaciens), l’Abteilung für chronische Kranke, c’est-à-dire le service des maladies chroniques (deux médecins alsaciens), l’institut de radiologie (six médecins dont cinq Alsaciens) et le sanatorium de la Robertsau qui était placé sous la direction d’une Alsacienne[19]. La première liste du personnel médical de la Reichsuniversität Straβburg sur laquelle le nom de Francis Ernewein figure est celle du 1er décembre 1941 : la clinique compte alors précisément vingt-neuf médecins, grâce à l’arrivée de nouveaux médecins, ventilés au sein de l’Abteilung I et de l’Abteilung II désormais dirigées par deux Oberärzte allemands, Hajo Wolbergs (1910-1975) et Gunnar Berg (1907-1974)[20].

Pendant plus d’un an, probablement jusqu’au printemps 1943, Francis Ernewein travaille comme Pflichtassistent à la clinique médicale. On remarque toutefois qu’entre le mois d’octobre 1942 et le début de l’année 1943, il intègre l’équipe du sanatorium de la Robertsau (Lungenheilstätte Ruprechtsau) comme Pflichtassistent et travaille sous la direction de sa consoeur alsacienne, le Dr. Magdalena Uhrig, qui y sert en qualité de kommissarische Chefärztin durant toute la guerre[21]. C’est le premier rapprochement qu’effectue Francis Ernewein vers la phtisiologie – c’est-à-dire la lutte contre la tuberculose –, une discipline médicale qui devient sa spécialité après la guerre (cf. infra). De plus, à l’occasion de sa première convocation au conseil de révision pour être enrôlé de force dans l’armée, Ernewein a évoqué le fait qu’il travaillé « au sanatorium pour tuberculeux du faubourg de la Robertsau », ce qui confirme sa présence dans cet établissement au début de l’année 1943[22].

Dans le curriculum vitae rédigé à la mi-août 1942 et inséré à la fin du manuscrit de sa thèse de doctorat, Francis Ernewein prétend occuper « depuis le 1er avril 1942 un poste de Volontärassistent à la clinique médicale de la Reichsuniversität Straβburg ». Toutefois, en consultant les registres du personnel médical en poste à la faculté de médecine, il semble qu’il ait conservé son poste de Pflichtassistent au moins jusqu’au printemps 1943, pour satisfaire aux réglementations en vigueur en Allemagne nazie qui imposaient une année de pratique médicale en milieu hospitalier pour obtenir l’Approbation, pouvant être allongée de plusieurs mois pour rattraper un temps de stage ou de formation non accompli durant les études[16]. De plus, hormis un mois (juillet 1942), toutes les autres listes conservées le présentent comme un Pflichtassistent de son arrivée à l’automne 1941 au printemps 1943. Suivant le schéma classique de la progression professionnelle des médecins hospitaliers, Francis Ernewein, désormais devenu docteur en médecine, est promu Volontärassistent à la clinique médicale I[23]. Il conserve ce statut jusqu’au mois d’octobre 1943, avant d’être promu Assistenzarzt à compter du 1er novembre 1943[24].


La thèse de doctorat de médecine à la Reichsuniversität Straβburg

En 1942, Francis Ernewein parachève sa formation universitaire en préparant une thèse de doctorat de médecine sous la direction du professeur Johannes Stein (1896-1967) qu’il soutient les 11 et 12 février 1943 devant les professeurs Otto Bickenbach (1901-1970), Hans Lullies (1898-1982) et Johannes Stein (1896-1967).

Une étude de l’hémoglobinurie paroxystique

En parallèle de son activité médicale à l’Abteilung I de clinique médicale de la Reichsuniversität Straβburg, Francis Ernewein prépare en 1942 une thèse de doctorat de médecine sous la direction du professeur et interniste Johannes Stein (1896-1967), qui occupe également le poste de directeur de la clinique médicale et de doyen de la faculté de médecine. Sa thèse est intitulée « L’hémoglobinurie paroxystique et son appréciation dans le cadre de l’activité de médecin expert » (Die paroxysmale Hämoglobinurie und ihre Beurteilung in der ärztlichen Gutachtertätigkeit). Sur les 292 thèses de doctorat de médecine déposées et soutenues à la Reichsuniversität Straβburg entre 1942 et 1944, Francis Ernewein fait partie des vingt-huit doctorants alsaciens et mosellans (9,6%) qui ont reçu leur diplôme de docteurs dans cette université du Reich[25].

Dans son introduction, il commence par expliquer que l’on parle d’hémoglobinurie lorsque les urines contiennent des pigments sanguins (Blutfarbstoff), c’est-à-dire de l’hémoglobine, contrairement à l’hématurie, où les urines contiennent des cellules sanguines (Blutkörperchen) non détruites. La destruction des globules rouges, l’hémolyse, est en effet l’élément caractéristique de l’hémoglobinurie, dont il cite certains symptômes et les principales causes. Plus précisément, Francis Ernewein s’intéresse à l’hémoglobinurie paroxystique à frigore, « qui survient principalement chez des individus prédisposés sous l’influence du froid et plus rarement d’une marche épuisante »[26]. Après ces propos liminaires, Ernewein dresse ensuite un aperçu historique de l’étude de cette pathologie, décrite pour la première fois en 1849 par Charles Stewart, un chirurgien écossais[27]. Pour réaliser son étude, il s’appuie sur une bibliographie composée exactement de trente-cinq titres, issus principalement de la littérature scientifique allemande, qui contient aussi quelques articles scientifiques français et américain[28]. Après avoir évoqué la manière dont cette pathologie « apparaît » (Anfall) en décrivant en détail tous les symptômes ressentis par le patient[29], il s’intéresse à son étiologie et montre que le « froid est toujours l’élément déclencheur », si bien qu’« un refroidissement, un mauvais temps froid, une averse froide constituent le moment déclencheur de chaque déclaration de la maladie »[30]. Concernant la pathogénèse, Francis Ernewein met en avant deux signes fondamentaux (Grunderscheinungen) que sont l’hémoglobinurie et son apparition due au froid, et poursuit en dressant le tableau clinique complet de la maladie[31].

Enfin, Francis Ernewein présente un cas clinique observé à la clinique médicale de l’hôpital civil de Strasbourg au mois de février 1942. Retraçant l’apparition de la maladie et l’anamnèse de ce patient allemand âgé de soixante ans (dont la pathologie est survenue lors d’un internement en France en 1939-1940), Ernewein développe en détail les résultats des analyses et des examens effectués (auscultation, température, bilans sanguin et urinaire, etc.)[32]. Cherchant à préciser le diagnostic, il soumet le patient à des conditions climatiques qui permettaient de mettre en évidence la maladie par des éléments caractéristiques. Le premier jour (19 février), le patient est amené à se « promene[r] pendant une heure par un temps humide et froid » et à son retour, il présente déjà des symptômes spécifiques, notamment la miction de 140 cm3 d’une urine « rouge-foncée ». Les deux jours suivants, le médecin effectue un « test d’eau froide » (Kältewasserversuch). Pendant un quart d’heure, le patient plonge d’abord son bras droit dans de l’eau glacée, mais cela ne produit aucun effet (ni nausée, ni coloration dans les urines). En revanche, lorsque le test est reproduit le lendemain sur une plus longue durée et sur une autre partie du corps, les résultats confortent le médecin dans son diagnostic initial : le patient plonge ses deux pieds dans l’eau glacée et, seulement dix minutes plus tard, il sent les « premiers signes de l’apparition de la maladie » avec des « nausées, un sentiment d’angoisse, des frissons et une coloration du visage et des extrémités pâles-cyanosées (blasszyanotisch) ». L’expérience est prolongée pendant plus d’une heure et demie, le médecin pratiquant assez régulièrement des prises de sang et contrôlant la température (en diminution), la tension artérielle (en augmentation) et la coloration des urines du patient (celles-ci se colorant au bout d’une heure)[33]. Enfin, Francis Ernewein explique chacun des signes observés et parvient à la conclusion que le patient présente un « cas typique d’hémoglobinurie paroxystique à frigore, une pathologie dont les causes sont à chercher dans une modification du sérum sanguin du porteur de la maladie »[34].

La soutenance et la notation

Terminant son étude durant l’hiver 1942-1943, Francis Ernewein dépose le manuscrit de sa thèse de doctorat auprès de la faculté de médecine de la Reichsuniversität Straβburg le 10 février 1943[35]. Très rapidement, son président de thèse, le professeur Johannes Stein (1896-1967), entame la correction des vingt-neuf pages du manuscrit. Le jour même, il rédige son rapport de notation (Referat) et écrit : « le sujet a été traité avec sérieux. La présentation est claire et simple et les propres prises de position sont bien argumentées. Je propose de lui attribuer la mention "bien" »[36].

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Figure 1 : Rapport d’évaluation du professeur Stein. © ADHVS, Archives de la faculté de médecine de Strasbourg, Collection des thèses.

Johannes Stein transmet ensuite le manuscrit à ses confrères, les professeurs de médecine interne et de physiologie Otto Bickenbach (1901-1971) et Hans Lullies (1898-1982), qu’il invite à faire partie du jury de soutenance. L’épreuve orale est organisée les jeudi 11 février et vendredi 12 février. Francis Ernewein soutient alors sa thèse de doctorat devant les professeurs Lullies, Stein et Bickenbach, qui lui attribuent tous les trois la mention « très bien » à l’épreuve orale[37]. Quelques heures plus tard, le doyen de la faculté de médecine communique à Ernewein la note finale (Gesamtnote) de son doctorat, obtenue par appréciation des résultats aux épreuves écrite et orale. Sur ce certificat, qui fait office de « diplôme provisoire » (vorläufiges Doktor-Diplom), le jeune Dr. Ernewein apprend qu’il a reçu son doctorat avec la mention « bien »[38].

Figure 2 : Procès-verbal de la soutenance orale de Francis Ernewein, 12 février 1943. © ADHVS, Archives de la faculté de médecine de Strasbourg, Collection des thèses.


Un médecin alsacien dans la résistance au nazisme

Durant son service à la clinique médicale B de la Reichsuniversität Straβburg, le Dr. Ernewein entretient une activité secrète de résistance médicale avec plusieurs confrères, infirmières et sœurs à l’hôpital. Menacé d’incorporation dans l’armée allemande, Francis Ernewein multiplie les stratagèmes pour ne pas revêtir l’uniforme allemand. S’il réussit pendant près d’un an à obtenir un ajournement, il finit par être incorporé en janvier 1944 et envoyé en Pologne, où il arrive à travailler dans un hôpital militaire à l’arrière-ligne. À l’été 1944, il participe à une grande offensive allemande en Belgique et est grièvement blessé.

Les activités de résistance : l’exercice d’une médecine qui transcende les luttes politiques nazies

Durant sa présence au sein de l’équipe médicale de la Reichsuniversität Straβburg, Francis Ernewein multiplie les actes de résistance face au régime national-socialiste afin d’aider, surtout médicalement, ceux qui étaient considérés comme des « ennemis du Reich ». Cette résistance médicale était assez répandue au sein de l’hôpital civil de la faculté de médecine allemande de Strasbourg et prenait notamment la forme de faux certificats médicaux permettant aux jeunes Alsaciens de se soustraire à l’enrôlement dans l’armée allemande devenu obligatoire sur ordre du Gauleiter Wagner le 25 août 1942. Ces certificats de complaisance étaient le premier moyen de résister et de retarder la visite médicale du RAD (obligatoire le 8 mai 1941) et du conseil de révision précédant l’entrée dans la Wehrmacht. Par exemple, quand bien même son activité résistante est restée méconnue après la Libération, le radiologue alsacien Frédéric-Auguste Schaaf (1884-1952), de la clinique médicale, a fait beaucoup en faveur de ses jeunes compatriotes. De comptes-rendus alarmistes en clichés truqués, Schaff et ses confrères utilisaient plusieurs procédés pour simuler différentes pathologies. Des réseaux avaient été créés, visant à aider les Résistants blessés et à exfiltrer les réfractaires. Ici, le Dr. Ernewein et un réseau de complicités ont permis de faire évader de l’hôpital civil le cheminot Willy Burgmeier – qui avait été transféré du camp de rééducation de Schirmeck-Vorbruck à la clinique –, grâce au soutien de sœurs Marie-Françoise et Marie-Julie[39].

L’activité de résistance développée par le Dr. Ernewein est aussi la manifestation d’une médecine profondément humaine, transcendant les luttes politiques et idéologiques nationales-socialistes. En effet, dans son témoignage, il écrit :

« À la Médicale B, nous nous sommes aussi occupés de prisonniers de guerre russes [sic. soviétiques], employés comme travailleurs [forcés] dans la région. Certains étaient atteints de tuberculose assez avancée. À trois d’entre eux, j’ai créé un pneumothorax qui exige qu’on insuffle régulièrement de l’air dans la plèvre. Un médecin allemand, le Dr. Wagner, originaire d’Offenburg, me fit un jour la remarque suivante : "C’est quelque chose d’incroyable qu’on puisse passer son temps à s’occuper ainsi de tels gars. Croyez-vous que nous prisonniers actuellement en Russie reçoivent des pneumothorax des médecins russes ?". Je lui répondis en le regardant dans les yeux : "Un médecin n’a pas à considérer qu’un malade soit russe, allemand ou français !" »[40].

Enfin, Francis Ernewein faisait partie d’un « petit groupe » de médecins alsaciens de la Reichsuniversität Straβburg, rejoints par deux infirmières (Mathilde Schmitt et Élisabeth Munsch) et une religieuse (sœur Raphaël) de la clinique. Ceux-ci se « réunissai[en]t à la bibliothèque », notamment « pour échanger les nouvelles de Londres »[41]. Ernewein relate également les réunions organisées à la « Taverne française » (nom d’avant la guerre), un « café situé en face de la poste », où ils avaient « l’habitude de [se] réunir ». Entre eux, ils parlaient en français, s’interrogeaient sur leur avenir, notamment en ce qui concerne l’incorporation des Alsaciens dans l’armée allemande. Il écrit :

« C’est dans ce café qu’un soir du mois de janvier 1943, un ami travaillait aux "Straβburger Neuste Nachrichten" nous annonçait que le lendemain, son journal allait publier une ordonnance instituant la mobilisation de nos classes. Comme nous avions tous déjà effectué notre service militaire dans l’armée française, nous n’étions pas obligés d’accomplir le service préliminaire du RAD. Que pouvions-nous faire ? Nous décidâmes que le seul moyen d’échapper à cette incorporation était de simuler des maladies. Médicalement, cela nous parut néanmoins assez difficile »[42].

Directement concerné par l’enrôlement dans la Wehrmacht comme plusieurs de ses confrères, le Dr. Francis Ernewein déploie dans les mois qui suit beaucoup d’efforts, fait preuve de beaucoup d’ingéniosité et prend beaucoup de risques pour ne pas porter l’uniforme allemand.

Les manœuvres d’un médecin alsacien pour se soustraire à l’enrôlement dans la Wehrmacht (1943-1944)

Dès 1940, le Gauleiter Wagner avait lancé une campagne de recrutement dans la Waffen-SS aux jeunes Alsaciens volontaires. En mai 1941, le Reichsarbeitsdienst (RAD) avait été introduit en Allemagne pour tous les jeunes de 17 à 25 ans, puis les jeunesses hitlériennes avaient été rendues obligatoires aux jeunes gens de 10 à 18 ans en janvier 1942. Mais face au piètre résultat de la campagne d’engagement volontaire et à la suite des pertes subies, le Gauleiter émet une ordonnance le 25 août 1942 instaurant en Alsace l’incorporation de force dans l’armée allemande. Elle devait frapper dans un premier temps les hommes nés entre 1920 et 1924, mais elle a été successivement élargie aux classes de 1925 à 1927, à celles de 1919 à 1914 (« y compris les soldats ayant servi dans l’armée française »), puis à celles de 1913 à 1908. Au total, quelque 130.000 Alsaciens de vingt-et-une classes d’âges ont été incorporés dans l’armée allemande entre octobre 1942 et novembre 1944[43]. Très rapidement, le Dr. Ernewein est concerné par cette politique et il entreprend différentes manœuvres audacieuses mais non moins dangereuses pour s’y soustraire.

Dans son récit autobiographique, Ernewein se souvient avoir voulu dès le départ trouver une solution médicale pour ne pas porter l’uniforme. Il écrit : « Je savais qu’une maladie effrayait beaucoup les Allemands : c’était la tuberculose pulmonaire. Je pris donc le risque, bien avant que ne me parvienne la convocation pour la visite médicale d’incorporation, de simuler la maladie ». Après avoir trafiqué un cliché radiographique rendu volontairement flou avec l’aide d’une sœur de la clinique, il est convoqué au conseil de révision. Lors d’un entretien préliminaire avec un médecin-lieutenant allemand, il présente son cliché et explique qu’il « travaillai[t] au sanatorium pour tuberculeux du faubourg de la Robertsau et que récemment, [il] avai[t] été très malade avec de fortes poussées de fièvre » et lui dit qu’il était atteint d’une « affection pulmonaire aiguë ». Introduit complètement nu dans la salle du conseil, un médecin-capitaine allemand consulte sa fiche et sa radiographie et déclare qu’il « ne pouvait se prononcer et qu’un spécialiste des maladies pulmonaires devait décider » de son cas. Ernewein est donc ajourné une première fois, recevant l’ordre de se rendre chez « un spécialiste allemand, le professeur Steinlé, réputé pour son antipathie par les Alsaciens ». Une fois sur place, il rencontre l’un des adjoints alsaciens de Steinlé, le Dr. Schiede, qui se rend complice en prescrivant à Ernewein un examen médical complémentaire. Avec ce certificat établi par un spécialiste, il retourne devant le médecin-capitaine allemand qui ajourne son incorporation de six mois[44].

Arrivé au terme de cette nouvelle échéance, en septembre 1943, Ernewein tente de simuler la forte fièvre caractéristique de la poliomyélite (une épidémie qui frappait Strasbourg à la même époque). Après avoir fait un premier test concluant, il s’injecte en intraveineuse un médicament appelé « Pirifer » dans une veine du pied (pour que cela ne soit pas visible), ce qui lui a provoqué une fièvre de 39,5°C. Mais pour déceler la maladie, il fallait effectuer une ponction lombaire et au moment de la visite médicale, le médecin-chef allemand qui a fait la ponction a décidé de « faire lui-même l’analyse à la place du laborantin qui était de combine » avec Ernewein. Le résultat étant « négatif », Ernewein a néanmoins reçu un nouveau sursis de trois mois en raison de la présence d’albumine et de traces de sang dans les urines[44].

Finalement, en décembre 1943, alors qu’il était « de nouveau "bien portant" », Ernewein jugeait « indispensable de simuler une nouvelle maladie » pour être dispensé d’enrôlement. S’injectant 1 cm3 de sérum antidiphtérique dans la vessie à l’aide d’une sonde médicale – ce qui se traduisait par la présence d’albumine dans les urines –, il se présente au conseil de révision, où il est « obligé d’uriner devant un Feldwebel-infirmier qui effectu[e] immédiatement l’analyse ». Comme les Allemands étaient au courant de ce subterfuge employé par les Alsaciens, l’infirmier a fait uriner Ernewein une seconde fois une heure plus tard. Lorsque le médecin allemand consulte son dossier, il se serait écrié « mais vous avez donc toutes les maladies ! », en référence à toutes les pathologies simulées pour échapper à l’incorporation. Néanmoins, Ernewein a été déclaré « mobilisable dans les services auxiliaires à l’arrière du front ». Ainsi, en janvier 1944, il est convoqué à l’hôpital où on lui notifie l’ordre de se rendre au bureau de recrutement situé rue de Zurich à Strasbourg. Comme il le dit lui-même : « à cette époque, j’avais enfin quelque chose de réel : une sinusite avec une forte température diagnostiquée par une radiographie », mais il était trop tard[45].

L’enrôlement dans l’armée allemande (1944)

Malgré toutes ses tentatives à la fois ingénieuses et risquées, le Dr. Ernewein n’échappe finalement pas à l’enrôlement de force dans la Wehrmacht. Reconnu apte au service, il est mobilisé dans l’armée allemande et un militaire du bureau du recrutement lui remet sa feuille de route avec contenant l’ordre de se « présenter dans les 48 heures à Lublinick en Pologne »[46]. Cherchant toujours à se soustraire au départ vers l’Allemagne, il présente au militaire son certificat médical et sa radiographie en lui disant que son « état de santé » ne lui « permettait pas de partir ». Le militaire lui répond alors que « seul le médecin-général, dont le bureau se trouvait au quai Koch, était compétent pour en juger ». Immédiatement, le Dr. Ernewein se rend sur place et demande à être reçu par le « Generalarzt Stensel »[47]. L’entretien et la suite des événements est relatée par Francis en ces termes :

« Celui-ci me reçut effectivement une heure plus tard d'une façon d’ailleurs très courtoise. Je lui exposai mon cas. Il me répondit qu'il ne pouvait envisager que deux solutions : ou bien me faire hospitaliser à l'hôpital militaire de Strasbourg, ou bien me rendre à Lublinick et de m'y faire porter malade à mon arrivée. Il me laissa la liberté du choix tout en me conseillant de me rendre à Lublinick, où il y avait aussi d'excellents hôpitaux et où je me ferai moins remarquer qu’à Strasbourg »[47].

De toute évidence, par sa réponse, le médecin-général avait remarqué, comme le médecin allemand au moment du conseil de révision, qu’Ernewein cherchait à éviter ou à retarder son incorporation de force. Toutefois, il était clair qu’il était désormais considéré comme un militaire, puisque le médecin-général lui propose d’être hospitaliser à l’hôpital militaire de Strasbourg et non pas à l’hôpital civil, ce qui ne laisse aucun doute sur son statut à l’issue du conseil de révision. Ainsi, pour se faire « mois remarquer » et éviter d’attirer l’attention – au risque d’être alors considéré comme un déserteur et non plus comme une personne réfractaire au service militaire –, Francis se résout à endosser finalement l’uniforme allemand et se met en marche vers la Pologne. Il quitte l’hôpital civil – où il reste toutefois Assistenzarzt sur le papier –, à une époque où le directeur de la clinique médicale se plaint et s’inquiète du manque de personnel au sein de sa clinique[48]. Suivant les conseils du général, il parvient à être « admis dans un hôpital à Katowice » dès son arrivée sur place. Ernewein déclare même qu’il y a été « gard[é] comme médecin après [s]a guérison », poursuivant sa lutte contre le Reich et aidant « de très nombreux Alsaciens »[47].

Finalement, s’il avait réussi à échapper au service armé et à rester en garnison loin du front, la situation change radicalement à l’été 1944. En effet, il écrit :

« Au mois de juillet 1944, je fus désigné pour servir dans une unité combattante qui sera ensuite engagée sur le front de Belgique lors de la fameuse offensive de von Rundstedt. Au cours de cette gigantesque bataille, je fus grièvement blessé à la tête et aux jambes. Du fait de cette blessure, je restai aveugle pendant toute une année. J’ai appris après la guerre que les jeunes médecins alsaciens qui n’avaient pas cherché à se soustraire à l’incorporation avaient pratiquement tous été affectés dans des hôpitaux en Allemagne et n’avaient jamais été envoyés au front »[47].

Le témoignage du Dr. Ernewein est ici très intéressant, puisqu’il semble faire référence à la Notdienstverpflichtung, une mesure applicable dans tout le Reich par laquelle n’importe quel citoyen pouvait être réquisitionné pour effectuer un service dans le cadre de l’état d’urgence. Si la Notdienstverpflichtung pouvait être de courte durée, les médecins étaient en général réquisitionnés pour un temps relativement long, puisqu’ils étaient des spécialistes dans leur domaine et qu’ils avaient été choisis pour leur formation et leurs compétences médicales. Concernant les Alsaciens, la Notdienstverpflichtung avait en outre la valeur d’une mesure rééducative, puisqu’elle permettait l’envoi de médecins peu fiables idéologiquement auprès de médecins allemands prétendument gagnés à la cause nationale-socialiste. De plus, cette rotation du personnel était un moyen d’« assurer les soins médicaux aux populations civiles du Reich »[49]. Quand bien même le Dr. Francis Ernewein reste pendant toute l’année 1944 officiellement rattaché à l’Abteilung I de la clinique médicale – étant simplement noté « actuellement au front » (zur Zeit im Felde) comme sept de ses confrères –, il semble qu’il passe la fin de la guerre à l’hôpital ou en convalescence en raison de ses blessures[50]. Ce n’est qu’après la guerre qu’il reprend une activité médicale en Alsace.


L’après-guerre : la lutte contre la tuberculose

De retour à Strasbourg après la guerre, Francis Ernewein parvient à retrouver un poste au sanatorium Saint-François à Strasbourg pendant quelques mois. En 1948, il est nommé médecin adjoint au sanatorium départemental de Colmar, avant de rejoindre le sanatorium de la SNCF à Munster, où il devient médecin-chef et directeur médical jusque dans les années 1980.

Médecin de service antituberculeux

Après la guerre, le Dr. Ernewein parvient très rapidement à retrouver une activité médicale en Alsace. Échappant aux mesures d’épuration qui ont frappé aussi bien le corps médical que la société civile, Francis Ernewein reprend visiblement un poste au sein de l’hôpital civil de Strasbourg. Après avoir réussi un concours en décembre 1946, il est « mis à la disposition du préfet du Bas-Rhin en vue d’assurer un service public antituberculeux dans ce département »[51].

Francis Ernewein travaille alors comme « médecin adjoint au sanatorium Saint-François » à Strasbourg ». Environ deux ans plus tard, en octobre 1948, un nouvel arrêté publié au Journal officiel de la République française entérine sa nomination comme « médecin adjoint au sanatorium départemental de Colmar » dans le Haut-Rhin[52].

Par la suite, Ernewein obtient un poste au sanatorium Haslach situé à Munster, inauguré en 1926 par la caisse de maladie du réseau Alsace-Lorraine. Situé à près de 700 mètres d’altitude sur un parc de quatre hectares, il était au départ pourvu d’un service de radiologie, ainsi que de 120 lits destinés aux agents des chemins de fer de sexe masculin[53]. Dans les années 1960, il y travaille comme « médecin-chef »[54] et poursuit ses activités médicales spécialisées dans les affections pulmonaires et tout particulièrement la tuberculose. De plus, en 1967, il publie une étude consacrée au « traitement des formes pulmonaires de la mucoviscidose » dans le Journal français de médecine et de chirurgie thoraciques[55]. En 1975, sur arrêté du ministre du travail du 25 septembre, Francis Ernewein et plusieurs de ses confrères de toute la France obtiennent pour cinq ans un « agrément […] en qualité de médecin particulièrement qualifiés en matière de pneumoconioses »[56]. Le Dr. Ernewein poursuit sa carrière dans cet établissement pendant les années 1970 et 1980 et finit par occuper la fonction de « médecin directeur du sanatorium de la SNCF à Munster »[57].

Décès

Francis Ernewein meurt le 5 juillet 1996 à Colmar dans le Haut-Rhin à l’âge de soixante-dix-neuf ans[58].


Publications de Francis Ernewein

Franz Ernewein, Die paroxysmale Hämoglobinurie und ihre Beurteilung in der ärztlichen Gutachtertätigkeit, thèse de doctorat de médecine, Reichsuniversität Straβburg, 1943.

Francis Ernewein, « Le traitement des formes pulmonaires de la mucoviscidose », Journal français de médecine et chirurgie thoraciques, vol. 21, n°5-7, 1967, p. 663.


Sources et bibliographie

Sources ADBR, 4E179/15, État civil de Haguenau, Acte de naissance de J. Ernewein, Acte n°274/1879.

ADBR, 4E900/46, État civil de Haguenau, Table des mariages (1913-1922), Acte de mariage de J. Ernewein et J. Ingwiller, Acte n°57/1913

ADBR, 4E179/15, État civil de Haguenau, Acte de naissance de J. Ingwiller, Acte n°150/1892.

ADBR, 126 AL 37, dossier n°1.

ADBR, 126 AL 37, dossier n°4, Listes du personnel médical de la Reichsuniversität Straβburg (1941-1943).

ADBR, 1558 W 677, dossier n°60991 (Raymond Koessler), Rapport de Stein sur l’état de la clinique médicale de la Reichsuniversität Straβburg adressé au Kurator Scherberger, 4 février 1944

ADHVS, Archives de la faculté de médecine de Strasbourg, Fonds des thèses de médecine (1941-1944), Dossier des rapports d’évaluation des thèses de doctorat soutenues à la Reichsuniversität Straβburg, Dossier Franz Ernewein.

AVES 7 AH 15, Listes du personnel médical de la Reichsuniversität Straβburg (1941-1944).

Bulletin officiel du ministère des Affaires sociales et de la solidarité nationale et du secrétariat d’État chargé de la santé, n°6-9, 1983, p. 6.

Journal français de médecine et chirurgie thoraciques, vol. 21, n°5-7, 1967, p. 633.

Journal officiel de la République française. Lois et décrets. Arrêtés, circulaires, avis communication, information et annonces, 66e année, n°23, 28 janvier 1934, p. 833-835.

Journal officiel de la République française. Lois et décrets. Arrêtés, circulaires, avis, communications, informations et annonces, 79e année, n°232, 2 octobre 1947, p. 9890.

Journal officiel de la République française. Lois et décrets. Arrêtés, circulaires, avis, communications, informations et annonces, 84e année, n°262, 6 novembre 1948, p. 10772.

Journal officiel de la République française. Lois et décrets. Arrêtés, circulaires, avis, communications, informations et annonces, 107e année, n°284, 7 décembre 1975, p. 12480.

L’Alsacien-Lorrain de Paris et des départements français et annexés, 15 juin 1919, p. 3-4.

Le Lorrain le 18 mars 1934, p. 7. Disponible via https://kiosque.limedia.fr/ark:/79345/d0vf9qd9gpr9793l/p7, [en ligne], consulté le 3 mai 2021.

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Bibliographie

Charles Béné, L’Alsace dans les griffes nazies, tome 1, Raon-l’Étape, Fetzer, 1971, p. 249.

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René Burgun, Jacques Héran, « Les médecins restés à Strasbourg face à la politique hitlérienne », in Jacques Héran (dir.), Histoire de la médecine à Strasbourg, Strasbourg, La Nuée Bleue, 1997, p. 620.

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Geneviève Herberich-Marx, Freddy Raphaël, « Les incorporés de force alsaciens. Déni, convocation et provocation de la mémoire », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, n°6, 1985, p. 88.

Christian Kapps, « La maison de santé médicale et de cure de Haslach », Les cahiers des Caisses de prévoyance et retraite, SNCF, n°2, juillet 2002, p. 113.

David Lamoureux, « Le combat des cheminots contre la tuberculose (1919-1939) », Revue d’histoire de la protection sociale, n°1, 2008/1, p.50.

Rainer Möhler, Die Reichsuniversität Straβburg, 1940-1944. Eine nationalsozialistische Musteruniversität zwischen Wissenschaft, Volkstumspolitik und Verbrechen, thèse d’habilitation, Sarrebruck, Université de la Sarre, 2019.

Gabriele Moser, « Die Dissertationen der Medizinischen Fakultät der Reichsuniversität Straβburg: Forschungsstand, neue Funde, Perspektiven der Forschung », en cours de réalisation.

Francis Rohmer, « La Faculté se replie à Clermont-Ferrand, l’Hôpital à Clairvivre », in Jacques Héran (dir.), Histoire de la médecine à Strasbourg, Strasbourg, La Nuée Bleue, 1991, p. 572-583, ici p. 573.

Patrick Wechsler, La Faculté de médicine de la « Reichsuniversität Straβburg » (1941-1945) à l'heure nationale-socialiste, thèse de doctorat de médecine, Strasbourg, Université Louis Pasteur, 1991.


Repères

Localisations

Nationalités

  • Allemand (1916 - 1918)
  • Français (1919 - 1940)
  • Alsacien (1940 - 1944)
  • Français (1945 - 1996)

Confessions

Publications

Relations

Disciple de

Liens à institutions

Faculté de médecine, UdS, 1918-1939

Wehrmacht

Sanatorium Saint-François, FMS-UdS, post-1945

Lungenheilstätte Ruprechtsau, RUS

Reichsuniversität Straβburg

Sanatorium départemental de Colmar

Sanatorium de la SNCF à Munster

Universität Heidelberg

Faculté des sciences, UdS, 1918-1939

Medizinische Abteilung I, RUS

1916-11-19T00:00:00Z
Vie privée
Naissance
1996-07-05T00:00:00Z
Vie privée
Décès
1943-01-01T00:00:00Z
Vie privée
Thèse
1943-02-12T00:00:00Z
Vie privée
Examen
1916-01-01T00:00:00Z
1918-01-01T00:00:00Z
Vie privée
1919-01-01T00:00:00Z
1940-01-01T00:00:00Z
Vie privée
1945-01-01T00:00:00Z
1996-01-01T00:00:00Z
Vie privée
1940-01-01T00:00:00Z
1944-01-01T00:00:00Z
Vie privée
1936-01-01T00:00:00Z
1939-01-01T00:00:00Z
Carrière
1944-01-01T00:00:00Z
1944-11-01T00:00:00Z
Carrière
Wehrmacht, Soldat,
1942-10-01T00:00:00Z
1943-01-01T00:00:00Z
Carrière
1947-01-01T00:00:00Z
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Carrière
1948-01-01T00:00:00Z
1948-01-01T00:00:00Z
Carrière
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Carrière
1940-09-01T00:00:00Z
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Références



  1. 1,0 1,1 1,2 et 1,3 Franz Ernewein, Die paroxysmale Hämoglobinurie und ihre Beurteilung in der ärztlichen Gutachtertätigkeit, , thèse de doctorat de médecine, Reichsuniversität Straβburg, 1943, p. 29.
  2. Voir ADBR, 4E179/15, État civil de Haguenau, , Acte de naissance de J. Ernewein, Acte n°274/1879.
  3. ADBR, 4E900/46, État civil de Haguenau, Table des mariages (1913-1922), Acte de mariage de J. Ernewein et J. Ingwiller, Acte n°57/1913.
  4. Voir ADBR, 4E179/15, État civil de Haguenau, , Acte de naissance de J. Ingwiller, Acte n°150/1892. L’indication du décès est confirmée grâce à une mention marginale.
  5. Voir Georges Foessel, « Ernewein Paul Marie Joseph », Notice NetBDA, Fédération des sociétés d’histoire et d’archéologie d’Alsace, https://www.alsace-histoire.org/netdba/ernewein-paul-marie-joseph/, [en ligne], consulté le 3 mai 2021.
  6. Plusieurs articles publiés dans la presse locale Le Lorrain ou L’Est Républicain dans les pages des ventes publiques présentent en effet l’étude de Maître Joseph Ernewein dans les années 1920 et 1930.
  7. Voir L’Alsacien-Lorrain de Paris et des départements français et annexés, 15 juin 1919, p. 3-4.
  8. Par exemple, un avis nécrologique paraît dans le quotidien mosellan Le Lorrain le 18 mars 1934 à l’occasion du décès de la grand-mère maternelle de Paul et Francis Ernewein survenu deux jours plus tôt. Il s’agit Catherine Debès, veuve de Joseph Ingwiller, originaire de Haguenau. Notons que Joseph Ernewein est ici présenté comme « notaire à Thionville » et les noms de ses fils, « Paul et Francis », sont également mentionnés aux côtés des autres membres de la famille endeuillée. L’avis mortuaire précise que si la levée du corps et le service religieux allaient être célébrés à Thionville le lundi 19 mars (ce qui sous-entend que la défunte vivait avec sa fille, son gendre et ses petits-enfants), l’inhumation était prévue le lendemain à Haguenau, où la famille disposait visiblement d’une concession familiale dans l’un des cimetières de la ville. Voir Le Lorrain, 18 mars 1934, p. 7. Disponible via https://kiosque.limedia.fr/ark:/79345/d0vf9qd9gpr9793l/p7, [en ligne], consulté le 3 mai 2021.
  9. 9,0 9,1 et 9,2 Franz Ernewein, Die paroxysmale Hämoglobinurie und ihre Beurteilung in der ärztlichen Gutachtertätigkeit, , thèse de doctorat de médecine, Reichsuniversität Straβburg, 1943, p. 29.
  10. Mis en place par le président Albert Lebrun sur décret du 23 janvier 1934, le PCB – qui a été conservé jusqu’en 1961 –, était le successeur du certificat d’études physiques, chimiques et naturelles (PCN) qui avait été instauré sous la IIIe République par décret du 31 juillet 1893. Même si le remplacement du PCN par PCB marquait la substitution des sciences biologiques aux sciences naturelles dans la formation initiale des futurs médecins, le PCB était sensiblement identique à son prédécesseur. Une série d’épreuves finales était organisée à la fin de cette année de préparation, comprenant à la fois une interrogation et une épreuve pratique dans chacune des quatre disciplines du programme, à savoir la physique, la chimie, la biologie animale et la biologie végétale. Sur la législation concernant le Certificat PCB, on renvoie notamment au « Rapport au président de la République » remis par le ministre de l’Éducation nationale Anatole de Monzie le 23 janvier 1934 et au décret du président Albert Lebrun du 23 janvier 1934, in Journal officiel de la République française. Lois et décrets. Arrêtés, circulaires, avis communication, information et annonces, 66e année, n°23, 28 janvier 1934, p. 833-835. Disponible via https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6545133s/f18.item, [en ligne], consulté le 12 avril 2021.
  11. Francis Rohmer, « La Faculté se replie à Clermont-Ferrand, l’Hôpital à Clairvivre », in Jacques Héran (dir.), Histoire de la médecine à Strasbourg, Strasbourg, La Nuée Bleue, 1991, p. 572-583, ici p. 573. Précisons avec le Dr. Rohmer que le nombre d’étudiants officiellement immatriculés ou inscrits à Clermont-Ferrand durant l’année universitaire 1939-1940 s’élevait à 529. Toutefois, le nombre de ceux qui étaient effectivement présents et qui suivaient les cours était bien moindre en raison de la mobilisation d’un certain nombre de jeunes hommes (88 en médecine et 27 en chirurgie dentaire). Donc s’il est possible que Francis Ernewein ait cherché à poursuivre ses études à Clermont-Ferrand, il est tout aussi probable qu’il ait été mobilisé au même moment ou peu de temps après.
  12. Dans son témoignage publié dans l’ouvrage de Charles Béné, Francis Ernewein explique qu’au moment où il est visé par un enrôlement dans l’armée allemande (dès 1943), ses confrères et lui avaient « tous déjà effectué [leur] service militaire dans l’armée française ». Voir Charles Béné, L’Alsace dans les griffes nazies, tome 6, Raon-l’Étape, Fetzer, 1984, p. 220.
  13. Charles Béné, L’Alsace dans les griffes nazies, tome 6, Raon-l’Étape, Fetzer, 1984, , p. 218.
  14. Franz Ernewein, Die paroxysmale Hämoglobinurie und ihre Beurteilung in der ärztlichen Gutachtertätigkeit, , thèse de doctorat de médecine, Reichsuniversität Straβburg, 1943, p. 29.
  15. Charles Béné, L’Alsace dans les griffes nazies, tome 6, Raon-l’Étape, Fetzer, 1984, , p. 218-219.
  16. 16,0 et 16,1 « Fünfte Verordnung zur Durchführung und Ergänzung der Reichsärzteordnung (Bestallungsordnung für Ärzte) vom 17. Juli 1939 », Reichsgesetzblatt, Teil I, 1939, n°130, 22 juillet 1939, p. 1273-1303.
  17. Charles Béné, L’Alsace dans les griffes nazies, tome 6, Raon-l’Étape, Fetzer, 1984, , p. 219.
  18. Sur l’inauguration de la Reichsuniversität Straβburg et sur l’histoire de cette université du Reich et de sa faculté de médecine, voir Tania Elias, « La cérémonie inaugurale de la Reichsuniversität Straβburg (1941). L’expression du nazisme triomphant en Alsace annexée », Revue d’Allemagne et des Pays de langue allemande, tome 43, n°3, juillet-septembre 2011, p. 341-361 ; Rainer Möhler, Die Reichsuniversität Straβburg, 1940-1944. Eine nationalsozialistische Musteruniversität zwischen Wissenschaft, Volkstumspolitik und Verbrechen, thèse d’habilitation, Sarrebruck, Université de la Sarre, 2019 ; Patrick Wechsler, La Faculté de médicine de la « Reichsuniversität Straβburg » (1941-1945) à l'heure nationale-socialiste, thèse de doctorat de médecine, Strasbourg, Université Louis Pasteur, 1991.
  19. AVES 7 AH 15, , Listes du personnel médical de la Reichsuniversität Straβburg (novembre 1941).
  20. AVES 7 AH 15, , Listes du personnel médical de la Reichsuniversität Straβburg (décembre 1941).
  21. La présence d’Ernewein au sanatorium de la Robertsau est attestée jusqu’en décembre 1942 (au moins) et à partir de février 1943, il est à nouveau inscrit sur la liste du personnel de l’Abteilung I (la liste du mois de janvier manque). De plus, il est par la suite remplacé en juin 1943 au sanatorium par le Dr. Luzia Thierselin-Trautmann en qualité de Volontärassistentin. Magdalena Uhrig (devenant Schalck-Uhrig en janvier 1944) occupe son poste jusqu’en novembre 1944.
  22. Charles Béné, L’Alsace dans les griffes nazies, tome 6, Raon-l’Étape, Fetzer, 1984, , p. 220.
  23. La première liste conservée faisant état de ce changement de statut est celle du 1er juin 1943 (celles des mois de mars et de mai sont absentes et celle du mois d’avril est incomplète). Précisons qu’il est tout à fait possible que sa nomination ait eu un effet rétroactif, comme souvent, mais nous n’avons pas retrouvé le dossier de recrutement d’Ernewein comme Volontärassistent. Voir AVES 7 AH 15 et ADBR, 126 AL 37, dossier n°4, Listes du personnel médical de la Reichsuniversität Straβburg (juin 1943).
  24. Voir AVES 7 AH 15, Listes du personnel médical de la Reichsuniversität Straβburg (1943-1944). Notons qu’Ernewein occupe ce poste d’Assistenzarzt à l’Abteilung I de la clinique médicale jusqu’en novembre 1944, quand bien même il a été enrôlé dans l’armée allemande en janvier 1944. En effet, son nom est toujours inscrit les listes du personnel de février à novembre 1944, avec la précision qu’il se trouvait « actuellement au front » (zur Zeit im Felde).
  25. Voir à ce sujet l’étude de Gabriele Moser, « Die Dissertationen der Medizinischen Fakultät der Reichsuniversität Straβburg : Forschungsstand, neue Funde, Perspektiven der Forschung », in …… On renvoie également aux fiches biographiques de chacun de ces doctorants de ce Wikipédia.
  26. Franz Ernewein, Die paroxysmale Hämoglobinurie und ihre Beurteilung in der ärztlichen Gutachtertätigkeit, , thèse de doctorat de médecine, Reichsuniversität Straβburg, 1943, p. 1.
  27. Franz Ernewein, Die paroxysmale Hämoglobinurie und ihre Beurteilung in der ärztlichen Gutachtertätigkeit, , thèse de doctorat de médecine, Reichsuniversität Straβburg, 1943, p. 2-3
  28. Franz Ernewein, Die paroxysmale Hämoglobinurie und ihre Beurteilung in der ärztlichen Gutachtertätigkeit, , thèse de doctorat de médecine, Reichsuniversität Straβburg, 1943, p. 26-27.
  29. Franz Ernewein, Die paroxysmale Hämoglobinurie und ihre Beurteilung in der ärztlichen Gutachtertätigkeit, , thèse de doctorat de médecine, Reichsuniversität Straβburg, 1943, p. 3-5.
  30. Franz Ernewein, Die paroxysmale Hämoglobinurie und ihre Beurteilung in der ärztlichen Gutachtertätigkeit, , thèse de doctorat de médecine, Reichsuniversität Straβburg, 1943, p. 5-6.
  31. Franz Ernewein, Die paroxysmale Hämoglobinurie und ihre Beurteilung in der ärztlichen Gutachtertätigkeit, , thèse de doctorat de médecine, Reichsuniversität Straβburg, 1943, p. 6-15.
  32. Franz Ernewein, Die paroxysmale Hämoglobinurie und ihre Beurteilung in der ärztlichen Gutachtertätigkeit, , thèse de doctorat de médecine, Reichsuniversität Straβburg, 1943, p. 15-19.
  33. Franz Ernewein, Die paroxysmale Hämoglobinurie und ihre Beurteilung in der ärztlichen Gutachtertätigkeit, , thèse de doctorat de médecine, Reichsuniversität Straβburg, 1943, p. 19-20.
  34. Franz Ernewein, Die paroxysmale Hämoglobinurie und ihre Beurteilung in der ärztlichen Gutachtertätigkeit, thèse de doctorat de médecine, Reichsuniversität Straβburg, 1943, p. 23-24.
  35. ADHVS, Archives de la faculté de médecine de Strasbourg, Dossier des rapports d’évaluation des thèses de doctorat soutenues à la Reichsuniversität Straβburg, , Dossier Franz Ernewein, Certificat de dépôt du manuscrit de la thèse de doctorat signé par F. Ernewein, 10 février 1943.
  36. ADHVS, Archives de la faculté de médecine de Strasbourg, Dossier des rapports d’évaluation des thèses de doctorat soutenues à la Reichsuniversität Straβburg, , Dossier Franz Ernewein, Referat über die Doktor-Arbeit, Johannes Stein, 10 février 1943 : « Der Volontärassistent Franz Ernewein hat in der vorliegenden Arbeit nach einem allgemeinen Überblick die derzeitigen Kenntnisse über Ätiologie, Pathogenese und klinisches Erscheinungsbild der paroxysmalen Hämoglobinurie ausführlich dargestellt, im Anschluss daran einen eigenen Fall mitgeteilt und einer eingehenden epikritischen Betrachtung unterzogen. Am Schluss der Arbeit wird zur Frage der Bedeutung des Leidens in der ärztlichen Gutachtertätigkeit Stellung genommen. Das Thema ist mit Fleiß bearbeitet. Die Darstellung ist klar und übersichtlich, die eigene Stellungnahme gut begründet. Ich schlage die Note „gut“ vor ».
  37. ADHVS, Archives de la faculté de médecine de Strasbourg, Dossier des rapports d’évaluation des thèses de doctorat soutenues à la Reichsuniversität Straβburg, , Dossier Franz Ernewein, Protokoll der ärztlichen Doktorprüfung bei der Medizinischen Fakultät der Reichsuniversität Straβburg, 12 février 1943.
  38. ADHVS, Archives de la faculté de médecine de Strasbourg, Dossier des rapports d’évaluation des thèses de doctorat soutenues à la Reichsuniversität Straβburg, , Dossier Franz Ernewein, Certificat d’obtention du doctorat établi le professeur Stein, 12 février 1943.
  39. René Burgun, Jacques Héran, « Les médecins restés à Strasbourg face à la politique hitlérienne », in Jacques Héran (dir.), Histoire de la médecine à Strasbourg, Strasbourg, La Nuée Bleue, 1997, p. 620 ; Charles Béné, L’Alsace dans les griffes nazies, tome 1, Raon-l’Étape, Fetzer, 1971, p. 249 ; Charles Béné, L’Alsace dans les griffes nazies, tome 6, Raon-l’Étape, Fetzer, 1984, p. 218. Né à Colmar le 3 juillet 1913, Willy Burgmeier est arrivé à Schirmeck le 21 juillet 1942 et a quitté le camp le 23 février 1944 : voir Livre-mémorial des déportés de France arrêtés par mesure de répression et dans certains cas par mesure de persécution, 1940-1945, tome 3, Paris, Tirésias, 2004, p. 725.
  40. Charles Béné, L’Alsace dans les griffes nazies, tome 6, Raon-l’Étape, Fetzer, 1984, , p. 218. Voir également René Burgun, Jacques Héran, « Les médecins restés à Strasbourg face à la politique hitlérienne », in Jacques Héran (dir.), Histoire de la médecine à Strasbourg, Strasbourg, La Nuée Bleue, 1997, p. 620.
  41. Charles Béné, L’Alsace dans les griffes nazies, tome 6, Raon-l’Étape, Fetzer, 1984, , p. 223.
  42. Charles Béné, L’Alsace dans les griffes nazies, tome 6, Raon-l’Étape, Fetzer, 1984, , p. 219-220.
  43. Geneviève Herberich-Marx, Freddy Raphaël, « Les incorporés de force alsaciens. Déni, convocation et provocation de la mémoire », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, n°6, 1985, p. 88.
  44. 44,0 et 44,1 Charles Béné, L’Alsace dans les griffes nazies, tome 6, Raon-l’Étape, Fetzer, 1984, , p. 220-221.
  45. Charles Béné, L’Alsace dans les griffes nazies, tome 6, Raon-l’Étape, Fetzer, 1984, , p. 221-222.
  46. Charles Béné, L’Alsace dans les griffes nazies, tome 6, Raon-l’Étape, Fetzer, 1984, , p. 222. Il s’agit probablement de la ville de Lubliniec (ou Lublinitz en allemand) situé en Haute-Silésie dans la voïvodie de Silésie.
  47. 47,0 47,1 47,2 et 47,3 Charles Béné, L’Alsace dans les griffes nazies, tome 6, Raon-l’Étape, Fetzer, 1984, , p. 222.
  48. ADBR, 1558 W 677, dossier n°60991 (Raymond Koessler), Rapport de Stein sur l’état de la clinique médicale de la Reichsuniversität Straβburg adressé au Kurator Scherberger, 4 février 1944. Dans ce rapport, Stein dénonce un manque de personnel aggravé par le fait que plusieurs de ses assistants sont absents pour raisons de santé comme Günther Holzapfel et Valentin Becker, tous deux gravement blessés à la guerre, ou le Dr. Werner Jordan qui subit les séquelles d’une grave tuberculose. De plus, certains médecins ne travaillent qu’à temps partiel à la clinique, comme les Alsaciens Charles Gunsett et Frédéric-Auguste Schaaf, qui possèdent aussi une patientèle privée en dehors de l’hôpital. D’autres médecins ont aussi été contraints de quitter la clinique en raison d’ordres pris par les autorités civiles ou militaires : les Drs. Wagner et Discher ont quitté la clinique médicale pour être affectés à la clinique chirurgicale, tandis que le Dr. Ernewein a été enrôlé dans l’armée allemande (zum Wehrdienst verpflichtet) et que le Dr. Conradt a été obligé de se rendre en Allemagne pour effectuer un service médical en campagne (für eine Landpraxis dienstverpflichtet).
  49. Voir à ce sujet ADBR, 126 AL 37, dossier n°1.
  50. AVES, 7 AH 15, Listes du personnel médical de la Reichsuniversität Straβburg (février-novembre 1944). Voir aussi Charles Béné, L’Alsace dans les griffes nazies, tome 6, Raon-l’Étape, Fetzer, 1984, p. 222. À partir de février 1944, le Dr. Ernewein est classé parmi les médecins qui se trouvaient alors au front (zur Zeit im Felde). Pour la clinique médicale, cela représente tout de même huit médecins allemands ou alsaciens-mosellans de statuts différents : Gunnar Berg, Guido Bommer, Karl Dörr, Karl Loos, Harald Neugebauer, Wilhelm Trill, Karl Waeckel et Fritz Letz (qui finit par être détaché auprès de Bickenbach à l’institut de recherches).
  51. Journal officiel de la République française. Lois et décrets. Arrêtés, circulaires, avis, communications, informations et annonces, , 79e année, n°232, 2 octobre 1947, p. 9890.
  52. Journal officiel de la République française. Lois et décrets. Arrêtés, circulaires, avis, communications, informations et annonces, , 84e année, n°262, 6 novembre 1948, p. 10772.
  53. Voir Christian Kapps, « La maison de santé médicale et de cure de Haslach », Les cahiers des Caisses de prévoyance et retraite, SNCF, n°2, juillet 2002, p. 113 ; David Lamoureux, « Le combat des cheminots contre la tuberculose (1919-1939) », Revue d’histoire de la protection sociale, n°1, 2008/1, p.50.
  54. Journal français de médecine et chirurgie thoraciques, vol. 21, n°5-7, 1967, p. 633.
  55. Francis Ernewein, « Le traitement des formes pulmonaires de la mucoviscidose », Journal français de médecine et chirurgie thoraciques, vol. 21, n°5-7, 1967, p. 663.
  56. Journal officiel de la République française. Lois et décrets. Arrêtés, circulaires, avis, communications, informations et annonces, , 107e année, n°284, 7 décembre 1975, p. 12479-12480. Disponible via https://www.legifrance.gouv.fr/download/securePrint?token=T0@BLXPqmndOdPSJDFxg, [en ligne], consulté le 3 mai 2021.
  57. Voir Journal officiel de la République française. Lois et décrets. Arrêtés, circulaires, avis, communications, informations et annonces, 107e année, n°284, 7 décembre 1975, p. 12480. Disponible via https://www.legifrance.gouv.fr/download/securePrint?token=T0@BLXPqmndOdPSJDFxg, [en ligne], consulté le 3 mai 2021. Voir aussi Bulletin officiel du ministère des Affaires sociales et de la solidarité nationale et du secrétariat d’État chargé de la santé, n°6-9, 1983, p. 6.
  58. Voir la fiche « Généafrance » de Marie François Joseph Ernewein.