Différences entre les versions de « Joseph Gerber »
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|Resume_fr=Né à Strasbourg, Joseph Gerber (1897-1945) a été victime de la persécution politique du national-socialisme hitlérien en Alsace annexée. Le 16 avril 1943, il est arrêté pour « détournement d’argent », placé en détention préventive par la Sipo de Strasbourg, puis déporté une première fois au camp de concentration de Natzweiler le 28 avril 1943 (matricule 3441) et transféré le jour-même au Sicherungslager de Schirmeck-Vorbruck à quelques kilomètres de distance. Il est renvoyé le 14 juillet 1943 à Natzweiler (matricule 4520), comme détenu politique. Début septembre 1944, il est évacué au camp de concentration de Dachau, et est affecté aux camps extérieurs de Trostberg, puis d’Allach, où il est libéré le 30 avril 1945. Il meurt cinq mois plus tard, à Strasbourg, le 27 septembre 1945. | |||
Durant sa déportation à Natzweiler, Joseph Gerber se blesse à l’œil droit au cours de travaux de construction dans le camp. Soigné brièvement à l’infirmerie du camp, il est finalement admis en ambulatoire – sur ordre du médecin SS et du commandant du camp – à la clinique ophtalmologique de la Reichsuniversität Straßburg, pour bénéficier de soins spécialisés. Bénéficiant d’un traitement de faveur tout à fait rare dans le système concentrationnaire, Gerber est l’un des dix-huit détenus du KL-Natzweiler à avoir été hospitalisés dans les cliniques universitaires de Strasbourg, illustrant ainsi des liens inhabituels et rares entretenus par le camp avec le monde extérieur. | |||
|Contexte_fr='''Origines et famille''' | |||
Joseph Victor Gerber est né le 17 mars 1897 à Strasbourg, à une époque où l’Alsace rattachée au Reich allemand depuis le traité de Francfort de 1871. Il est issu d’une famille catholique alsacienne de condition modeste. Son père, Joseph Gerber, né le 29 novembre 1870 à Strasbourg<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>, était conducteur de locomotive<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. Le 9 juillet 1896, il épouse à Strasbourg<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref> la fille d’un cantonnier, Clémentine Hätty, née le 29 janvier 1878 à Guémar dans le Haut-Rhin<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. Le couple demeurait dans la rue du Polygone dans le quartier du Neudorf à Strasbourg et le père était déjà à la retraite à la naissance de leur fils Joseph<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. | |||
Le 8 mars 1912, le tribunal d’instance de Strasbourg (''Kaiserliches Landgericht'') prononce le divorce des parents de Joseph Gerber<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. Par la suite, sa mère se remarie, le 9 janvier 1913<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>, avec un employé de laboratoire (''Laboratoriumsdiener''), Karl Metzger, un prussien tué au front lors de la Première Guerre mondiale<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. Une fois veuve, Clémentine quitte son logement de la ruelle des Juifs (''Judengasse 25'') et s’installe au 9 de la ''Kaiser-Friedrichstraße'', jusqu’à son décès le 10 mai 1917 à l’hôpital civil de Strasbourg<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. Le père de Joseph décède quant à lui le 23 juin 1925 à Strasbourg<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. | |||
'''De l’enfance à l’âge adulte''' | |||
Pendant huit années, Joseph Gerber fréquente une école élémentaire (''Volksschule'') dans sa ville natale, à Strasbourg. De plus, durant l’enfance, il contracte des maladies communes à la période, comme la scarlatine et la diphtérie. En 1908, à la suite d’un accident, il se blesse à la jambe gauche. D’un point de vue professionnel, Gerber multiplie les emplois : il exerce tantôt comme ouvrier, tantôt comme journalier, tantôt comme chauffeur. Par ailleurs, avec le déclenchement de la Première Guerre mondiale, il est incorporé dans l’armée allemande, où il sert dans une unité d’artillerie. En pleine guerre, en 1917, il contracte la malaria et souffre visiblement depuis ce moment-là de bronchite chronique<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. | |||
Après la guerre, le 21 août 1920, Joseph-Victor épouse une couturière, Valérie Alice Kopf et le couple vit au 67 de la rue de Zurich à Strasbourg. Quelque temps plus tard, leur union est dissoute à la suite d’un jugement du tribunal régional de Strasbourg<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>, puis Joseph épouse, en secondes noces, Léonie Riemer le 3 mars 1923<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. Tous deux s’installent au 2 rue de Molsheim, puis au 3 de la rue des écrivains (''Schreiberstubgasse'') à Strasbourg. Un enfant naît probablement de cette seconde union, car à son arrivée au camp de concentration de Natzweiler en 1943, Joseph déclare avoir un enfant alors âgé de vingt ans. En 1923, on lui pratique une appendicectomie, c’est-à-dire l’ablation chirurgicale de l’appendicite. En 1927, à la suite d’un accident de la circulation, il est blessé au visage et se fracture en outre la clavicule droite. C’est peut-être à cause de cet accident que Joseph présente une perte d’audition du côté droit, ainsi que le remarque le médecin ''SS'' du ''KL-Natzweiler'' lors de son examen d’arrivée<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. | |||
'''De l’arrestation au ''KL-Natzweiler''''' | |||
Joseph Gerber est arrêté le 16 avril 1943 à Strasbourg pour des raisons « politiques » et plus précisément pour un « détournement d’argent » à hauteur de 130 ''Reichsmarks''. Son parcours est intéressant puisqu’il est immatriculé à deux reprises au ''KL-Natzweiler''. En effet, après son arrestation, la ''Sicherheitspolizei'' de Strasbourg l’envoie dans un premier temps à Natzweiler le 28 avril 1943<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. Il est d’abord catégorisé comme déporté politique alsacien et reçoit le numéro de matricule 3441. Sur les 31 déportés arrivés ce jour-là, dix sont directement transférés dès le lendemain au ''Sicherungslager'' de Schirmeck-Vorbruck, à quelques kilomètres de distance, dans la vallée de la Bruche. Gerber est l’un d’entre eux<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. | |||
Il reste au camp de sûreté de Vorbruck jusqu’au 14 juillet 1943, avant d’être renvoyé – avec 34 autres détenus – au ''KL-Natzweiler'', dans un convoi composé de Russes, de Polonais, de prisonniers de droit commun et politiques, d’homosexuels et d’un Témoin de Jéhovah. Il est catégorisé comme déporté politique sous le matricule 4520. Il reste alors au camp jusqu’à l’évacuation du camp-principal début septembre 1944<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. | |||
'''L’admission à la clinique ophtalmologique universitaire de Strasbourg''' | |||
Durant sa déportation au KL-Natzweiler, Joseph Gerber est affecté aux travaux de construction du camp. Il travaille plus précisément comme couvreur (''Dachdecker'') et participe aux travaux de toiture dans le camp. Dans cette affectation, il se blesse à l’œil droit le dimanche 22 août 1943, ce qui montre en outre que le travail dominical avait été instauré à cette période. Selon les registres de la ''Bauleitung'' concernant ce jour-là, on note que parmi les 320 détenus astreints aux besognes pour les ''SS'', quatre d’entre eux étaient « Dachdecker » et effectuaient des travaux de réparation de toiture (''Dachreparaturen'') sur des baraquements du camp<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. | |||
Malgré sa blessure, Joseph Gerber n’est manifestement admis à l’infirmerie du camp (''Revier'') que le 7 septembre 1943, soit plus de deux semaines après son accident<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. Au terme de sa première nuit au ''Revier'', le Dr Gerhard Schiedlausky, médecin-chef ''SS'' du ''KL-Natzweiler'', demande au commandant du camp, Josef Kramer, l’hospitalisation de Gerber en dehors du système concentrationnaire. Le 8 septembre, il sollicite en effet auprès du commandant du camp l’autorisation de transférer Gerber à la clinique ophtalmologique de la ''Reichsuniversität Straßburg'' pour un « traitement en ambulatoire » (''einmalige ambulante Behandlung''), si possible pour le lendemain<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. | |||
Si les sources restent muettes sur son traitement à la clinique ophtalmologique universitaire de Strasbourg, son admission est néanmoins confirmée par le rapport trimestriel du médecin du camp daté du 16 septembre 1943. Il écrit que le | |||
« traitement de détenus en dehors de l’infirmerie des détenus a été nécessaire dans deux cas. […] Un autre [détenu] a dû être amené dans la même clinique pour un traitement en ambulatoire (''zur einmaligen ambulanten Behandlung'') »<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. | |||
À son retour au camp, Joseph Gerber est maintenu en convalescence jusqu’au 20 septembre. Mais son état de santé est sur une courbe descendante. Si l’on accorde quelque crédit aux sources nazies, on s’aperçoit qu’à son arrivée au camp le 14 juillet 1943, Gerber pesait 80 kg pour 172 cm. Le mois suivant, son poids passe à 76 kg, avant de chuter à 72 kg en septembre. En moins de deux mois, Joseph Gerber a donc perdu huit kilogrammes<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. On note enfin qu’au début de l’année 1944, Gerber contracte une pneumonie, ce qui nécessite à nouveau une hospitalisation au Revier pendant près de trois semaines suivies d’un mois complet en convalescence<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. | |||
'''Du ''KL-Dachau'' à la fin de la guerre''' | |||
Au regard de la situation militaire et de l’avancée des Alliés à l’Ouest, le haut-commandement de la ''SS'' prend la décision, le 1er septembre 1944, d’évacuer le ''KL-Natzweiler'' « le plus rapidement possible »<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. Les détenus du camp principal sont dirigés vers le ''KL-Dachau'', en Bavière, et Gerber fait partie du premier convoi (2.400 hommes) qui part du ''KL-Natzweiler'' dans la nuit du 2 au 3 septembre 1944. Arrivés sur place le 4 septembre, les détenus sont immatriculés le lendemain<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. Gerber y reçoit le matricule 98715 et le triangle rouge des détenus politiques<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. | |||
Selon toute vraisemblance, Gerber aurait été détaché dans l’un des camps-annexes du KL-Dachau alors nouvellement créé à Trostberg en novembre 1944<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. Les détenus y travaillaient pour la firme BMW à la construction de moteurs d’avions. Le 20 novembre 1944, Gerber y est nommé doyen de Block (''Blockältester'')<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. Par la suite, il est affecté à Allach, où les détenus participent à différents projets pour l’industrie de guerre, notamment pour la firme BMW ou pour l’Organisation Todt. Situé à quelques kilomètres de Dachau, ce ''kommando'' est créé le 17 mai 1944 et compte jusqu’à 3.850 déportés. On remarque également que le 11 avril 1945, Gerber a pu, sans doute parce qu’il était détenu-fonctionnaire, a pu récupérer son alliance en or déposée à l’''Effektenkammer''<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. | |||
Joseph Gerber connaît la libération le 30 avril 1945, lorsque les troupes américaines libèrent le camp annexe d’Allach<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. Après-guerre, il retourne à Strasbourg, mais décède cinq mois plus tard, le 27 septembre 1945, probablement des suites de sa déportation<ref name="1ac627d976216d2e102d3e07113ad86020f634f1">référence.</ref>. | |||
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Version du 15 mars 2024 à 08:50
Joseph Gerber | |
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Prénom | Joseph |
Nom | Gerber |
Sexe | masculin |
Naissance | 17 mars 1897 (Strasbourg) |
Décès | 27 septembre 1945 (Strasbourg) |
Né à Strasbourg, Joseph Gerber (1897-1945) a été victime de la persécution politique du national-socialisme hitlérien en Alsace annexée. Le 16 avril 1943, il est arrêté pour « détournement d’argent », placé en détention préventive par la Sipo de Strasbourg, puis déporté une première fois au camp de concentration de Natzweiler le 28 avril 1943 (matricule 3441) et transféré le jour-même au Sicherungslager de Schirmeck-Vorbruck à quelques kilomètres de distance. Il est renvoyé le 14 juillet 1943 à Natzweiler (matricule 4520), comme détenu politique. Début septembre 1944, il est évacué au camp de concentration de Dachau, et est affecté aux camps extérieurs de Trostberg, puis d’Allach, où il est libéré le 30 avril 1945. Il meurt cinq mois plus tard, à Strasbourg, le 27 septembre 1945.
Durant sa déportation à Natzweiler, Joseph Gerber se blesse à l’œil droit au cours de travaux de construction dans le camp. Soigné brièvement à l’infirmerie du camp, il est finalement admis en ambulatoire – sur ordre du médecin SS et du commandant du camp – à la clinique ophtalmologique de la Reichsuniversität Straßburg, pour bénéficier de soins spécialisés. Bénéficiant d’un traitement de faveur tout à fait rare dans le système concentrationnaire, Gerber est l’un des dix-huit détenus du KL-Natzweiler à avoir été hospitalisés dans les cliniques universitaires de Strasbourg, illustrant ainsi des liens inhabituels et rares entretenus par le camp avec le monde extérieur.
Biographie
Origines et famille
Joseph Victor Gerber est né le 17 mars 1897 à Strasbourg, à une époque où l’Alsace rattachée au Reich allemand depuis le traité de Francfort de 1871. Il est issu d’une famille catholique alsacienne de condition modeste. Son père, Joseph Gerber, né le 29 novembre 1870 à Strasbourg[1], était conducteur de locomotive[1]. Le 9 juillet 1896, il épouse à Strasbourg[1] la fille d’un cantonnier, Clémentine Hätty, née le 29 janvier 1878 à Guémar dans le Haut-Rhin[1]. Le couple demeurait dans la rue du Polygone dans le quartier du Neudorf à Strasbourg et le père était déjà à la retraite à la naissance de leur fils Joseph[1].
Le 8 mars 1912, le tribunal d’instance de Strasbourg (Kaiserliches Landgericht) prononce le divorce des parents de Joseph Gerber[1]. Par la suite, sa mère se remarie, le 9 janvier 1913[1], avec un employé de laboratoire (Laboratoriumsdiener), Karl Metzger, un prussien tué au front lors de la Première Guerre mondiale[1]. Une fois veuve, Clémentine quitte son logement de la ruelle des Juifs (Judengasse 25) et s’installe au 9 de la Kaiser-Friedrichstraße, jusqu’à son décès le 10 mai 1917 à l’hôpital civil de Strasbourg[1]. Le père de Joseph décède quant à lui le 23 juin 1925 à Strasbourg[1].
De l’enfance à l’âge adulte
Pendant huit années, Joseph Gerber fréquente une école élémentaire (Volksschule) dans sa ville natale, à Strasbourg. De plus, durant l’enfance, il contracte des maladies communes à la période, comme la scarlatine et la diphtérie. En 1908, à la suite d’un accident, il se blesse à la jambe gauche. D’un point de vue professionnel, Gerber multiplie les emplois : il exerce tantôt comme ouvrier, tantôt comme journalier, tantôt comme chauffeur. Par ailleurs, avec le déclenchement de la Première Guerre mondiale, il est incorporé dans l’armée allemande, où il sert dans une unité d’artillerie. En pleine guerre, en 1917, il contracte la malaria et souffre visiblement depuis ce moment-là de bronchite chronique[1].
Après la guerre, le 21 août 1920, Joseph-Victor épouse une couturière, Valérie Alice Kopf et le couple vit au 67 de la rue de Zurich à Strasbourg. Quelque temps plus tard, leur union est dissoute à la suite d’un jugement du tribunal régional de Strasbourg[1], puis Joseph épouse, en secondes noces, Léonie Riemer le 3 mars 1923[1]. Tous deux s’installent au 2 rue de Molsheim, puis au 3 de la rue des écrivains (Schreiberstubgasse) à Strasbourg. Un enfant naît probablement de cette seconde union, car à son arrivée au camp de concentration de Natzweiler en 1943, Joseph déclare avoir un enfant alors âgé de vingt ans. En 1923, on lui pratique une appendicectomie, c’est-à-dire l’ablation chirurgicale de l’appendicite. En 1927, à la suite d’un accident de la circulation, il est blessé au visage et se fracture en outre la clavicule droite. C’est peut-être à cause de cet accident que Joseph présente une perte d’audition du côté droit, ainsi que le remarque le médecin SS du KL-Natzweiler lors de son examen d’arrivée[1].
De l’arrestation au KL-Natzweiler
Joseph Gerber est arrêté le 16 avril 1943 à Strasbourg pour des raisons « politiques » et plus précisément pour un « détournement d’argent » à hauteur de 130 Reichsmarks. Son parcours est intéressant puisqu’il est immatriculé à deux reprises au KL-Natzweiler. En effet, après son arrestation, la Sicherheitspolizei de Strasbourg l’envoie dans un premier temps à Natzweiler le 28 avril 1943[1]. Il est d’abord catégorisé comme déporté politique alsacien et reçoit le numéro de matricule 3441. Sur les 31 déportés arrivés ce jour-là, dix sont directement transférés dès le lendemain au Sicherungslager de Schirmeck-Vorbruck, à quelques kilomètres de distance, dans la vallée de la Bruche. Gerber est l’un d’entre eux[1].
Il reste au camp de sûreté de Vorbruck jusqu’au 14 juillet 1943, avant d’être renvoyé – avec 34 autres détenus – au KL-Natzweiler, dans un convoi composé de Russes, de Polonais, de prisonniers de droit commun et politiques, d’homosexuels et d’un Témoin de Jéhovah. Il est catégorisé comme déporté politique sous le matricule 4520. Il reste alors au camp jusqu’à l’évacuation du camp-principal début septembre 1944[1].
L’admission à la clinique ophtalmologique universitaire de Strasbourg
Durant sa déportation au KL-Natzweiler, Joseph Gerber est affecté aux travaux de construction du camp. Il travaille plus précisément comme couvreur (Dachdecker) et participe aux travaux de toiture dans le camp. Dans cette affectation, il se blesse à l’œil droit le dimanche 22 août 1943, ce qui montre en outre que le travail dominical avait été instauré à cette période. Selon les registres de la Bauleitung concernant ce jour-là, on note que parmi les 320 détenus astreints aux besognes pour les SS, quatre d’entre eux étaient « Dachdecker » et effectuaient des travaux de réparation de toiture (Dachreparaturen) sur des baraquements du camp[1].
Malgré sa blessure, Joseph Gerber n’est manifestement admis à l’infirmerie du camp (Revier) que le 7 septembre 1943, soit plus de deux semaines après son accident[1]. Au terme de sa première nuit au Revier, le Dr Gerhard Schiedlausky, médecin-chef SS du KL-Natzweiler, demande au commandant du camp, Josef Kramer, l’hospitalisation de Gerber en dehors du système concentrationnaire. Le 8 septembre, il sollicite en effet auprès du commandant du camp l’autorisation de transférer Gerber à la clinique ophtalmologique de la Reichsuniversität Straßburg pour un « traitement en ambulatoire » (einmalige ambulante Behandlung), si possible pour le lendemain[1].
Si les sources restent muettes sur son traitement à la clinique ophtalmologique universitaire de Strasbourg, son admission est néanmoins confirmée par le rapport trimestriel du médecin du camp daté du 16 septembre 1943. Il écrit que le
« traitement de détenus en dehors de l’infirmerie des détenus a été nécessaire dans deux cas. […] Un autre [détenu] a dû être amené dans la même clinique pour un traitement en ambulatoire (zur einmaligen ambulanten Behandlung) »[1].
À son retour au camp, Joseph Gerber est maintenu en convalescence jusqu’au 20 septembre. Mais son état de santé est sur une courbe descendante. Si l’on accorde quelque crédit aux sources nazies, on s’aperçoit qu’à son arrivée au camp le 14 juillet 1943, Gerber pesait 80 kg pour 172 cm. Le mois suivant, son poids passe à 76 kg, avant de chuter à 72 kg en septembre. En moins de deux mois, Joseph Gerber a donc perdu huit kilogrammes[1]. On note enfin qu’au début de l’année 1944, Gerber contracte une pneumonie, ce qui nécessite à nouveau une hospitalisation au Revier pendant près de trois semaines suivies d’un mois complet en convalescence[1].
Du KL-Dachau à la fin de la guerre
Au regard de la situation militaire et de l’avancée des Alliés à l’Ouest, le haut-commandement de la SS prend la décision, le 1er septembre 1944, d’évacuer le KL-Natzweiler « le plus rapidement possible »[1]. Les détenus du camp principal sont dirigés vers le KL-Dachau, en Bavière, et Gerber fait partie du premier convoi (2.400 hommes) qui part du KL-Natzweiler dans la nuit du 2 au 3 septembre 1944. Arrivés sur place le 4 septembre, les détenus sont immatriculés le lendemain[1]. Gerber y reçoit le matricule 98715 et le triangle rouge des détenus politiques[1].
Selon toute vraisemblance, Gerber aurait été détaché dans l’un des camps-annexes du KL-Dachau alors nouvellement créé à Trostberg en novembre 1944[1]. Les détenus y travaillaient pour la firme BMW à la construction de moteurs d’avions. Le 20 novembre 1944, Gerber y est nommé doyen de Block (Blockältester)[1]. Par la suite, il est affecté à Allach, où les détenus participent à différents projets pour l’industrie de guerre, notamment pour la firme BMW ou pour l’Organisation Todt. Situé à quelques kilomètres de Dachau, ce kommando est créé le 17 mai 1944 et compte jusqu’à 3.850 déportés. On remarque également que le 11 avril 1945, Gerber a pu, sans doute parce qu’il était détenu-fonctionnaire, a pu récupérer son alliance en or déposée à l’Effektenkammer[1].
Joseph Gerber connaît la libération le 30 avril 1945, lorsque les troupes américaines libèrent le camp annexe d’Allach[1]. Après-guerre, il retourne à Strasbourg, mais décède cinq mois plus tard, le 27 septembre 1945, probablement des suites de sa déportation[1].
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