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Harry Hoffmann

De Commission Historique


Harry Hoffmann
Prénom Harry
Nom Hoffmann
Sexe masculin
Naissance 19 juin 1900 (Hambourg)


Originaire de Hambourg, Harry Hoffmann (1900-?) est un détenu allemand catégorisés par les SS comme détenu de « droit commun ». Après avoir été déporté au KL-Sachsenhausen en mars 1940 (matricule 20550), il est envoyé au KL-Natzweiler (matricule 50) avec le tout premier convoi arrivé le 21 mai 1941. Restant au camp principal pendant plus de deux ans et devenant manifestement « détenu fonctionnaire », il transite ensuite par différents camps annexes de Natzweiler jusqu’en février 1945, date à laquelle il rejoint le KL-Sachsenhausen.

Durant sa déportation au KL-Natzweiler, Harry Hoffmann est soigné et hospitalisé à plusieurs reprises à l’infirmerie du camp (Revier). Mais il bénéficie également d’un traitement de faveur tout à fait rare dans les camps, puisqu’il est admis en ambulatoire à la clinique ophtalmologique universitaire de la Reichsuniversität Straßburg, à quelque cinquante kilomètres de distance. Souffrant d’une iritis récidivante, il avait été présenté par le médecin SS à des spécialistes pour obtenir un « conseil thérapeutique ». Hoffmann est l’un des dix-huit détenus du KL-Natzweiler transférés dans les cliniques de la Reichsuniversität Straßburg, illustrant ainsi les relations inhabituelles entretenues par le camp et le monde extérieur.

Biographie

Origines et famille

Harry Hoffmann est né le 19 juin 1900 dans la ville hanséatique de Hambourg[1]. Les sources consultées jusqu’à présent ne nous permettent pas de préciser les origines et de détailler l’enfance ou la formation scolaire et professionnelle de Hoffmann. On apprend uniquement, grâce à une fiche de contrôle des correspondances épistolaires au KL-Natzweiler, qu’il était marié avec une certaine Lissy, installée – au moins vers 1941 – au 26 Erichstraße, dans le quartier Sankt Pauli situé à l’ouest du centre-ville de Hambourg[2].


Du KL-Sachsenhausen au KL-Natzweiler

Jusqu’à présent, on ignore si les persécutions du régime national-socialiste ont touché Harry Hoffmann dès les années 1930. En revanche, d’après sa fiche d’infirmerie de Sachsenhausen et de Natzweiler, on sait qu’il arrive au KL-Sachsenhausen le 1er mars 1940. Catégorisé comme détenu de droit commun, il porte alors le triangle vert et reçoit le matricule 20550. À son arrivée à Sachsenhausen, il pèse 65 kg pour 1,66 m[3]. Selon les listes quotidiennes d’admissions et de sorties du l’infirmerie des détenus (Revier) de Sachsenhausen, on apprend qu’il est soigné au Revier entre le 6 avril 1941[4] et le 21 avril 1941[5]. Le médecin « soupçonnait » alors une grippe (Verd[acht] Grippe)[3]. Toutefois, les sources ne nous permettent pas de préciser plus en détail ses affectations et ses fonctions durant sa déportation à Sachsenhausen.

Plus d’un an après son arrivée dans le système concentrationnaire national-socialiste, Harry Hoffmann est sélectionné pour faire partie du premier convoi de détenus spécialement détachés de Sachsenhausen pour construire le KL-Natzweiler, un nouveau camp de concentration installé en Alsace annexée de fait par le IIIe Reich. Arrivant sur place le 21 mai 1941, il est catégorisé comme détenu de droit commun sous le sigle « BV » (Berufsverbrecher) et reçoit le matricule 50[6]. En réalité, les 21 et 23 mai 1941, trois semaines après l’ouverture officielle du KL-Natzweiler, les 300 premiers détenus arrivent à Natzweiler en provenance du KL-Sachsenhausen, ayant vraisemblablement été sélectionnés par Josef Kramer, le Schutzhaftlagerführer de ce nouveau camp alors placé sous la direction du Lagerkommandant Hans Hüttig. Ces détenus sont les bâtisseurs et leur tâche première est alors de construire le camp[7]. Si les détenus de droit commun (y compris ceux internés en vertu du §175 ou du §176 du Code pénal allemand – criminalisant respectivement l’homosexualité et les attentats à la pudeur sur des mineurs de moins de 14 ans) représentent plus de la moitié (161, soit 53,8%) de l’effectif des deux premiers convois réunis, les détenus classés « asociaux » (12%), ainsi que des détenus politiques (25%) et des déserteurs de la Wehrmacht (9,3%) complètent les rangs[8].


Les traitements au Revier du KL-Natzweiler

Les conditions de travail sont dures et les travaux de construction éreintants. D’ailleurs, si l’on accorde quelque crédit aux sources nazies, on s’aperçoit que l’état général d’Harry Hoffmann semble se dégrader, si bien que son poids chute à 61 kg entre juillet et septembre 1941[3]. D’ailleurs, il y a certainement une corrélation avec ses nombreuses et longues hospitalisations à l’infirmerie des détenus (Revier) qui semble témoigner d’une difficulté à recouvrer la santé. Ainsi, le 2 novembre 1941, il est admis au Revier pour une grippe et reste hospitalisé jusqu’au 25 novembre 1941. Par la suite, on remarque une hospitalisation du 8 au 20 mars 1942 pour des problèmes gastriques, probablement une réapparition de symptômes anciens, puisqu’en 1920, il souffrait déjà d’ulcères gastriques et intestinaux. De même, le 29 juin 1942, il est admis au Revier avec une lymphangite au niveau de la main gauche, c’est-à-dire une pathologie infectieuse d’origine bactérienne, qui nécessite des soins jusqu’au 18 juillet. Du 20 novembre au 3 décembre 1942, il y est à nouveau soigné pour une grippe. Enfin, les documents à notre disposition indiquent que du 23 au 27 mars 1943, Hoffmann a été admis au Revier pour une laryngite, accompagnée d’une iritis rhumatismale[3].


Traitement à la clinique ophtalmologique de la Reichsuniversität Straßburg

Durant sa déportation au KL-Natzweiler, Harry Hoffmann bénéficie également d’un traitement de faveur tout à fait rare dans le système concentrationnaire nazi et qui témoigne des relations inhabituelles entretenues entre le camp et le monde extérieur. En effet, le 5 novembre 1943, le médecin-chef SS du camp, le Dr Richard Krieger, sollicite auprès du commandant du camp, Josef Kramer, l’autorisation d’envoyer trois détenus à la clinique ophtalmologique de la Reichsuniversität Straßburg pour un traitement en ambulatoire. Il s’agit des détenus allemands Karl Wetzer, Max Mahler et Harry Hoffmann. Au sujet de ce dernier, le Dr Krieger écrit qu’« il s’agit […] d’une iritis récidivante qui, malgré un traitement de longue durée à l’infirmerie des détenus, n’aboutit pas à la guérison »[9]. Recevant l’accord du commandant Kramer, le Dr Krieger prépare le jour même l’ordonnance d’hospitalisation, avertissant ses confrères de la clinique de la venue, « ce jour », des trois détenus en question[10]. Pour Hoffmann il apporte la précision suivante :

« Chez le détenu Hoffmann, il s’agit d’une iritis récidivante qui est particulièrement gênante en raison de l’opacification cornéenne qu’elle génère. Nous vous prions de nous apporter une suggestion thérapeutique »[10].

Un rapport trimestriel sur la situation sanitaire au KL-Natzweiler, signé par le Dr Krieger, apporte également la confirmation indirecte que Hoffmann ait bénéficié de soins à l’extérieur du système concentrationnaire, dans la mesure où six « cas » ont été relevés entre la mi-septembre et la mi-décembre 1943 (trois pour l’ajustement d’une prothèse oculaire et trois pour un avis médical spécialisé)[11]. Ici, le médecin SS du camp n’était donc pas suffisamment compétent dans le domaine de l’ophtalmologie et avait ainsi demandé l’avis de spécialistes pour soigner son détenu-patient.

Enfin, il convient de préciser que ce traitement de faveur, même s’il était laissé à l’appréciation du médecin SS du camp et du commandant du camp, peut aussi être expliqué par le fait qu’Harry Hoffmann ait été un « détenu-fonctionnaire ». On en trouve un indice indirect, puisque son nom Hoffmann figure sur une liste, dressée en mai 1944, contenant les noms des détenus qui ont l’« autorisation d’avoir des cheveux longs » de la part du commandant. Cela laisse subodorer qu’il occupait une fonction particulière au sein de la structure de délégation de pouvoirs au sein du camp et ce, depuis le 16 octobre 1943, c’est-à-dire quelques jours à peine avant d’être admis à la clinique ophtalmologique de la Reichsuniversität Strassburg[12].


Dans les camps annexes de Natzweiler

Après avoir été détenu au camp principal, Harry Hoffmann est envoyé dans plusieurs camps annexes du KL-Natzweiler qui avaient été installés des deux côtés du Rhin. D’après les recherches de l’historien Robert Steegmann, on retrouve sa trace dans les camps de Wesserling, de Sennheim (Cernay), d’Audun-le-Tiche (mi-1944), puis de Heilbronn (soit Neckarelz, soit Kochendorf) et enfin Neckargerach à la fin de l’année 1944. Enfin, au cours du mois de février 1945, il semble que Hoffmann ait été transféré vers le KL-Sachsenhausen, mais rien ne nous permet, aujourd’hui, de préciser s’il a survécu à la déportation[13].


Repères

Localisations

Nationalités

Confessions

Publications

1900-06-19T00:00:00Z
Vie privée
Naissance
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Références

À propos de cette page

Rédaction : ©Loïc Lutz



  1. Voir par exemple ITS Digital Archive, Arolsen Archives, 1.1.29.2/01012902, Fiche d’infirmerie, doc. 3178050..
  2. ITS Digital Archive, Arolsen Archives, 1.1.29.2/01012902, Fiche de contrôle des correspondances, doc. 3178051. Au sujet des fiches et du contrôle des correspondances des détenus dans les camps, voir Nicolas BERTRAND, L’enfer réglementé. Le régime de détention dans les camps de concentration, Paris, Perrin, 2015, 397 p., ici p. 65..
  3. 3,0 3,1 3,2 et 3,3 ITS Digital Archive, Arolsen Archives, 1.1.29.2/01012902, Fiche d’infirmerie, doc. 3178050..
  4. ITS Digital Archive, Arolsen Archives, 1.1.38.1/4530001, Veränderungen im Krankenbau, 7 avril 1941, doc. 4089350..
  5. ITS Digital Archive, Arolsen Archives, 1.1.38.1/4530001, Veränderungen im Krankenbau, 22 avril 1941, doc. 4089369..
  6. ITS Digital Archive, Arolsen Archives, 1.1.29.1/8123400, Nummernbuch I, doc. 3128830..
  7. Robert STEEGMANN, Struthof. Le KL-Natzweiler et ses kommandos : une nébuleuse concentrationnaire des deux côtés du Rhin, 1941-1945, Strasbourg : La Nuée Bleue, 2005, p. 44-45..
  8. Ibid., p. 45. De plus, si les Allemands représentent la majorité de l’effectif, on compte également sept Polonais et de deux Tchèques..
  9. ITS Digital Archive, Arolsen Archives, 1.1.29.1/01012901, Courrier du Dr Krieger au commandant du KL-Natzweiler au sujet de l’hospitalisation de trois détenus, 5 novembre 1943, doc. 3132619..
  10. 10,0 et 10,1 ITS Digital Archive, Arolsen Archives, 1.1.29.1/01012901, Courrier du Dr Krieger aux médecins de la clinique ophtalmologique de la Reichsuniversität Straßburg, 5 novembre 1943, doc. 3132620..
  11. DCAJM, Procédure « Struthof Camp », Annexe G, Vierteljahresbericht über den San-Dienst im KL-Natzweiler, 16 décembre 1943..
  12. DCAJMB Dossier 8, Liste von Häftlingen, die die Erlaubnis zum Tragen von langen Haaren haben, 9 mai 1944..
  13. On renvoie ici à la borne interactive numérique (« Borne des noms »), accessible au Centre européen du résistant déporté, sur le site de l’ancien camp de concentration de Natzweiler-Struthof, qui permet de visualiser les parcours des 50.000 déportés du KL-Natzweiler grâce aux travaux de l’historien Robert Steegmann..