Différences entre les versions de « August Bostroem »
De Commission Historique
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|Resume_fr=August Bostroem (1886-1944) était titulaire d’une chaire de neuropsychiatrie à la ''Reichsuniversität Straßburg'' et psychiatre consultant pour la Wehrmacht. | |Resume_fr=August Bostroem (1886-1944) était titulaire d’une chaire de neuropsychiatrie à la ''Reichsuniversität Straßburg'' et psychiatre consultant pour la Wehrmacht. | ||
Sa nomination fut appuyée par nul autre que Max de Crinis (1889-1945), un psychiatre national-socialiste de premier plan. | Sa nomination fut appuyée par nul autre que Max de Crinis (1889-1945), un psychiatre national-socialiste de premier plan.<ref name="29254aed210810016513c81acc4453e0291e2225">BArch R/9361/VI, 247</ref> À première vue, cela semble indiquer que Bostroem correspondait parfaitement à ce que la « dictature biopolitique de l’évolution » (''biopolitische Entwicklungsdiktatur'' – Hans Walter Schmuhl) attendait d’un professeur titulaire d’une chaire (''Ordinariat'') résolument national-socialiste. De plus, il est indéniable qu’il jouissait de la reconnaissance professionnelle de ses pairs. Dans une nécrologie, le neurologue hambourgeois Max Nonne (1861-1959) le décrit comme l’un des « combattants de première ligne pour notre science »<ref name="GNRI56CT, S 2">Nonne, Max. August Bostroem. Deutsche Zeitschrift für Nervenheilkunde 157 (1944) : 1-21. , S 2.</ref> et son professeur Oswald Bumke (1870-1950) le dépeint dans ses mémoires comme un « clinicien exceptionnel, un chercheur couronné de succès, un médecin remarquable et l’un des hommes les plus brillants »<ref name="0af5b35a7322e6468f6e535d3dcd7558482bbbe1">Bumke, Oswald: Oswald Bumke Erinnerungen und Betrachtungen. Der Weg eines deutschen Psychiaters. München, Richard Pflaume, S. 91</ref> qu’il ait jamais rencontrés. Toutefois, comment se positionnait Bostroem par rapport à la stérilisation forcée, à « l’euthanasie » et aux principes diagnostiques et thérapeutiques de sa profession ? De quelle marge de manœuvre disposait-il dans la conception du futur institut universitaire de neuropsychiatrie et quelle influence y a-t-il exercé sur la pratique clinique quotidienne ? | ||
==Parcours et formation== | |||
August Bostroem naît le 3 février 1886 à Giessen. Son père est professeur d’anatomie pathologique et sa mère est la fille d’un professeur titulaire d’une chaire de gynécologie à Fribourg. Bostroem étudie la médecine d’abord à Fribourg puis à Giessen où il soutient une thèse intitulée ''Benennung optischer Eindrücke'' (La dénomination d’impressions optiques) qu’il consacre au « temps de réaction à différentes impressions optiques chez le bien portant et chez le malade mental » dans le but de développer une méthode diagnostique. Selon Nonne, déjà à cette époque, Bostroem met en œuvre une méthode de travail personnelle caractérisée par « une grande minutie, une extrême propreté, une attention scrupuleuse portée aux sources d’erreurs possibles [et] une comparaison approfondie avec les bien portants ». Il effectue son stage pratique d’un an notamment auprès d’Emil Kraepelin (1856-1926) à la clinique psychiatrique de Munich avant de s’engager comme médecin de bord dans la compagnie maritime ''Hamburg-Amerika-Linie''. Après un séjour de huit mois à la clinique de Nonne à Hambourg-Eppendorf, il exerce pendant la Première Guerre mondiale comme médecin militaire et se retrouve confronté durant trois années à une pathologie jusque-là inconnue : la « névrose de guerre », dont il observe les signes cliniques. C’est dans ce contexte qu’il publie en 1917 son premier article : ''Neurologische und psychiatrische Fronterfahrung eines Truppenarztes'' (Observations neurologiques et psychiatriques d’un médecin militaire au front). À son retour, et comme il est d’usage à la clinique de Hambourg, Bostroem étudie la manière dont ces signes cliniques se traduisent d’un point de vue anatomo-pathologique. En outre, il a affaire dans cette période à un grand nombre de patients atteints de neurosyphilis. Ces entrevues seront également déterminantes pour son travail de recherche. Après avoir exercé pendant trois ans et demi à Hambourg, il travaille à Rostock auprès de Karl Kleist (1879-1960) puis à Wrocław auprès d’Oswald Bumke. Devenu ''Oberarzt'' (chef de clinique), Bostroem suit Oswald Bumke à Leipzig en 1921.<ref name="ef5f7deac0a4128ddf147a93d86cbc8fb89ab139">Nonne, Max: Nachruf August Bostroem. Deutsche Zeitschrift für Nervenheilkunde. Bd. 157, Heft 1/2, S. 3-5</ref> Bumke et Bostroem s’entendent bien, tant sur le plan professionnel que personnel. Ils resteront amis, même après avoir emprunté des voies professionnelles différentes. Bien que Bumke soit considéré comme un représentant de la somato-psychiatrie, il intègre une approche psychologique à sa réflexion. Durant ses années à Leipzig, il se prononce tout particulièrement en faveur d’une prise en charge plus humaine des patients et rejette l’utilisation de la contrainte, sauf en dernier recours. | |||
Bumke adopte une position plutôt critique, voire hostile par rapport au débat sur l’hérédité des maladies psychiatriques et la théorie de la dégénérescence. En effet, s’il n’écarte pas la possibilité que certaines maladies psychiatriques puissent être en partie héréditaires, il considère que la théorie d’une dégénérescence inéluctable de peuples entiers est totalement infondée. Il doute de l’efficacité de mesures eugéniques, quand bien même cette dégénérescence viendrait à être prouvée un jour. La question de savoir si Bostroem partage au moins en partie ou à un moment donné les divers points de vue de son professeur reste ouverte.<ref name="JRA89NXV, S 246-247">Angermeyer, Matthias C.;Steinberg, Holger. 200 Jahre Psychiatrie an der Universität Leipzig. Personen und Konzepte. Heidelberg : Springer, 2005. , S 246-247.</ref> En 1922, Bostroem soutient à Leipzig une thèse d’habilitation intitulée ''Der amyostatische Symptomenkomplex. Klinische Untersuchungen unter Berücksichtigung allgemeiner pathologischer Fragen'' (Le complexe symptomatique amyostatique. Études cliniques tenant compte de questions de pathologie générale). Ensuite, il suit Bumke à Munich.<ref name="JRA89NXV, S 263">Angermeyer, Matthias C.;Steinberg, Holger. 200 Jahre Psychiatrie an der Universität Leipzig. Personen und Konzepte. Heidelberg : Springer, 2005. , S 263.</ref> Durant cette période, il se consacre particulièrement à l’étude de pathologies situées à la frontière entre la psychiatrie et la neurologie, comme par exemple les maladies du système moteur extrapyramidal, ainsi qu’à l’étude des syndromes neurologiques et psychiatriques dans la neurosyphilis et l’encéphalite. Ses travaux trouvent leur point culminant dans la revue ''Fortschritte der Neurologie, Psychiatrie und ihrer Grenzgebiete'' (Progrès en neurologie, psychiatrie et leurs domaines annexes) que Bostroem fonde en 1929 et édite à partir de cette date avec le psychiatre et biologiste criminel Johannes Lange (1891-1938). Il succède à Ernst Meyer (1871-1931) à la chaire de Königsberg avant de devenir ''Ordinarius'' (professeur titulaire) à Leipzig en 1938.<ref name="TCDPQXS2, S 121">Hippius, Hanns;Neundörfer-Kohl, Gabriele;Möller, Hans-Jürgen;Müller, Norbert. The University Department of Psychiatry in Munich. From Kraepelin and his predecessors to molecular psychiatry. Heidelberg : Springer, 2008. , S 121.</ref> Bostroem est favorable aux nouvelles thérapies somatiques. Alors qu’il travaille à la clinique de Leipzig, il introduit l’insulinothérapie et l’électroconvulsivothérapie.<ref name="JRA89NXV, 253">Angermeyer, Matthias C.;Steinberg, Holger. 200 Jahre Psychiatrie an der Universität Leipzig. Personen und Konzepte. Heidelberg : Springer, 2005. , 253.</ref> | |||
==La situation à Strasbourg== | |||
Qu’est-ce qui pousse Bostroem à accepter sa nomination à Strasbourg ? Si l’on en croit l’une des nécrologies écrites à son sujet, il y a « la possibilité de s’ouvrir à de nouvelles opportunités » et « l’attachement à cette région du sud de l’Allemagne».<ref name="fbe709260e5d4e9dbfba8ee14ca2412f9732447d">Wagner, W.: August Bostroem. Fortschritte der Neurologie, Psychiatrie und ihrer Grenzgebiete, 16. Jahrgang, 1944. S 34-35</ref> En qualité de ''Referent für medizinische Fachfragen (consultant pour les questions médicales) au Reichsministerium für Wissenschaft, Erziehung und Volksbildung'' (ministère de la Science, de l’éducation et de la formation populaire du Reich), c’est Max de Crinis qui est responsable des nominations. Bostroem se rend à Strasbourg pour se faire une idée de la situation de la future Reichsuniversität. Il n’est prêt à accepter sa nomination qu’à condition qu’on « accède à ses demandes ». On ne sait pas exactement en quoi ces demandes consistent. Bostroem correspond tout à fait aux attentes de Max de Crinis. Après la visite de Bostroem, de Crinis écrit à Johannes Stein (1896-1967), doyen de la faculté de médecine : « Malgré mon insistance, je n’ai rien pu obtenir de plus. » Le doyen a cependant l’impression que Bostroem « serait ravi » de venir.<ref name="29254aed210810016513c81acc4453e0291e2225">BArch R/9361/VI, 247</ref> Bostroem envoie d’abord son collègue Nikolaus Jensch (1913-1964) le suppléer à Strasbourg. Au semestre d’hiver 1942/43, Bostroem devient ''ordentlicher Professor'' (professeur titulaire) en psychiatrie et en neurologie.<ref name="8FR37NI7, S 37">Reichsuniversität Straßburg. Personal- und Vorlesungs-Verzeichnis. Winter-Semester 1941/42. Straßburg : Heitz, 1941. , S 37.</ref> Il donne toutes les semaines les cours magistraux de ''Psychiatrische und Nervenklinik (einschl. Wehrpsychologie)'' (Clinique psychiatrique et neurologique [englobant la psychologie militaire]) et ''Forensische Psychiatrie mit Krankenvorstellungen'' (Psychiatrie médico-légale avec présentation de malades). Le cours pratique correspondant (''Untersuchungskurs'') est assuré par Jensch.<ref name="8FR37NI7, S 63">Reichsuniversität Straßburg. Personal- und Vorlesungs-Verzeichnis. Winter-Semester 1941/42. Straßburg : Heitz, 1941. , S 63.</ref> En plus de ce dernier, Bostroem fait venir beaucoup de personnel de Leipzig à Strasbourg.<ref name="JRA89NXV, S 263">Angermeyer, Matthias C.;Steinberg, Holger. 200 Jahre Psychiatrie an der Universität Leipzig. Personen und Konzepte. Heidelberg : Springer, 2005. , S 263.</ref> | |||
« Le médecin traitant, qui se sent le devoir de contribuer au bien-être de ses patients, est naturellement réticent à amorcer par son signalement une procédure qui déplaise aux intéressés. […] Je crois cependant que l’obéissance aux lois ne doit en aucune façon paraître contraire à l’éthique médicale. Les malades et leurs proches ont besoin, en particulier dans le cadre de ces mesures radicales pour eux, que le médecin fasse preuve de réconfort et d’humanité. […] Il est de notre devoir à nous, médecins, de faire en sorte que les personnes directement concernées par cette loi la comprennent. Il faut beaucoup de patience et de temps mais je crois que ces efforts en valent la peine. | Dans quelles conditions Bostroem arrive-t-il à Strasbourg ? La clinique neurologique dépend de la clinique psychiatrique. Cette dernière se compose de six services dans lesquels 77 des 142 lits disponibles sont réservés aux hommes et 65 aux femmes. Il y a 40 lits pour « malades agités ». Tous les services sont fermés et surveillés par des gardiens de nuit. En 1942, 30 lits sont mis à disposition du département psychiatrique de l’hôpital militaire de Strasbourg. La clinique neurologique comporte quatre services avec 62 lits. Elle peut en plus accueillir séparément 32 patients privés. ll y a en outre une policlinique commune pour les patients en psychiatrie et en neurologie. En 1942, un service de radiologie, une salle d’opération pour les interventions diagnostiques ainsi qu’un « département des sciences de l’hérédité » (Erbwissenschaftliche Abteilung) sont en projet.<ref name="8FR37NI7, S 121-122">Reichsuniversität Straßburg. Personal- und Vorlesungs-Verzeichnis. Winter-Semester 1941/42. Straßburg : Heitz, 1941. , S 121-122.</ref> | ||
==Attitude envers l’eugénisme et l’ « euthanasie »== | |||
L’attitude de Bostroem envers l’idéologie national-socialiste et son rôle en matière de stérilisation forcée et d’assassinat de malades nécessite également une étude approfondie. Depuis 1937, Bostroem est membre du NSDAP et fait partie du ''NS-Lehrerbund''<ref name="WKA9ZEMB, S 67">Klee, Ernst. Das Personenlexikon zum Dritten Reich. Wer war was vor und nach 1945. Frankfurt am Main : Fischer, 2005. , S 67.</ref> , la ligue national-socialiste des enseignants. L’échange épistolaire intense qu’il entretient avec Bumke, son ancien professeur, a notamment pour objet les événements politiques et leurs conséquences sur le quotidien de la clinique psychiatrique, ainsi que la loi pour la prévention d'une descendance malade héréditaire (''Gesetz zur Verhütung erbkranken Nachwuchses'') de 1933.<ref name="TCDPQXS2, S 120">Hippius, Hanns;Neundörfer-Kohl, Gabriele;Möller, Hans-Jürgen;Müller, Norbert. The University Department of Psychiatry in Munich. From Kraepelin and his predecessors to molecular psychiatry. Heidelberg : Springer, 2008. , S 120.</ref> L’examen de ces lettres permettrait peut-être de se faire une idée plus claire du point de vue de Bostroem. Dans son article ''Erbbiologie und Psychiatrie'' (Génétique et psychiatrie) de 1934, il décrit dans le détail et pour différents tableaux cliniques la complexité des liens entre l’hérédité, les influences environnementales et la probabilité de développer une pathologie, mais toujours sur un arrière-fond d’eugénisme et en sous-entendant l’existence d’ « individus indésirables d’un point de vue eugénique » (''eugenisch unerwünschte Persönlichkeiten'').<ref name="AWCTEEFD, S 1667">Bostroem, August. Erbbiologie und Psychiatrie. Klinische Wochenschrift 13 (1934) : 1665-1670. , S 1667.</ref> Pour finir, Bostroem indique également, qu’une « connaissance approfondie de l’hérédité » ne doit pas pour autant conduire à « abandonner tout espoir de traitement ».<ref name="AWCTEEFD, S 1669">Bostroem, August. Erbbiologie und Psychiatrie. Klinische Wochenschrift 13 (1934) : 1665-1670. , S 1669.</ref> Bostroem s’exprime plus concrètement en 1934 lors d’une session de formation continue pour médecins où il donne un exposé intitulé « Approche psychiatrique de la loi pour la prévention d'une descendance malade héréditaire » (''Das Gesetz zur Verhütung erbkranken Nachwuchses vom Standpunkt der Psychiatrie'') : | |||
<blockquote>« Le médecin traitant, qui se sent le devoir de contribuer au bien-être de ses patients, est naturellement réticent à amorcer par son signalement une procédure qui déplaise aux intéressés. […] Je crois cependant que l’obéissance aux lois ne doit en aucune façon paraître contraire à l’éthique médicale. Les malades et leurs proches ont besoin, en particulier dans le cadre de ces mesures radicales pour eux, que le médecin fasse preuve de réconfort et d’humanité. […] Il est de notre devoir à nous, médecins, de faire en sorte que les personnes directement concernées par cette loi la comprennent. Il faut beaucoup de patience et de temps mais je crois que ces efforts en valent la peine. »<ref name="GNRI56CT, S 15-16">Nonne, Max. August Bostroem. Deutsche Zeitschrift für Nervenheilkunde 157 (1944) : 1-21. , S 15-16.</ref> </blockquote> | |||
Il explique également le contenu, la forme et l’objectif de la loi et place ainsi la psychiatrie au service des dirigeants nationaux-socialistes. Certains cas de stérilisation forcée à Strasbourg ont déjà été mis en évidence mais dans ce domaine, des recherches plus poussées sont nécessaires. | Il explique également le contenu, la forme et l’objectif de la loi et place ainsi la psychiatrie au service des dirigeants nationaux-socialistes. Certains cas de stérilisation forcée à Strasbourg ont déjà été mis en évidence mais dans ce domaine, des recherches plus poussées sont nécessaires. | ||
L’attitude de Bostroem par rapport à l’ « euthanasie » est bien plus difficile à évaluer. Sur cette question, la principale source d’informations est sa correspondance avec son confrère, le docteur Karsten Jaspersen (1896-1968), chef des services de neurologie et de psychiatrie de l’hôpital diaconal de Bethel en Westphalie (''Psychiatrische und Nervenabteilung des Westfälischen Diakonissenanstalt in Bethel''), et l’un des rares psychiatres à s’opposer farouchement à l’assassinat de malades. Jaspersen informe les institutions les plus diverses de ces assassinats et essaye d’intervenir auprès des plus hautes sphères. Il rédige de nombreux courriers pour solliciter le soutien des plus éminents professeurs titulaires et organiser une large opposition à l’''Aktion T4''. Le 18 juillet 1940, Bostroem reçoit une lettre de Jaspersen, son « élève reconnaissant et assistant de longue date » – ils se sont connus alors que Bostroem était ''Oberarzt'' (chef de clinique) à Munich – qui lui fait part des assassinats et du rôle funeste des questionnaires distribués à tous les asiles du Reich. Bostroem lui répond rapidement qu’il « a déjà entendu parler de l’affaire » et lui conseille de refuser de remplir les questionnaires. | L’attitude de Bostroem par rapport à l’ « euthanasie » est bien plus difficile à évaluer. Sur cette question, la principale source d’informations est sa correspondance avec son confrère, le docteur Karsten Jaspersen (1896-1968), chef des services de neurologie et de psychiatrie de l’hôpital diaconal de Bethel en Westphalie (''Psychiatrische und Nervenabteilung des Westfälischen Diakonissenanstalt in Bethel''), et l’un des rares psychiatres à s’opposer farouchement à l’assassinat de malades. Jaspersen informe les institutions les plus diverses de ces assassinats et essaye d’intervenir auprès des plus hautes sphères. Il rédige de nombreux courriers pour solliciter le soutien des plus éminents professeurs titulaires et organiser une large opposition à l’''Aktion T4''. Le 18 juillet 1940, Bostroem reçoit une lettre de Jaspersen, son « élève reconnaissant et assistant de longue date » – ils se sont connus alors que Bostroem était ''Oberarzt'' (chef de clinique) à Munich – qui lui fait part des assassinats et du rôle funeste des questionnaires distribués à tous les asiles du Reich. Bostroem lui répond rapidement qu’il « a déjà entendu parler de l’affaire » et lui conseille de refuser de remplir les questionnaires.<ref name="AD8U8KKP, S 107">Peters, Uwe Henrik. Karsten Jaspersen. 1940 ... der einzige deutsche Psychiater, der alles riskierte, um den Krankenmord zu verhindern. Köln : ANA Publishers, 2013. , S 107.</ref> À cette époque, il est ''Ordinarius'' (professeur titulaire) à Leipzig. On ignore si Bostroem a sciemment ordonné ou empêché le transfert de patients dans des cliniques psychiatriques ayant servi de centres de mise à mort. Dans l’état actuel des recherches, on estime que la clinique de l’université de Leipzig n’était pas directement impliquée dans ces assassinats car elle s’occupait principalement de l’accueil primaire des patients en psychiatrie et non de leur prise en charge à long terme.<ref name="JRA89NXV, S 252">Angermeyer, Matthias C.;Steinberg, Holger. 200 Jahre Psychiatrie an der Universität Leipzig. Personen und Konzepte. Heidelberg : Springer, 2005. , S 252.</ref> | ||
Sous l’impulsion de Jaspersen, Bostroem passe lui-même à l’action. Il écrit à Bumke et cherche à obtenir une entrevue. Au moment où celle-ci a lieu, Bumke, qui a reçu une lettre similaire de Jaspersen, a déjà essayé d’intervenir auprès d’Ernst Rüdin (1874-1952), sans succès. Ce n’est pas la seule action de Bostroem. Il écrit à Jaspersen : « J’ai essayé tout autre chose, en vain » bien qu’on ne sache pas à quoi il fait référence ici. En outre, Bostroem remarque que l’annulation de l’assemblée annuelle du ''Fachverband der Deustchen Psychiater'' (association des psychiatres allemands) en 1940 n’est certainement pas due au hasard et qu’on a ainsi délibérément cherché à éviter tout échange sur ces événements. | Sous l’impulsion de Jaspersen, Bostroem passe lui-même à l’action. Il écrit à Bumke et cherche à obtenir une entrevue. Au moment où celle-ci a lieu, Bumke, qui a reçu une lettre similaire de Jaspersen, a déjà essayé d’intervenir auprès d’Ernst Rüdin (1874-1952), sans succès. Ce n’est pas la seule action de Bostroem. Il écrit à Jaspersen : « J’ai essayé tout autre chose, en vain » bien qu’on ne sache pas à quoi il fait référence ici. En outre, Bostroem remarque que l’annulation de l’assemblée annuelle du ''Fachverband der Deustchen Psychiater'' (association des psychiatres allemands) en 1940 n’est certainement pas due au hasard et qu’on a ainsi délibérément cherché à éviter tout échange sur ces événements.<ref name="AD8U8KKP, S 109">Peters, Uwe Henrik. Karsten Jaspersen. 1940 ... der einzige deutsche Psychiater, der alles riskierte, um den Krankenmord zu verhindern. Köln : ANA Publishers, 2013. , S 109.</ref> Bostroem mentionne qu’il souhaite à l’occasion justifier son point de vue auprès des principaux responsables de l’''Aktion T4''. Plus loin dans sa lettre à Jaspersen, il écrit : | ||
« Il ne faut pas adopter une attitude hostile d’emblée car l’euthanasie chez les malades incurables ou ceux qui souffrent atrocement est un sujet dont on peut débattre. Mais on ne peut pas prendre de décision à la simple lecture d’un questionnaire. Il s’agit après tout d’une décision difficile à prendre. Du reste, les conséquences sur les proches, les malades mais aussi le personnel soignant sont imprévisibles. Par-dessus tout, il me semble que c’est l’essence de la médecine qui est ici en jeu. | <blockquote>« Il ne faut pas adopter une attitude hostile d’emblée car l’euthanasie chez les malades incurables ou ceux qui souffrent atrocement est un sujet dont on peut débattre. Mais on ne peut pas prendre de décision à la simple lecture d’un questionnaire. Il s’agit après tout d’une décision difficile à prendre. Du reste, les conséquences sur les proches, les malades mais aussi le personnel soignant sont imprévisibles. Par-dessus tout, il me semble que c’est l’essence de la médecine qui est ici en jeu. »<ref name="AD8U8KKP, S 145">Peters, Uwe Henrik. Karsten Jaspersen. 1940 ... der einzige deutsche Psychiater, der alles riskierte, um den Krankenmord zu verhindern. Köln : ANA Publishers, 2013. , S 145.</ref> </blockquote> | ||
Cette déclaration semble d’autant plus étrange que Bostroem a assuré Jaspersen de son soutien contre les assassinats de malades explicitement et à plusieurs reprises, et qu’il a lui-même agi en conséquence. À la suite de cela, Bostroem nomme des personnes qui pourraient encore être sollicitées. Il conclut sa lettre par la phrase suivante : « Je suis disponible à tout moment si je peux me rendre utile. | Cette déclaration semble d’autant plus étrange que Bostroem a assuré Jaspersen de son soutien contre les assassinats de malades explicitement et à plusieurs reprises, et qu’il a lui-même agi en conséquence. À la suite de cela, Bostroem nomme des personnes qui pourraient encore être sollicitées. Il conclut sa lettre par la phrase suivante : « Je suis disponible à tout moment si je peux me rendre utile. »<ref name="AD8U8KKP, S 146">Peters, Uwe Henrik. Karsten Jaspersen. 1940 ... der einzige deutsche Psychiater, der alles riskierte, um den Krankenmord zu verhindern. Köln : ANA Publishers, 2013. , S 146.</ref> Si l’on ne s’en tient qu’à la déclaration citée ci-dessus, on pourrait penser qu’il rejette seulement la manière dont les décisions sont prises (à partir de réponses données à des questionnaires), et pas l’ « euthanasie » en tant que telle. En prenant ses autres déclarations en considération, ce passage semble plutôt relever d’une stratégie argumentative contre les ardents défenseurs de l’ « euthanasie ». Retenons que cette prise de distance par rapport aux assassinats de malades, si on l’interprète de cette manière, reste cantonnée à la sphère privée. Cet échange épistolaire et la prise de contact avec des collègues partageant les mêmes opinions ne dépassent pas cette sphère et n’ont donc aucun impact sur la suite de la carrière de Bostroem et sur sa nomination à Strasbourg. Selon un médecin alsacien, le Dr Bernard, Bostroem est allé plus loin lors d’un cours dans lequel il aurait clairement pris position contre les assassinats. Il aurait dénoncé l’ « euthanasie » comme étant « inhumaine » et « indigne de notre civilisation ».<ref name="4f6a0fc114c5b04078f9f9edaa41caaa341e903b">Héran, Jaques: Histoire de la médecine à Strasbourg. La Nuée Bleue, Strasbourg, 1997, S 611</ref> Plus tard, le fils de Bostroem soulignera que son père n’a jamais ordonné le transfert de ses patients dans des centres de mise à mort comme celui d’Hadamar, ce que les dernières recherches ont confirmé. D’après ce que les chercheurs ont pu reconstituer grâce aux dossiers médiaux des patients et aux registres d’entrée, seuls des patients de l’asile psychiatrique de Stephansfeld y ont été transférés. | ||
==Électroconvulsivothérapie et recherches== | |||
Concernant l’importance de l’électroconvulsivothérapie dans le national-socialisme, les chercheurs actuels s’accordent pour dire que « la nouveauté que représentait la thérapie par électrochocs suscitait un grand intérêt scientifique en Allemagne, que les psychiatres, poussés par les conséquences de la guerre sur la santé mentale des soldats, s’efforçaient d’introduire cette nouvelle méthode en psychiatrie et qu’ils étaient soutenus par des fonctionnaires de haut rang du régime nazi. » | |||
Ils constatent de plus que cette nouvelle forme de thérapie somatique « est intégrée sans difficulté à la dialectique de guérison et d’extermination si caractéristique du national-socialisme. »<ref name="QJ4SQF57, S 10">Roelcke, Volker;Schmuhl, Hans-Walter. Heroische Therapien. Die deutsche Psychiatrie im internationalen Vergleich, 1918-1945. Göttingen : Wallstein, 2013. , S 10.</ref> Cependant, des études locales poussées mettent en évidence un recours à l’électroconvulsivothérapie très inégal selon les régions. Tandis que certaines cliniques l’intègrent très rapidement et à grande échelle dans leur pratique clinique, d’autres se montrent extrêmement réticentes : la clinique de Wiesloch dirigée par Herbert Linden doit selon lui devenir « un modèle pour la recherche en électroconvulsivothérapie » alors que Karl Bonhoeffer (1868-1948) est franchement sceptique quant à cette thérapie somatique qui reste par conséquent dans un premier temps très marginale à l’hôpital de la Charité à Berlin.<ref name="63YSP5Q5">Rzesnitzek, Lara;Lang, Sascha. Electroshock therapy in the Third Reich. Medical history 61 (2017) : 66-88.</ref> On en arrive inévitablement à la question de son utilisation à Strasbourg. Dans sa description de la clinique neuropsychiatrique, le président de la Reichsuniversität met bien en évidence l’électroconvulsivothérapie comme seule méthode de traitement à côté de l’insulinothérapie et du traitement au ''Cardiazol''.<ref name="3403567231374e191395a471738a8618530fd72b">Hochschulführer der Reichsuniversität Straßburg. Heitz&Co, Straßburg, 1942, S 121</ref> Les électrochocs sont utilisés à la clinique psychiatrique depuis juillet 1942.<ref name="2IHBBTPJ, S 2">Scharnke, Hans Georg. Ergebnisse der Elektrokrampfbehandlung bei Manisch Depressiven. Diss. med.. Straβburg, 1944. , S 2.</ref> Il reste dans ce contexte à interroger les liens entre les différents paradigmes de la psychiatrie national-socialiste. Quelle importance confère-t-on aux nouvelles thérapies somatiques qui donnent pour la première fois un espoir de guérison pour des maladies auparavant déclarées héréditaires telles que la schizophrénie? La stérilisation forcée était auparavant promue comme seul traitement efficace contre ces maladies. Ainsi, Ernst Rüdin, directeur du service de recherche psychiatrique de Munich et ''Reichsleiter'' (président) de la ''Gesellschaft Deutscher Neurologen und Psychiater'' (Société des neurologues et psychiatres allemands) souligne que les méthodes de thérapie somatique ne doivent « en aucun cas avoir d’effet rétroactif fâcheux sur la loi sur la stérilisation ».<ref name="QJ4SQF57, S 13">Roelcke, Volker;Schmuhl, Hans-Walter. Heroische Therapien. Die deutsche Psychiatrie im internationalen Vergleich, 1918-1945. Göttingen : Wallstein, 2013. , S 13.</ref> Peut-on décrire l’ « euthanasie » et les thérapies somatiques comme des « éléments complémentaires au sein de la psychiatrie moderne » ?<ref name="QJ4SQF57, S 16">Roelcke, Volker;Schmuhl, Hans-Walter. Heroische Therapien. Die deutsche Psychiatrie im internationalen Vergleich, 1918-1945. Göttingen : Wallstein, 2013. , S 16.</ref> Est-ce le cas à Strasbourg ? Sur cette question, les dossiers médicaux des patients pourraient permettre de procéder à une analyse quantitative et qualitative, d’avoir un aperçu concret des pratiques au sein de la clinique psychiatrique et par là de participer à une évaluation globale. Par ailleurs, Bostroem dirige plusieurs projets de thèse en lien avec l’électroconvulsivothérapie. D’après leurs titres, les sujets de recherche touchent aussi bien l’évaluation des résultats de cette thérapie que ses effets indésirables comme les troubles mnésiques. Il faut noter ici la grande attention portée au tableau clinique maniaco-dépressif. Les thèses ne traitent de l’utilisation de cette thérapie ni dans la schizophrénie ni dans d’autres psychoses.<ref name="06ba4c259bfee628e69188032eeb6e901878a78a">Scharnke, Hans Georg: Diss: Ergebnisse der Elektrokrampfbehandlung bei Manisch−Depressiven. Prüfung: 27.05.1944. Und Gross, Rudolf: Diss: Gedächtnisstörungen bei der Schockbehandlung des manisch−depressiven Formenkreises. Prüfung: 30.05.1944</ref> | |||
En plus de ces thérapies, Bostroem s’intéresse aux manifestations somatiques des pathologies psychiatriques. Des passerelles et des collaborations avec d’autres domaines tels que la neuroanatomie et la physiologie s’établissent. Bostroem soutient par exemple les travaux diagnostiques et les protocoles de test en physiologie expérimentale des docteurs Paul Link (*1892) et Frédéric Bernard (1912-2008) dans le service de neuropsychiatrie de la clinique.<ref name="UNWJEWCZ, S 252">Stahnisch, Frank. Die Neurowissenschaften in Straβburg zwischen 1872 und 1945. Sudhoffs Archiv 100 (2016) : 227-262. , S 252.</ref> | |||
==Psychiatrie militaire== | |||
Craignant que les névroses de guerre apparues pour la première fois pendant la Première Guerre mondiale n’affaiblissent la ''Wehrmacht'', le professeur Otto Wuth (1885-1946), directeur de la ''Militärärztliche Akademie'' (académie de médecine militaire) de Berlin ordonne la formation d’un service de psychiatrie militaire avant même que la Seconde Guerre mondiale n’éclate. Ce service comprend les domaines suivants : « Psychiatrie, psychologie médicale, hygiène psychique, soin des cérébrolésés, psychopathie et hygiène médico-légale. » En tant que ''Beratender Psychiater beim Heeres-Sanitätsinspektor'' (psychiatre consultant auprès de l’inspecteur sanitaire des armées), Wuth est la plus haute autorité en matière de psychiatrie dans ce domaine. Bostroem qui est psychiatre militaire pour la région militaire Wehrkreis V Straßburg, lui est subordonné.<ref name="db945b3ff1f8d48d8b16d50b7f507c0f839f510e">Ernst Klee: Das Personenlexikon zum Dritten Reich, Frankfurt am Main 2007, S 286</ref> Les rapports d’activité que Bostroem doit transmettre à Wuth tous les quinze jours, puis tous les mois à partir du 13 janvier 1941 offrent un aperçu des tâches réalisées. Ces rapports traitent les points suivants : | |||
<blockquote>« a. Ambiance et attitude des troupes, différences entre les classes en fonction de leur ancienneté ? b. Conséquences des anormalités psychopathiques et de la consommation d’alcool ? c. Accumulation de manifestations de névroses d’organes et répartition sur les classes en fonction de leur ancienneté ? d. Apparition de réactions hystériques vraies (psychogènes) (tremblements, paralysies, aphonie), causes déterminantes ?<ref name="IM9YW6G5, S 106">Jasper, Hinrich. Maximinian de Crinis (1889-1945). Eine Studie zur Psychiatrie im Nationalsozialismus. Husum : Matthiesen, 1991. , S 106.</ref> </blockquote> | |||
L’expérience de Bostroem en tant que médecin militaire pendant la Première Guerre mondiale et son exercice prolongé dans le « service des névrosés » à Hambourg Eppendorf l’ont prédestiné à l’exercice de la psychiatrie militaire.<ref name="7851681f05c9d08079e87725e79c12c8efab9dec">Wagner, W.: August Bostroem. Fortschritte der Neurologie, Psychiatrie und ihrer Grenzgebiete, 16. Jahrgang, 1944, S 34</ref> De plus, l’une des principales tâches dans ce domaine consiste à établir des expertises psychiatriques de responsabilité en cas de délits, suicide, automutilation et d’infraction au paragraphe 175 du Code pénal allemand qui punit l’homosexualité. Là aussi, Bostroem met à profit son « vif intérêt » pour la psychiatrie médico-légale.<ref name="GNRI56CT, S 10">Nonne, Max. August Bostroem. Deutsche Zeitschrift für Nervenheilkunde 157 (1944) : 1-21. , S 10.</ref> Les médecins experts se rencontrent pendant la guerre à l’occasion de plusieurs congrès.<ref name="NXTYKYI4">Fischer, Hubert. Die militärärztliche Akademie 1934-1945. Osnabrück : Biblio, 1975.</ref> Bostroem publie un article intitulé ''Der seelische Zustand der Truppe'' (L’État psychologique des troupes).<ref name="YUEL9WWS">Bostroem, August. Der seelische Zustand der Truppe. Veröffentlichungen aus dem Gebiete des Heeres-Sanitätswesens (1939) : 17-30.</ref> | |||
L’attitude et les agissements de Bostroem quant à l’homosexualité permettent aussi de mieux comprendre où il se situe dans l’idéologie nazie. Il est indéniable qu’il défend une position opposée à l’émancipation. Dans un article appelé ''Seelische Schwierigkeiten in der Pubertät'' (Difficultés psychiques à la puberté), il se prononce en faveur d’une « protection de la jeunesse » contre les homosexuels et légitime les pratiques de persécution du régime national-socialiste à leur encontre.<ref name="6TUVF3RA, S 380">Bostroem, August. Seelische Schwierigkeiten in der Pubertät. Münchener Medizinische Wochenschrift 29 (1944) : 378-383. , S 380.</ref> Dans un précis de psychiatrie qu’il édite, il s’exprime de manière similaire et met en avant « la base héréditaire » (''erbliche Grundlage'') de l’homosexualité. Il établit de manière péjorative un lien entre homosexualité et « consommation de stupéfiants ».<ref name="T39D5IV7, S 242">Lange, Johannes;Bostroem, August. Kurzgefasstes Lehrbuch der Psychiatrie. Leipzig : G. Thieme, 1943. , S 242.</ref> | |||
August Bostroem décède subitement le 3 février 1944 à Strasbourg des suites d’une maladie cardiaque non détectée.<ref name="GNRI56CT, S 3">Nonne, Max. August Bostroem. Deutsche Zeitschrift für Nervenheilkunde 157 (1944) : 1-21. , S 3.</ref> | |||
|Resume_de=August Bostroem (1886-1944) war Lehrstuhlinhaber für Psychiatrie-Neurologie an der „Reichsuniversität“ Straßburg und Beratender Psychiater der Wehrmacht. | |Resume_de=August Bostroem (1886-1944) war Lehrstuhlinhaber für Psychiatrie-Neurologie an der „Reichsuniversität“ Straßburg und Beratender Psychiater der Wehrmacht. | ||
Niemand Geringeres als Max de Crinis (1889-1945), einer der führenden NS-Psychiater, unterstützte aktiv dessen Berufung. | Niemand Geringeres als Max de Crinis (1889-1945), einer der führenden NS-Psychiater, unterstützte aktiv dessen Berufung.<ref name="29254aed210810016513c81acc4453e0291e2225">BArch R/9361/VI, 247</ref> Auf den ersten Blick impliziert dies eine uneingeschränkte Übereinstimmung mit den Ansprüchen der biopolitischen Entwicklungsdiktatur (Hans-Walter Schmuhl) an ein dezidiert nationalsozialistisches Ordinariat. Die fachliche Anerkennung seiner Zeitgenossen steht dabei außer Frage. Der Hamburger Neurologe Max Nonne (1861-1959) stellte ihn posthum in die Reihe der „Kämpfer in vorderster Linie für unsere Wissenschaft“<ref name="GNRI56CT, S 2">Nonne, Max. August Bostroem. Deutsche Zeitschrift für Nervenheilkunde 157 (1944) : 1-21. , S 2.</ref> und sein Lehrer Oswald Bumke (1870-1950) charakterisierte ihn in seinen Memoiren als einen „ausgezeichnete[n] Kliniker, ein erfolgreicher Forscher, ein[en] vorzügliche[n] Arzt und eine[n] der prachtvollsten Menschen“<ref name="0af5b35a7322e6468f6e535d3dcd7558482bbbe1">Bumke, Oswald: Oswald Bumke Erinnerungen und Betrachtungen. Der Weg eines deutschen Psychiaters. München, Richard Pflaume, S. 91</ref>, die ihm je begegnet seien. Doch welche Positionen vertrat Bostroem hinsichtlich Zwangssterilisation, „Euthanasie“ und diagnostischen sowie therapeutischen Konzepten innerhalb seines Faches? Welche Handlungsspielräume nutzte er bei der konkreten Gestaltung der neu aufzubauenden Universitätspsychiatrie bzw. Neurologie und welchen Einfluss nahm er auf die alltägliche medizinische Praxis vor Ort? | ||
==Lebenslauf und Ausbildung== | |||
August Bostroem wurde am 3. Februar 1886 in Gießen als Sohn eines Dozenten für Pathologie geboren. Seine Mutter war die Tochter eines Freiburger Ordinarius für Gynäkologie. Bostroem studierte Humanmedizin in Freiburg und später in Gießen, wo er mit einer Arbeit über „Die Benennung optischer Eindrücke“ promoviert wurde, die sich mit den „Reaktionszeiten bei Exponierung verschiedener optischer Eindrücke bei Gesunden und Geisteskranken“ beschäftigte. Laut Nonne hatte sich schon damals seine persönliche Arbeitsweise gezeigt, die durch „große Gründlichkeit, peinliche Sauberkeit, sehr gewissenhafte Beobachtung möglicher Fehlerquellen [und] sehr ausgiebige Kontrollen an Gesunden“ gekennzeichnet war. Ziel der Arbeit war der praktisch-diagnostische Einsatz der beschriebenen Methode. Sein praktisches Jahr absolvierte er u.a. an der Psychiatrischen Klinik in München unter Emil Kraepelin (1856-1926) um anschließend sich ein Jahr lang als Schiffsarzt auf der Hamburg-Amerika-Linie zu verdingen. Nach einem achtmonatigen Aufenthalt an Nonnes Klinik in Hamburg-Eppendorf sammelte Bostroem drei Jahre lang als Truppenarzt im Ersten Weltkrieg zahlreiche Eindrücke über die klinischen Ausprägungen der bis dahin unbekannten Krankheitsentität der „Kriegsneurose“. In diesem Zusammenhang entstand seine erste Publikation zu „Neurologische[n] und psychiatrische[n] Fronterfahrung eines Truppenarztes“ (1917). Entsprechend der Tradition der Hamburger Klinik beschäftigte sich Bostroem nach seiner Rückkehr mit den pathologisch-anatomischen Entsprechungen klinischer Erscheinungen. Darüber hinaus kam er in diesem Zeitraum mit einer großen Anzahl an Patient_innen in Kontakt, die an Neurolues erkrankt waren, was ebenso bestimmend für sein späteres Forschungsgebiet sein sollte. Nach dreieinhalb Jahren in Hamburg führte ihn sein Berufsweg über Rostock bei Karl Kleist (1879-1960) nach Breslau zu Oswald Bumke. Als dessen Oberarzt begleitete er ihn 1921 nach Leipzig.<ref name="ef5f7deac0a4128ddf147a93d86cbc8fb89ab139">Nonne, Max: Nachruf August Bostroem. Deutsche Zeitschrift für Nervenheilkunde. Bd. 157, Heft 1/2, S. 3-5</ref> Bumke und Bostroem verstanden sich sowohl auf professioneller als auch auf persönlicher Ebene sehr gut. Es entstand eine Freundschaft, die auch nachdem sich die beruflichen Wege getrennt hatten, bestehen bleiben sollte. Wenngleich Bumke durchaus als Vertreter der somatischen Psychiatrie anzusehen ist, schloss er psychologische Ansätze in seine Überlegungen mit ein. Besonders in seiner Leipziger Zeit setzte sich Bumke für eine Humanisierung des Umgangs mit psychiatrischen Patient_innen ein und gegen den Einsatz von Zwangsmittels außer als ultima ratio ein. Hinsichtlich der Diskurse um die Vererbbarkeit psychiatrischer Krankheiten und der diskutierten Degenerationslehren nahm Bumke eine tendenziell kritisch bis ablehnende Haltung ein, da er ersteres in Ansätzen zwar für möglich hielt, eine zwangsläufige Degeneration ganzer Völker jedoch als komplett unbewiesen einstufte. Selbst bei einer möglicherweise in der Zukunft erolgenden Beweisführung sah er eugenische Maßnahmen als nicht zielführend an. Inwieweit Bostroem diverse Ansichten seines Lehrers zumindest bedingt oder zeitweise teilte, muss zunächst offenbleiben.<ref name="JRA89NXV, S 246-247">Angermeyer, Matthias C.;Steinberg, Holger. 200 Jahre Psychiatrie an der Universität Leipzig. Personen und Konzepte. Heidelberg : Springer, 2005. , S 246-247.</ref> | |||
Im Jahr 1922 habilitierte sich Bostroem in Leipzig mit der Arbeit „Der amyostatische Symptomenkomplex. Klinische Untersuchungen unter Berücksichtigung allgemeiner pathologischer Fragen“. Anschließend wechselte er mit Bumke nach München.<ref name="JRA89NXV, S 263">Angermeyer, Matthias C.;Steinberg, Holger. 200 Jahre Psychiatrie an der Universität Leipzig. Personen und Konzepte. Heidelberg : Springer, 2005. , S 263.</ref> In diesem Zeitraum widmete er sich besonders dem Grenzgebiet zwischen Psychiatrie und Neurologie wie beispielsweise Krankheiten des extrapyramidalen motorischen Systems sowie neurologischen und psychiatrischen Syndromen in Fällen von Neurolues und Encephalitis. Diese Arbeit gipfelte in der Zeitschrift der Neurologie, Psychiatrie und ihrer Grenzgebiete, die er 1929 zusammen mit dem Psychiater und Kriminalbiologen Johannes Lange (1891-1938) gründete und fortan herausgab. | |||
Als Nachfolger Ernst Meyers (1871-1931) folgte Bostroem dem Ruf auf den Lehrstuhl nach Königsberg, bevor er 1938 das Ordinariat in Leipzig annahm.<ref name="TCDPQXS2, S 121">Hippius, Hanns;Neundörfer-Kohl, Gabriele;Möller, Hans-Jürgen;Müller, Norbert. The University Department of Psychiatry in Munich. From Kraepelin and his predecessors to molecular psychiatry. Heidelberg : Springer, 2008. , S 121.</ref> Bostroem kann als Befürworter der neuen somatischen Therapien charakterisiert werden. In seiner Leipziger Zeit führte er in der dortigen Klinik die Insulinschock- und Elektrokrampftherapie ein.<ref name="JRA89NXV, 253">Angermeyer, Matthias C.;Steinberg, Holger. 200 Jahre Psychiatrie an der Universität Leipzig. Personen und Konzepte. Heidelberg : Springer, 2005. , 253.</ref> | |||
==Situation in Straßburg== | |||
Was bewog Bostroem den Ruf nach Straßburg zu folgen? Glaubt man einem der Nachrufe, so war es die „Möglichkeit neuen Schaffens“ und die „Liebe zum süddeutschen Element“.<ref name="fbe709260e5d4e9dbfba8ee14ca2412f9732447d">Wagner, W.: August Bostroem. Fortschritte der Neurologie, Psychiatrie und ihrer Grenzgebiete, 16. Jahrgang, 1944. S 34-35</ref> Max de Crinis war in seiner Funktion als Referent für medizinische Fachfragen im Reichsministerium für Wissenschaft, Erziehung und Volksbildung generell verantwortlich für Berufungen. Bostroem reiste nach Straßburg um sich von den Gegebenheiten der im Aufbau befindlichen „Reichsuniversität“ ein Bild zu verschaffen und machte seine Zusage von der „Erfüllung seiner Wünsche“ abhängig. Welche Forderungen dies genau waren, bleibt unklar. Bostroem entsprach wohl gänzlich den Vorstellungen de Crinis, so schreibt dieser nach Bostroems Besuch an den Dekan der medizinischen Fakultät, Johannes Stein (1896-1967): „Mehr konnte ich trotz meines Drängens nicht erreichen.“ Dennoch hatte der Dekan den Eindruck, dass Bostroem „sehr gerne“ kommen würde. <ref name="29254aed210810016513c81acc4453e0291e2225">BArch R/9361/VI, 247</ref> Bostroem schickte vorab seinen Kollegen Nikolaus Jensch (1913-64) als Vertretung nach Straßburg. Bostroem selbst wurde seit dem Wintersemester 1942/43 als ordentlicher Professor für Psychiatrie und Neurologie geführt.<ref name="8FR37NI7, S 37">Reichsuniversität Straßburg. Personal- und Vorlesungs-Verzeichnis. Winter-Semester 1941/42. Straßburg : Heitz, 1941. , S 37.</ref> Er hielt wöchentlich die Vorlesung „Psychiatrische und Nervenklinik (einschl. Wehrpsychologie)“ und „Forensische Psychiatrie“ mit „Krankenvorstellungen“. Den entsprechenden „Untersuchungskurs“ übernahm Jensch.<ref name="8FR37NI7, S 63">Reichsuniversität Straßburg. Personal- und Vorlesungs-Verzeichnis. Winter-Semester 1941/42. Straßburg : Heitz, 1941. , S 63.</ref> Neben Jensch nahm Bostroem viel Personal aus Leipzig mit nach Straßburg.<ref name="JRA89NXV, S 263">Angermeyer, Matthias C.;Steinberg, Holger. 200 Jahre Psychiatrie an der Universität Leipzig. Personen und Konzepte. Heidelberg : Springer, 2005. , S 263.</ref> | |||
Was bewog Bostroem den Ruf nach Straßburg zu folgen? Glaubt man einem der Nachrufe, so war es die „Möglichkeit neuen Schaffens“ und die „Liebe zum süddeutschen Element“. | |||
Welche Bedingungen fand Bostroem in Straßburg vor? Die neurologische Klinik stand unter der Verwaltung der psychiatrischen Klinik. Letztere bestand aus sechs Stationen, wobei von den 142 Betten 77 für Männer und 65 für Frauen gedacht waren. 40 Betten waren für „unruhige Kranke“ vorgesehen, wobei alle Stationen geschlossen geführt und von Nachtwachen beaufsichtigt wurden. Im Jahr 1942 wurden 30 Betten für die psychiatrische Abteilung des Reserve-Lazaretts Straßburg zur Verfügung gestellt. | Welche Bedingungen fand Bostroem in Straßburg vor? Die neurologische Klinik stand unter der Verwaltung der psychiatrischen Klinik. Letztere bestand aus sechs Stationen, wobei von den 142 Betten 77 für Männer und 65 für Frauen gedacht waren. 40 Betten waren für „unruhige Kranke“ vorgesehen, wobei alle Stationen geschlossen geführt und von Nachtwachen beaufsichtigt wurden. Im Jahr 1942 wurden 30 Betten für die psychiatrische Abteilung des Reserve-Lazaretts Straßburg zur Verfügung gestellt. | ||
Die Nervenklinik gliederte sich in 4 Stationen mit 62 Betten. Darüber hinaus gab es die Möglichkeit 32 Privatpatient_innen gesondert unterzubringen. Es existierte eine gemeinsame Poliklinik, die für die beiden Fachbereiche gemeinsam genutzt wurde. 1942 waren in weiterer Vorbereitung eine „Röntgenabteilung“, ein „Operationsraum für diagnostische Eingriffe“ sowie eine „Erbwissenschaftliche Abteilung.“<ref name="8FR37NI7, S 121-122">Reichsuniversität Straßburg. Personal- und Vorlesungs-Verzeichnis. Winter-Semester 1941/42. Straßburg : Heitz, 1941. , S 121-122.</ref> | |||
==Haltung zur Eugenik und NS-„Euthanasie“== | |||
„Es widerstrebt naturgemäß dem behandelnden Arzt, der sich verpflichtet fühlt, für das individuelle Wohl seiner kranken zu sorgen, durch seine Meldung ein Verfahren in Gang zu bringen, das dem Betroffenen persönlich unlieb sein kann. ... ich glaube aber, daß das befolgen der gesetzlichen Vorschriften in keiner Weise unärztlich zu wirken braucht. Kranke und Angehörige brauchen gerade bei diesen für sie einschneidenden Maßnahmen mensch-ärztlichen Zuspruchs. ... Uns Ärzten fällt die Aufgabe zu, Verständnis für das Gesetz auch bei denen zu gewinnen, die davon unmittelbar betroffen sind. Das kostet große Geduld und viel Zeit, ich glaube aber, daß diese Mühe gut angewandt ist. | Ein weiterer Fragenkomplex bezieht sich auf Bostroems Haltung zur nationalsozialistischen Ideologie und sein Handeln hinsichtlich der Zwangssterilisationen und den Krankenmorden. Bostroem war seit 1937 NSDAP-Mitglied und im NS-Lehrerbund.<ref name="WKA9ZEMB, S 67">Klee, Ernst. Das Personenlexikon zum Dritten Reich. Wer war was vor und nach 1945. Frankfurt am Main : Fischer, 2005. , S 67.</ref> Der rege Briefwechsel mit seinem ehemaligen Lehrer Bumke hatte auch die politischen Ereignisse und deren Implikationen für den psychiatrischen Alltag wie das Gesetz zur Verhütung erbkranken Nachwuchses 1933 zum Gegenstand.<ref name="TCDPQXS2, S 120">Hippius, Hanns;Neundörfer-Kohl, Gabriele;Möller, Hans-Jürgen;Müller, Norbert. The University Department of Psychiatry in Munich. From Kraepelin and his predecessors to molecular psychiatry. Heidelberg : Springer, 2008. , S 120.</ref> Anhand dessen könnte Bostroems Einstellung eventuell direkter einsehbar werden. In seinem Aufsatz über „Erbbiologie und Psychiatrie“ (1934) benannte Bostroem zwar ausführlich die Komplexität der Zusammenhänge zwischen Erbanlagen, Umwelteinflüssen und der letztlichen Erkrankungswahrscheinlichkeit für die unterschiedlichen Krankheitsbilder, tat dies jedoch stets vor dem Hintergrund der Eugenik und der Existenz „eugenisch unerwünschten Persönlichkeiten“.<ref name="AWCTEEFD, S 1667">Bostroem, August. Erbbiologie und Psychiatrie. Klinische Wochenschrift 13 (1934) : 1665-1670. , S 1667.</ref> Abschließend erwähnte Bostroem auch, dass die „genauere Kenntnis der Erblehre“ aber nicht zu einer „Resignation in bezug auf die Behandlung“ führen solle.<ref name="AWCTEEFD, S 1669">Bostroem, August. Erbbiologie und Psychiatrie. Klinische Wochenschrift 13 (1934) : 1665-1670. , S 1669.</ref> Konkreter äußerte sich Bostroem in einem ärztlichen Fortbildungskurs 1934 mit dem Vortrag „Das Gesetz zur Verhütung erbkranken Nachwuchses vom Standpunkt der Psychiatrie“ folgendermaßen: | ||
<blockquote>„Es widerstrebt naturgemäß dem behandelnden Arzt, der sich verpflichtet fühlt, für das individuelle Wohl seiner kranken zu sorgen, durch seine Meldung ein Verfahren in Gang zu bringen, das dem Betroffenen persönlich unlieb sein kann. ... ich glaube aber, daß das befolgen der gesetzlichen Vorschriften in keiner Weise unärztlich zu wirken braucht. Kranke und Angehörige brauchen gerade bei diesen für sie einschneidenden Maßnahmen mensch-ärztlichen Zuspruchs. ... Uns Ärzten fällt die Aufgabe zu, Verständnis für das Gesetz auch bei denen zu gewinnen, die davon unmittelbar betroffen sind. Das kostet große Geduld und viel Zeit, ich glaube aber, daß diese Mühe gut angewandt ist.“<ref name="GNRI56CT, S 15-16">Nonne, Max. August Bostroem. Deutsche Zeitschrift für Nervenheilkunde 157 (1944) : 1-21. , S 15-16.</ref> </blockquote> | |||
Weiterhin erläuterte er Inhalt, Form und Absicht des Gesetztes und stellte somit die Psychiatrie in den Dienst der nationalsozialistischen Machthaber. In einzelnen Fällen wurde die Durchführung von Zwangssterilisationen bereits für Straßburg belegt. Eine genauere Analyse steht aber noch aus. | Weiterhin erläuterte er Inhalt, Form und Absicht des Gesetztes und stellte somit die Psychiatrie in den Dienst der nationalsozialistischen Machthaber. In einzelnen Fällen wurde die Durchführung von Zwangssterilisationen bereits für Straßburg belegt. Eine genauere Analyse steht aber noch aus. | ||
Deutlich schwieriger zu beurteilen ist Bostroems Einstellung zur NS-„Euthanasie“. Am aufschlussreichsten hierzu ist der ausführliche Briefwechsel mit seinem Kollegen Dr. Karsten Jaspersen (1896-1968), leitender Arzt der „Psychiatrischen und Nervenabteilungen der Westfälischen Diakonissenanstalt in Bethel“ und einer der wenigen Psychiater, die sich vehement gegen die Krankenmorde wandten. Jaspersen gab sein Wissen über die Krankenmorde an die unterschiedlichsten Stellen weiter und versuchte bei übergeordneten Instanzen zu intervenieren. In diesem Zusammenhang verfasst er zahlreiche Anschreiben um auch bei den führenden Ordinarien Unterstützung zu unterhalten und breiteren Widerstand gegen die T4-Aktion zu organisieren. In einem Brief vom 18. Juli 1940 wandte sich Jaspersen ebenso an Bostroem als dessen „dankbarer Schüler und mehrjähriger Asisstent“ - die beiden kannten sich aus Bostroems Zeit als Oberarzt in München – und berichtete von den Krankenmorden und dem Zweck der reichsweit versendeten Meldebögen. Bostroem antwortete rasch, dass er „von der Sache schon gehört habe“ und empfahl die Verweigerung des Ausfüllens der Bögen. | Deutlich schwieriger zu beurteilen ist Bostroems Einstellung zur NS-„Euthanasie“. Am aufschlussreichsten hierzu ist der ausführliche Briefwechsel mit seinem Kollegen Dr. Karsten Jaspersen (1896-1968), leitender Arzt der „Psychiatrischen und Nervenabteilungen der Westfälischen Diakonissenanstalt in Bethel“ und einer der wenigen Psychiater, die sich vehement gegen die Krankenmorde wandten. Jaspersen gab sein Wissen über die Krankenmorde an die unterschiedlichsten Stellen weiter und versuchte bei übergeordneten Instanzen zu intervenieren. In diesem Zusammenhang verfasst er zahlreiche Anschreiben um auch bei den führenden Ordinarien Unterstützung zu unterhalten und breiteren Widerstand gegen die T4-Aktion zu organisieren. In einem Brief vom 18. Juli 1940 wandte sich Jaspersen ebenso an Bostroem als dessen „dankbarer Schüler und mehrjähriger Asisstent“ - die beiden kannten sich aus Bostroems Zeit als Oberarzt in München – und berichtete von den Krankenmorden und dem Zweck der reichsweit versendeten Meldebögen. Bostroem antwortete rasch, dass er „von der Sache schon gehört habe“ und empfahl die Verweigerung des Ausfüllens der Bögen.<ref name="AD8U8KKP, S 107">Peters, Uwe Henrik. Karsten Jaspersen. 1940 ... der einzige deutsche Psychiater, der alles riskierte, um den Krankenmord zu verhindern. Köln : ANA Publishers, 2013. , S 107.</ref> Er war zu dieser Zeit Ordinarius in Leipzig. Ob Bostroem vor diesem Hintergrund bewusst Verlegungen von Patient_innen in Heil- und Pflegeanstalten bzw. Tötungsanstalten gefördert oder verhindert hat, ist nicht bekannt. Nach derzeitigem Forschungsstand war die Leipziger Universitätsklinik nicht direkt in die Mordaktionen verwickelt, da diese vorrangig für die Erstaufnahme verantwortlich war und nicht für eine dauerhafte Unterbringung von psychiatrisch erkrankten Menschen.<ref name="JRA89NXV, S 252">Angermeyer, Matthias C.;Steinberg, Holger. 200 Jahre Psychiatrie an der Universität Leipzig. Personen und Konzepte. Heidelberg : Springer, 2005. , S 252.</ref> | ||
Auf Jaspersens Anstoß hin wurde Bostroem selbst aktiv, schrieb an Bumke und sucht ein persönliches Gespräch mit ihm. Zum Zeitpunkt des Gesprächs hatte Bumke, der ebenfalls einen ähnlichen Brief von Jaspersen erhalten hatte, bereits ergebnislos versucht bei Ernst Rüdin (1874-1952) etwas zu bewirken. Dies blieb nicht Bostroems einzige Handlung. In dem Briefwechsel erwähnte er Jaspersen gegenüber: „Ein Versuch ganz anderer Art ist mir auch mißglückt“, wenngleich unklar bleibt auf was Bostroem hier anspielte. Zusätzlich bemerkte Bostroem, dass es wohl kein Zufall sein könne, wenn 1940 keine satzungsgemäße Versammlung des Fachverbandes der Deutschen Psychiater stattfinde und somit ein Austausch über die Geschehnisse gezielt verhindert würde. | Auf Jaspersens Anstoß hin wurde Bostroem selbst aktiv, schrieb an Bumke und sucht ein persönliches Gespräch mit ihm. Zum Zeitpunkt des Gesprächs hatte Bumke, der ebenfalls einen ähnlichen Brief von Jaspersen erhalten hatte, bereits ergebnislos versucht bei Ernst Rüdin (1874-1952) etwas zu bewirken. Dies blieb nicht Bostroems einzige Handlung. In dem Briefwechsel erwähnte er Jaspersen gegenüber: „Ein Versuch ganz anderer Art ist mir auch mißglückt“, wenngleich unklar bleibt auf was Bostroem hier anspielte. Zusätzlich bemerkte Bostroem, dass es wohl kein Zufall sein könne, wenn 1940 keine satzungsgemäße Versammlung des Fachverbandes der Deutschen Psychiater stattfinde und somit ein Austausch über die Geschehnisse gezielt verhindert würde.<ref name="AD8U8KKP, S 109">Peters, Uwe Henrik. Karsten Jaspersen. 1940 ... der einzige deutsche Psychiater, der alles riskierte, um den Krankenmord zu verhindern. Köln : ANA Publishers, 2013. , S 109.</ref> Bostroem bekundete Interesse bei Gelegenheit seinen Standpunkt gegenüber den führenden T4-Organisatoren zu begründen. Weiter heißt es in diesem Brief gegenüber Jaspersen: | ||
„man brauchte dabei keineswegs einen a limine ablehnenden Standpunkt einzunehmen; denn über eine Euthanasie bei unheilbaren, sich nur quälenden Kranken läßt sich ja reden; aber das kann man nicht nach Fragebogenlektüre bestimmen und überhaupt ist so etwas sehr schwer festzulegen. Im übrigen ist die Wirkung auf Angehörige, Kranke aber auch auf das Pflegepersonal unabsehbar und vor allem erscheint mir hier die Frage des Arzttums auf dem Spiele zu stehen. | <blockquote>„man brauchte dabei keineswegs einen a limine ablehnenden Standpunkt einzunehmen; denn über eine Euthanasie bei unheilbaren, sich nur quälenden Kranken läßt sich ja reden; aber das kann man nicht nach Fragebogenlektüre bestimmen und überhaupt ist so etwas sehr schwer festzulegen. Im übrigen ist die Wirkung auf Angehörige, Kranke aber auch auf das Pflegepersonal unabsehbar und vor allem erscheint mir hier die Frage des Arzttums auf dem Spiele zu stehen.“<ref name="AD8U8KKP, S 145">Peters, Uwe Henrik. Karsten Jaspersen. 1940 ... der einzige deutsche Psychiater, der alles riskierte, um den Krankenmord zu verhindern. Köln : ANA Publishers, 2013. , S 145.</ref> </blockquote> | ||
Diese Aussage erscheint recht merkwürdig, zumal Bostroem mehrmals ausdrücklich gegenüber Jaspersen seine Unterstützung gegen die Krankenmorde versichert hatte und selbst tätig geworden war. Direkt im Anschluss machte Bostroem weitere Vorschläge, an wen man sich zwecks Hilfe noch wenden könnte. Den zitierten Brief schloss Bostroem mit dem Satz: „Wenn ich gebraucht werden sollte, stehe ich jederzeit zur Verfügung. | Diese Aussage erscheint recht merkwürdig, zumal Bostroem mehrmals ausdrücklich gegenüber Jaspersen seine Unterstützung gegen die Krankenmorde versichert hatte und selbst tätig geworden war. Direkt im Anschluss machte Bostroem weitere Vorschläge, an wen man sich zwecks Hilfe noch wenden könnte. Den zitierten Brief schloss Bostroem mit dem Satz: „Wenn ich gebraucht werden sollte, stehe ich jederzeit zur Verfügung.“<ref name="AD8U8KKP, S 146">Peters, Uwe Henrik. Karsten Jaspersen. 1940 ... der einzige deutsche Psychiater, der alles riskierte, um den Krankenmord zu verhindern. Köln : ANA Publishers, 2013. , S 146.</ref> Isoliert betrachtet könnte man die obige Aussage Bostroems zur NS-„Euthanasie“ so interpretieren, dass ihm nur die Form der Entscheidungsfindung, also das Ausfüllen der Meldebögen, missfiel und nicht die „Euthanasie“ als Sache selbst. In der Zusammenschau mit seinen sonstigen Aussagen wirkt die oben zitierte Passage eher wie ein Vorschlag des taktischen Argumentierens gegenüber rigorosen Befürwortern der „Euthanasie“. Festzuhalten bleibt, dass diese Abgrenzung von den Krankenmorden, wenn man sie so interpretieren möchte, auf die Sphäre des Privaten begrenzt blieb. Der Briefwechsel und die Suche nach gleichgesinnten Kolleg_innen drang nicht an die Öffentlichkeit und hatte damit auch keinen Einfluss auf Bostroems weitere Karriere und die Berufung nach Straßburg. | ||
Einen Schritt weiter ist Bostroem laut dem elsässischen Arzt Bernard in Straßburg gegangen. Er berichtete, dass Bostroem in einer Vorlesung vor seinen Studierenden deutlich gegen die Mordaktionen Position bezogen hätte. Die „Euthanasie“ bezeichnete er als „inhuman“ und der „Zivilisation unwürdig“. | Einen Schritt weiter ist Bostroem laut dem elsässischen Arzt Bernard in Straßburg gegangen. Er berichtete, dass Bostroem in einer Vorlesung vor seinen Studierenden deutlich gegen die Mordaktionen Position bezogen hätte. Die „Euthanasie“ bezeichnete er als „inhuman“ und der „Zivilisation unwürdig“. <ref name="4f6a0fc114c5b04078f9f9edaa41caaa341e903b">Héran, Jaques: Histoire de la médecine à Strasbourg. La Nuée Bleue, Strasbourg, 1997, S 611</ref> Auch Bostroems Sohn betonte später, dass sein Vater nie Verlegungen seiner Patient_innen in Tötungsanstalten wie Hadamar angeordnet hätte. Dies wurde von neueren Forschungen belegt. Die anhand der Krankenakten und Aufnahmebüchern nachvollziehbaren Verlegungen fanden ausschließlich in die zuständige Heil- und Pflegeanstalt Stephansfeld statt. | ||
==Elektrokrampftherapie und Forschungsansätze== | |||
Konsens im gegenwärtigen Forschungsstand hinsichtlich des Stellenwerts der Elektroschockbehandlung im Nationalsozialismus ist grundsätzlich, „dass die neuartige Elektrokrampftherapie in Deutschland auf ein großes wissenschaftliches Interesse stieß, dass die Psychiater auch unter den Bedingungen des Krieges bemüht waren, die neue Methode in die psychiatrische Praxis einzuführen, und dass sie dabei von hochrangigen Funktionären des NS-Regimes unterstützt wurden.“ Weiterhin wird konstatiert, dass diese Form der neuen somatischen Therapien „umstandslos in die für die Medizin im Nationalsozialismus so typische Dialektik von Heilen und Vernichten integriert wurden. | Konsens im gegenwärtigen Forschungsstand hinsichtlich des Stellenwerts der Elektroschockbehandlung im Nationalsozialismus ist grundsätzlich, „dass die neuartige Elektrokrampftherapie in Deutschland auf ein großes wissenschaftliches Interesse stieß, dass die Psychiater auch unter den Bedingungen des Krieges bemüht waren, die neue Methode in die psychiatrische Praxis einzuführen, und dass sie dabei von hochrangigen Funktionären des NS-Regimes unterstützt wurden.“ Weiterhin wird konstatiert, dass diese Form der neuen somatischen Therapien „umstandslos in die für die Medizin im Nationalsozialismus so typische Dialektik von Heilen und Vernichten integriert wurden.“<ref name="QJ4SQF57, S 10">Roelcke, Volker;Schmuhl, Hans-Walter. Heroische Therapien. Die deutsche Psychiatrie im internationalen Vergleich, 1918-1945. Göttingen : Wallstein, 2013. , S 10.</ref> Lokale Tiefenstudien hingegen betonen, dass die quantitative Anwendung der EKT großen regionalen Unterschieden unterlag. Während manche Kliniken diese Therapie sehr schnell und in großem Umfang ihre psychiatrische Behandlungspraxis integrierten, waren andere äußerst zurückhaltend. Die Heil- und Pflegeanstalt Wiesloch unter Herbert Linden sollte laut ihm zu einem „Musterinstitut für die Erforschung der Elektroschockbehandlung“ ausgebaut werden, wohingegen Karl Bonhoeffer (1868-1948) ein entschiedener Skeptiker der neuen somatischen Therapie war und dieser folglich an der Berliner Charité zunächst keine größere Bedeutung zukam. <ref name="63YSP5Q5">Rzesnitzek, Lara;Lang, Sascha. Electroshock therapy in the Third Reich. Medical history 61 (2017) : 66-88.</ref> Dies wirft unweigerlich die Frage nach der Handhabung in Straßburg auf. Der Hochschulführer der „Reichsuniversität“ hebt in seiner Selbstdarstellung der Psychiatrischen und Nervenklinik neben der Insulin- und der Cardiazoltherapie die Elektroschockbehandlung als einzige Behandlungsmethode besonders hervor.<ref name="3403567231374e191395a471738a8618530fd72b">Hochschulführer der Reichsuniversität Straßburg. Heitz&Co, Straßburg, 1942, S 121</ref> Seit Juli 1942 wurden in der Psychiatrischen Klinik Elektroschocks angewendet.<ref name="2IHBBTPJ, S 2">Scharnke, Hans Georg. Ergebnisse der Elektrokrampfbehandlung bei Manisch Depressiven. Diss. med.. Straβburg, 1944. , S 2.</ref> | ||
Zu fragen ist in diesem Zusammenhang auch nach dem Verhältnis zwischen den verschiedenen Paradigmen der NS-Psychiatrie. Welchen Stellenwert erhielten die neuen somatischen Therapien, da sie erstmal eine reale Aussicht auf eine Heilung von Krankheiten wie Schizophrenie gewährten, die als Erbkrankheiten deklariert worden waren? Als einziges wirksames Mittel gegen diese Erbkrankheiten war zuvor die Sterilisation propagiert worden. So betonte der Direktor der Deutschen Forschungsanstalt für Psychiatrie in München und „Reichsleiter“ der GDNP Ernst Rüdin 1936, dass die somatischen Therapiemethoden „unter gar keinen Umständen eine störende Rückwirkung auf die Durchführung des Sterilisationsgesetztes haben“ dürften. | Zu fragen ist in diesem Zusammenhang auch nach dem Verhältnis zwischen den verschiedenen Paradigmen der NS-Psychiatrie. Welchen Stellenwert erhielten die neuen somatischen Therapien, da sie erstmal eine reale Aussicht auf eine Heilung von Krankheiten wie Schizophrenie gewährten, die als Erbkrankheiten deklariert worden waren? Als einziges wirksames Mittel gegen diese Erbkrankheiten war zuvor die Sterilisation propagiert worden. So betonte der Direktor der Deutschen Forschungsanstalt für Psychiatrie in München und „Reichsleiter“ der GDNP Ernst Rüdin 1936, dass die somatischen Therapiemethoden „unter gar keinen Umständen eine störende Rückwirkung auf die Durchführung des Sterilisationsgesetztes haben“ dürften.<ref name="QJ4SQF57, S 13">Roelcke, Volker;Schmuhl, Hans-Walter. Heroische Therapien. Die deutsche Psychiatrie im internationalen Vergleich, 1918-1945. Göttingen : Wallstein, 2013. , S 13.</ref> Lassen sich „Euthanasie“ und somatische Therapien als „komplementäre Elemente einer modernen Psychiatrie“ beschreiben?<ref name="QJ4SQF57, S 16">Roelcke, Volker;Schmuhl, Hans-Walter. Heroische Therapien. Die deutsche Psychiatrie im internationalen Vergleich, 1918-1945. Göttingen : Wallstein, 2013. , S 16.</ref> Zeigte sich dies auch in Straßburg? Die quantitative und qualitative Auswertung könnte anhand der vorhandenen Patient_innenakten erfolgen, die einen Einblick in die konkrete psychiatrische Praxis gewähren und somit ein weiteres Puzzleteil bei der Gesamtbeurteilung darstellen könnte. | ||
Darüber hinaus betreute Bostroem mehrere Dissertationsprojekte im Zusammenhang mit der EKT. Als Forschungsfragen waren laut den Titeln offenbar sowohl die Evaluierung des Therapieerfolgs als auch Nebenwirkungen wie Gedächtnisstörungen von Interesse. Bemerkenswert ist hierbei die Fokussierung auf das manisch-depressive Krankheitsbild. Die Anwendung bei Schizophrenien und anderen Psychosen werden in den vorliegenden Dissertationen nicht thematisiert.<ref name="06ba4c259bfee628e69188032eeb6e901878a78a">Scharnke, Hans Georg: Diss: Ergebnisse der Elektrokrampfbehandlung bei Manisch−Depressiven. Prüfung: 27.05.1944. Und Gross, Rudolf: Diss: Gedächtnisstörungen bei der Schockbehandlung des manisch−depressiven Formenkreises. Prüfung: 30.05.1944</ref> | |||
Neben den genannten Therapien umfasste Bostroems Forschungsinteresse auch die somatischen Entsprechungen der psychiatrischen Erkrankungen, wodurch sich eine Schnittstelle und Kooperation mit anderen Fachgebieten wie der Neuroanatomie und Physiologie ergab. So unterstützte er beispielsweise die diagnostischen Arbeiten und experimentalphysiologischen Testprotokolle von Dr. Paul Link (geb. 1892) und Dr. Frédéric Bernard (1912-2008), die diese in der neuropsychiatrischen Abteilung der Klinik durchgeführten.<ref name="UNWJEWCZ, S 252">Stahnisch, Frank. Die Neurowissenschaften in Straβburg zwischen 1872 und 1945. Sudhoffs Archiv 100 (2016) : 227-262. , S 252.</ref> | |||
„a. Stimmung und Haltung der Truppen, Unterschiede bei den älteren und jüngeren Jahrgängen? | ==Militärpsychiatrie== | ||
Aus Furcht vor dem schwächenden Einfluss der Kriegsneurosen auf die Stärke der Wehrmacht, wie sie im Ersten Weltkrieg erstmalig auftrat, veranlasste Prof. Otto Wuth (1885-1946) Leiter der Militärärztlichen Akademie in Berlin, bereits zu Friedenszeiten den Aufbau einer Heerespsychiatrie. Diese umfasste das folgende Gebiet: „Psychiatrie, medizinische Psychologie, psychische Hygiene, Hirnverletztenfürsorge, Psychopathie und forensische Hygiene.“ Wuth selbst war als „Beratender Psychiater beim Heeres-Sanitätsinspektor“ die oberste psychiatrische Instanz auf diesem Gebiet. Bostroem war diesem untergeordnet als Militärpsychiater für den „Wehrkreis V Straßburg“ zuständig.<ref name="db945b3ff1f8d48d8b16d50b7f507c0f839f510e">Ernst Klee: Das Personenlexikon zum Dritten Reich, Frankfurt am Main 2007, S 286</ref> Einen Einblick in das Aufgabenfeld gewähren die zunächst zweiwöchig, ab dem 13.01.1941 nur noch monatlich zu verfassenden Tätigkeitsberichte, die an Wuth überstellt werden sollten. Diese beinhalteten: | |||
<blockquote>„a. Stimmung und Haltung der Truppen, Unterschiede bei den älteren und jüngeren Jahrgängen? | |||
b. Auswirkungen psychopathischer Abartigkeiten und Alkoholgenuß? | b. Auswirkungen psychopathischer Abartigkeiten und Alkoholgenuß? | ||
c. Häufung organneurotischer Erscheinungen und Verteilung auf ältere und jüngere Jahrgänge? | c. Häufung organneurotischer Erscheinungen und Verteilung auf ältere und jüngere Jahrgänge? | ||
d. Auftreten echter hysterischer (psychogener) Reaktionen (Schüttelzittern, Lähmungen, Aphonien), Gelegenheitsursachen? | d. Auftreten echter hysterischer (psychogener) Reaktionen (Schüttelzittern, Lähmungen, Aphonien), Gelegenheitsursachen?“<ref name="IM9YW6G5, S 106">Jasper, Hinrich. Maximinian de Crinis (1889-1945). Eine Studie zur Psychiatrie im Nationalsozialismus. Husum : Matthiesen, 1991. , S 106.</ref> </blockquote> | ||
Bostroems Erfahrungen als Truppenarzt im Ersten Weltkrieg und die langjährige Betreuung der der „Neurotikerabteilung“ in Hamburg-Eppendorf prädestinierten ihn für die Aufgaben eines Militärpsychiaters.<ref name="7851681f05c9d08079e87725e79c12c8efab9dec">Wagner, W.: August Bostroem. Fortschritte der Neurologie, Psychiatrie und ihrer Grenzgebiete, 16. Jahrgang, 1944, S 34</ref> Außerdem stand das Verfassen forensischer Gutachten hinsichtlich der Begutachtung der Zurechnungsfähigkeit bei Straftaten, Selbstmord, Selbstverstümmelung und Verstößen gegen §175 im Vordergrund der Arbeit der Militärpsychiatrie. Auch hier kam Bostroems „lebhaftes Interesse“ auf dem Gebiet der forensischen Psychiatrie zum Tragen.<ref name="GNRI56CT, S 10">Nonne, Max. August Bostroem. Deutsche Zeitschrift für Nervenheilkunde 157 (1944) : 1-21. , S 10.</ref> | |||
Die beratenden Ärzte trafen sich während des Kriegen zu mehreren Tagungen.<ref name="NXTYKYI4">Fischer, Hubert. Die militärärztliche Akademie 1934-1945. Osnabrück : Biblio, 1975.</ref> Bostroem publizierte folgenden Artikel: „Der seelische Zustand der Truppe“.<ref name="YUEL9WWS">Bostroem, August. Der seelische Zustand der Truppe. Veröffentlichungen aus dem Gebiete des Heeres-Sanitätswesens (1939) : 17-30.</ref> | |||
Hinsichtlich einer Standortbestimmung Bostroems innerhalb der nationalsozialistischen Ideologie und Praxis sind auch seine Position und Handlungen hinsichtlich der Bewertung der Homosexualität bedeutsam. Dass er grundsätzlich eine antiemanzipatorische Position vertrat, ist unstrittig. So sprach er sich in dem Aufsatz „Seelische Schwierigkeiten in der Pubertät“ für einen „Schutz der Jugend“ gegenüber Homosexuellen aus und legitimierte die nationalsozialistische Verfolgungspraxis und Strafmaßnahmen aus psychiatrischer Sicht.<ref name="6TUVF3RA, S 380">Bostroem, August. Seelische Schwierigkeiten in der Pubertät. Münchener Medizinische Wochenschrift 29 (1944) : 378-383. , S 380.</ref> Auch in einem von ihm editierten kurzgefassten Lehrbuch der Psychiatrie äußert er sich ähnlich, betont die „erbliche Grundlage“ der Homosexualität und konstatiert in pejorativer Sprache einen Zusammenhang zum „Mißbrauch von Rauschmitteln.“<ref name="T39D5IV7, S 242">Lange, Johannes;Bostroem, August. Kurzgefasstes Lehrbuch der Psychiatrie. Leipzig : G. Thieme, 1943. , S 242.</ref> | |||
Lea Münch | Ausgust Bostroem verstarb am 3. Februar 1944 unerwartet an den Folgen einer bisher unerkannt gebliebenen Herzkrankheit in Straßburg.<ref name="GNRI56CT, S 3">Nonne, Max. August Bostroem. Deutsche Zeitschrift für Nervenheilkunde 157 (1944) : 1-21. , S 3.</ref> | ||
|etatEn=Scientifically approved | |||
|transEn=Non | |||
|etatDe=Wissenschaftlich genehmigt | |||
|transDe=Non | |||
|etatFr=Approuvée scientifiquement | |||
|transFr=Non | |||
|auteurFiche=Léa Marquart; Lea Münch | |||
|traducteursFiche=Marion Speisser; Élisabeth Fuchs | |||
|Nazi_era=RUS | |Nazi_era=RUS | ||
|Source_information=BArch, R 4901/13259 | |Source_information=BArch, R 4901/13259 | ||
BArch, R 9361-VI/247 | BArch, R 9361-VI/247 | ||
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Version actuelle datée du 12 avril 2022 à 13:17
| August Bostroem | |
|---|---|
| Prénom | August |
| Nom | Bostroem |
| Sexe | masculin |
| Naissance | 17 juillet 1886 (Giessen) |
| Décès | 3 février 1944 (Straβburg) |
| These | Thesis title (Giessen) |
| Profession | Arzt |
| Titre | Prof. Dr. med.[41] |
| Spécialités | Psychiatrie u. Neurologie |
August Bostroem (1886-1944) était titulaire d’une chaire de neuropsychiatrie à la Reichsuniversität Straßburg et psychiatre consultant pour la Wehrmacht.
Sa nomination fut appuyée par nul autre que Max de Crinis (1889-1945), un psychiatre national-socialiste de premier plan.[1] À première vue, cela semble indiquer que Bostroem correspondait parfaitement à ce que la « dictature biopolitique de l’évolution » (biopolitische Entwicklungsdiktatur – Hans Walter Schmuhl) attendait d’un professeur titulaire d’une chaire (Ordinariat) résolument national-socialiste. De plus, il est indéniable qu’il jouissait de la reconnaissance professionnelle de ses pairs. Dans une nécrologie, le neurologue hambourgeois Max Nonne (1861-1959) le décrit comme l’un des « combattants de première ligne pour notre science »[2] et son professeur Oswald Bumke (1870-1950) le dépeint dans ses mémoires comme un « clinicien exceptionnel, un chercheur couronné de succès, un médecin remarquable et l’un des hommes les plus brillants »[3] qu’il ait jamais rencontrés. Toutefois, comment se positionnait Bostroem par rapport à la stérilisation forcée, à « l’euthanasie » et aux principes diagnostiques et thérapeutiques de sa profession ? De quelle marge de manœuvre disposait-il dans la conception du futur institut universitaire de neuropsychiatrie et quelle influence y a-t-il exercé sur la pratique clinique quotidienne ?
Parcours et formation
August Bostroem naît le 3 février 1886 à Giessen. Son père est professeur d’anatomie pathologique et sa mère est la fille d’un professeur titulaire d’une chaire de gynécologie à Fribourg. Bostroem étudie la médecine d’abord à Fribourg puis à Giessen où il soutient une thèse intitulée Benennung optischer Eindrücke (La dénomination d’impressions optiques) qu’il consacre au « temps de réaction à différentes impressions optiques chez le bien portant et chez le malade mental » dans le but de développer une méthode diagnostique. Selon Nonne, déjà à cette époque, Bostroem met en œuvre une méthode de travail personnelle caractérisée par « une grande minutie, une extrême propreté, une attention scrupuleuse portée aux sources d’erreurs possibles [et] une comparaison approfondie avec les bien portants ». Il effectue son stage pratique d’un an notamment auprès d’Emil Kraepelin (1856-1926) à la clinique psychiatrique de Munich avant de s’engager comme médecin de bord dans la compagnie maritime Hamburg-Amerika-Linie. Après un séjour de huit mois à la clinique de Nonne à Hambourg-Eppendorf, il exerce pendant la Première Guerre mondiale comme médecin militaire et se retrouve confronté durant trois années à une pathologie jusque-là inconnue : la « névrose de guerre », dont il observe les signes cliniques. C’est dans ce contexte qu’il publie en 1917 son premier article : Neurologische und psychiatrische Fronterfahrung eines Truppenarztes (Observations neurologiques et psychiatriques d’un médecin militaire au front). À son retour, et comme il est d’usage à la clinique de Hambourg, Bostroem étudie la manière dont ces signes cliniques se traduisent d’un point de vue anatomo-pathologique. En outre, il a affaire dans cette période à un grand nombre de patients atteints de neurosyphilis. Ces entrevues seront également déterminantes pour son travail de recherche. Après avoir exercé pendant trois ans et demi à Hambourg, il travaille à Rostock auprès de Karl Kleist (1879-1960) puis à Wrocław auprès d’Oswald Bumke. Devenu Oberarzt (chef de clinique), Bostroem suit Oswald Bumke à Leipzig en 1921.[4] Bumke et Bostroem s’entendent bien, tant sur le plan professionnel que personnel. Ils resteront amis, même après avoir emprunté des voies professionnelles différentes. Bien que Bumke soit considéré comme un représentant de la somato-psychiatrie, il intègre une approche psychologique à sa réflexion. Durant ses années à Leipzig, il se prononce tout particulièrement en faveur d’une prise en charge plus humaine des patients et rejette l’utilisation de la contrainte, sauf en dernier recours.
Bumke adopte une position plutôt critique, voire hostile par rapport au débat sur l’hérédité des maladies psychiatriques et la théorie de la dégénérescence. En effet, s’il n’écarte pas la possibilité que certaines maladies psychiatriques puissent être en partie héréditaires, il considère que la théorie d’une dégénérescence inéluctable de peuples entiers est totalement infondée. Il doute de l’efficacité de mesures eugéniques, quand bien même cette dégénérescence viendrait à être prouvée un jour. La question de savoir si Bostroem partage au moins en partie ou à un moment donné les divers points de vue de son professeur reste ouverte.[5] En 1922, Bostroem soutient à Leipzig une thèse d’habilitation intitulée Der amyostatische Symptomenkomplex. Klinische Untersuchungen unter Berücksichtigung allgemeiner pathologischer Fragen (Le complexe symptomatique amyostatique. Études cliniques tenant compte de questions de pathologie générale). Ensuite, il suit Bumke à Munich.[6] Durant cette période, il se consacre particulièrement à l’étude de pathologies situées à la frontière entre la psychiatrie et la neurologie, comme par exemple les maladies du système moteur extrapyramidal, ainsi qu’à l’étude des syndromes neurologiques et psychiatriques dans la neurosyphilis et l’encéphalite. Ses travaux trouvent leur point culminant dans la revue Fortschritte der Neurologie, Psychiatrie und ihrer Grenzgebiete (Progrès en neurologie, psychiatrie et leurs domaines annexes) que Bostroem fonde en 1929 et édite à partir de cette date avec le psychiatre et biologiste criminel Johannes Lange (1891-1938). Il succède à Ernst Meyer (1871-1931) à la chaire de Königsberg avant de devenir Ordinarius (professeur titulaire) à Leipzig en 1938.[7] Bostroem est favorable aux nouvelles thérapies somatiques. Alors qu’il travaille à la clinique de Leipzig, il introduit l’insulinothérapie et l’électroconvulsivothérapie.[8]
La situation à Strasbourg
Qu’est-ce qui pousse Bostroem à accepter sa nomination à Strasbourg ? Si l’on en croit l’une des nécrologies écrites à son sujet, il y a « la possibilité de s’ouvrir à de nouvelles opportunités » et « l’attachement à cette région du sud de l’Allemagne».[9] En qualité de Referent für medizinische Fachfragen (consultant pour les questions médicales) au Reichsministerium für Wissenschaft, Erziehung und Volksbildung (ministère de la Science, de l’éducation et de la formation populaire du Reich), c’est Max de Crinis qui est responsable des nominations. Bostroem se rend à Strasbourg pour se faire une idée de la situation de la future Reichsuniversität. Il n’est prêt à accepter sa nomination qu’à condition qu’on « accède à ses demandes ». On ne sait pas exactement en quoi ces demandes consistent. Bostroem correspond tout à fait aux attentes de Max de Crinis. Après la visite de Bostroem, de Crinis écrit à Johannes Stein (1896-1967), doyen de la faculté de médecine : « Malgré mon insistance, je n’ai rien pu obtenir de plus. » Le doyen a cependant l’impression que Bostroem « serait ravi » de venir.[1] Bostroem envoie d’abord son collègue Nikolaus Jensch (1913-1964) le suppléer à Strasbourg. Au semestre d’hiver 1942/43, Bostroem devient ordentlicher Professor (professeur titulaire) en psychiatrie et en neurologie.[10] Il donne toutes les semaines les cours magistraux de Psychiatrische und Nervenklinik (einschl. Wehrpsychologie) (Clinique psychiatrique et neurologique [englobant la psychologie militaire]) et Forensische Psychiatrie mit Krankenvorstellungen (Psychiatrie médico-légale avec présentation de malades). Le cours pratique correspondant (Untersuchungskurs) est assuré par Jensch.[11] En plus de ce dernier, Bostroem fait venir beaucoup de personnel de Leipzig à Strasbourg.[6]
Dans quelles conditions Bostroem arrive-t-il à Strasbourg ? La clinique neurologique dépend de la clinique psychiatrique. Cette dernière se compose de six services dans lesquels 77 des 142 lits disponibles sont réservés aux hommes et 65 aux femmes. Il y a 40 lits pour « malades agités ». Tous les services sont fermés et surveillés par des gardiens de nuit. En 1942, 30 lits sont mis à disposition du département psychiatrique de l’hôpital militaire de Strasbourg. La clinique neurologique comporte quatre services avec 62 lits. Elle peut en plus accueillir séparément 32 patients privés. ll y a en outre une policlinique commune pour les patients en psychiatrie et en neurologie. En 1942, un service de radiologie, une salle d’opération pour les interventions diagnostiques ainsi qu’un « département des sciences de l’hérédité » (Erbwissenschaftliche Abteilung) sont en projet.[12]
Attitude envers l’eugénisme et l’ « euthanasie »
L’attitude de Bostroem envers l’idéologie national-socialiste et son rôle en matière de stérilisation forcée et d’assassinat de malades nécessite également une étude approfondie. Depuis 1937, Bostroem est membre du NSDAP et fait partie du NS-Lehrerbund[13] , la ligue national-socialiste des enseignants. L’échange épistolaire intense qu’il entretient avec Bumke, son ancien professeur, a notamment pour objet les événements politiques et leurs conséquences sur le quotidien de la clinique psychiatrique, ainsi que la loi pour la prévention d'une descendance malade héréditaire (Gesetz zur Verhütung erbkranken Nachwuchses) de 1933.[14] L’examen de ces lettres permettrait peut-être de se faire une idée plus claire du point de vue de Bostroem. Dans son article Erbbiologie und Psychiatrie (Génétique et psychiatrie) de 1934, il décrit dans le détail et pour différents tableaux cliniques la complexité des liens entre l’hérédité, les influences environnementales et la probabilité de développer une pathologie, mais toujours sur un arrière-fond d’eugénisme et en sous-entendant l’existence d’ « individus indésirables d’un point de vue eugénique » (eugenisch unerwünschte Persönlichkeiten).[15] Pour finir, Bostroem indique également, qu’une « connaissance approfondie de l’hérédité » ne doit pas pour autant conduire à « abandonner tout espoir de traitement ».[16] Bostroem s’exprime plus concrètement en 1934 lors d’une session de formation continue pour médecins où il donne un exposé intitulé « Approche psychiatrique de la loi pour la prévention d'une descendance malade héréditaire » (Das Gesetz zur Verhütung erbkranken Nachwuchses vom Standpunkt der Psychiatrie) :
« Le médecin traitant, qui se sent le devoir de contribuer au bien-être de ses patients, est naturellement réticent à amorcer par son signalement une procédure qui déplaise aux intéressés. […] Je crois cependant que l’obéissance aux lois ne doit en aucune façon paraître contraire à l’éthique médicale. Les malades et leurs proches ont besoin, en particulier dans le cadre de ces mesures radicales pour eux, que le médecin fasse preuve de réconfort et d’humanité. […] Il est de notre devoir à nous, médecins, de faire en sorte que les personnes directement concernées par cette loi la comprennent. Il faut beaucoup de patience et de temps mais je crois que ces efforts en valent la peine. »[17]
Il explique également le contenu, la forme et l’objectif de la loi et place ainsi la psychiatrie au service des dirigeants nationaux-socialistes. Certains cas de stérilisation forcée à Strasbourg ont déjà été mis en évidence mais dans ce domaine, des recherches plus poussées sont nécessaires.
L’attitude de Bostroem par rapport à l’ « euthanasie » est bien plus difficile à évaluer. Sur cette question, la principale source d’informations est sa correspondance avec son confrère, le docteur Karsten Jaspersen (1896-1968), chef des services de neurologie et de psychiatrie de l’hôpital diaconal de Bethel en Westphalie (Psychiatrische und Nervenabteilung des Westfälischen Diakonissenanstalt in Bethel), et l’un des rares psychiatres à s’opposer farouchement à l’assassinat de malades. Jaspersen informe les institutions les plus diverses de ces assassinats et essaye d’intervenir auprès des plus hautes sphères. Il rédige de nombreux courriers pour solliciter le soutien des plus éminents professeurs titulaires et organiser une large opposition à l’Aktion T4. Le 18 juillet 1940, Bostroem reçoit une lettre de Jaspersen, son « élève reconnaissant et assistant de longue date » – ils se sont connus alors que Bostroem était Oberarzt (chef de clinique) à Munich – qui lui fait part des assassinats et du rôle funeste des questionnaires distribués à tous les asiles du Reich. Bostroem lui répond rapidement qu’il « a déjà entendu parler de l’affaire » et lui conseille de refuser de remplir les questionnaires.[18] À cette époque, il est Ordinarius (professeur titulaire) à Leipzig. On ignore si Bostroem a sciemment ordonné ou empêché le transfert de patients dans des cliniques psychiatriques ayant servi de centres de mise à mort. Dans l’état actuel des recherches, on estime que la clinique de l’université de Leipzig n’était pas directement impliquée dans ces assassinats car elle s’occupait principalement de l’accueil primaire des patients en psychiatrie et non de leur prise en charge à long terme.[19]
Sous l’impulsion de Jaspersen, Bostroem passe lui-même à l’action. Il écrit à Bumke et cherche à obtenir une entrevue. Au moment où celle-ci a lieu, Bumke, qui a reçu une lettre similaire de Jaspersen, a déjà essayé d’intervenir auprès d’Ernst Rüdin (1874-1952), sans succès. Ce n’est pas la seule action de Bostroem. Il écrit à Jaspersen : « J’ai essayé tout autre chose, en vain » bien qu’on ne sache pas à quoi il fait référence ici. En outre, Bostroem remarque que l’annulation de l’assemblée annuelle du Fachverband der Deustchen Psychiater (association des psychiatres allemands) en 1940 n’est certainement pas due au hasard et qu’on a ainsi délibérément cherché à éviter tout échange sur ces événements.[20] Bostroem mentionne qu’il souhaite à l’occasion justifier son point de vue auprès des principaux responsables de l’Aktion T4. Plus loin dans sa lettre à Jaspersen, il écrit :
« Il ne faut pas adopter une attitude hostile d’emblée car l’euthanasie chez les malades incurables ou ceux qui souffrent atrocement est un sujet dont on peut débattre. Mais on ne peut pas prendre de décision à la simple lecture d’un questionnaire. Il s’agit après tout d’une décision difficile à prendre. Du reste, les conséquences sur les proches, les malades mais aussi le personnel soignant sont imprévisibles. Par-dessus tout, il me semble que c’est l’essence de la médecine qui est ici en jeu. »[21]
Cette déclaration semble d’autant plus étrange que Bostroem a assuré Jaspersen de son soutien contre les assassinats de malades explicitement et à plusieurs reprises, et qu’il a lui-même agi en conséquence. À la suite de cela, Bostroem nomme des personnes qui pourraient encore être sollicitées. Il conclut sa lettre par la phrase suivante : « Je suis disponible à tout moment si je peux me rendre utile. »[22] Si l’on ne s’en tient qu’à la déclaration citée ci-dessus, on pourrait penser qu’il rejette seulement la manière dont les décisions sont prises (à partir de réponses données à des questionnaires), et pas l’ « euthanasie » en tant que telle. En prenant ses autres déclarations en considération, ce passage semble plutôt relever d’une stratégie argumentative contre les ardents défenseurs de l’ « euthanasie ». Retenons que cette prise de distance par rapport aux assassinats de malades, si on l’interprète de cette manière, reste cantonnée à la sphère privée. Cet échange épistolaire et la prise de contact avec des collègues partageant les mêmes opinions ne dépassent pas cette sphère et n’ont donc aucun impact sur la suite de la carrière de Bostroem et sur sa nomination à Strasbourg. Selon un médecin alsacien, le Dr Bernard, Bostroem est allé plus loin lors d’un cours dans lequel il aurait clairement pris position contre les assassinats. Il aurait dénoncé l’ « euthanasie » comme étant « inhumaine » et « indigne de notre civilisation ».[23] Plus tard, le fils de Bostroem soulignera que son père n’a jamais ordonné le transfert de ses patients dans des centres de mise à mort comme celui d’Hadamar, ce que les dernières recherches ont confirmé. D’après ce que les chercheurs ont pu reconstituer grâce aux dossiers médiaux des patients et aux registres d’entrée, seuls des patients de l’asile psychiatrique de Stephansfeld y ont été transférés.
Électroconvulsivothérapie et recherches
Concernant l’importance de l’électroconvulsivothérapie dans le national-socialisme, les chercheurs actuels s’accordent pour dire que « la nouveauté que représentait la thérapie par électrochocs suscitait un grand intérêt scientifique en Allemagne, que les psychiatres, poussés par les conséquences de la guerre sur la santé mentale des soldats, s’efforçaient d’introduire cette nouvelle méthode en psychiatrie et qu’ils étaient soutenus par des fonctionnaires de haut rang du régime nazi. »
Ils constatent de plus que cette nouvelle forme de thérapie somatique « est intégrée sans difficulté à la dialectique de guérison et d’extermination si caractéristique du national-socialisme. »[24] Cependant, des études locales poussées mettent en évidence un recours à l’électroconvulsivothérapie très inégal selon les régions. Tandis que certaines cliniques l’intègrent très rapidement et à grande échelle dans leur pratique clinique, d’autres se montrent extrêmement réticentes : la clinique de Wiesloch dirigée par Herbert Linden doit selon lui devenir « un modèle pour la recherche en électroconvulsivothérapie » alors que Karl Bonhoeffer (1868-1948) est franchement sceptique quant à cette thérapie somatique qui reste par conséquent dans un premier temps très marginale à l’hôpital de la Charité à Berlin.[25] On en arrive inévitablement à la question de son utilisation à Strasbourg. Dans sa description de la clinique neuropsychiatrique, le président de la Reichsuniversität met bien en évidence l’électroconvulsivothérapie comme seule méthode de traitement à côté de l’insulinothérapie et du traitement au Cardiazol.[26] Les électrochocs sont utilisés à la clinique psychiatrique depuis juillet 1942.[27] Il reste dans ce contexte à interroger les liens entre les différents paradigmes de la psychiatrie national-socialiste. Quelle importance confère-t-on aux nouvelles thérapies somatiques qui donnent pour la première fois un espoir de guérison pour des maladies auparavant déclarées héréditaires telles que la schizophrénie? La stérilisation forcée était auparavant promue comme seul traitement efficace contre ces maladies. Ainsi, Ernst Rüdin, directeur du service de recherche psychiatrique de Munich et Reichsleiter (président) de la Gesellschaft Deutscher Neurologen und Psychiater (Société des neurologues et psychiatres allemands) souligne que les méthodes de thérapie somatique ne doivent « en aucun cas avoir d’effet rétroactif fâcheux sur la loi sur la stérilisation ».[28] Peut-on décrire l’ « euthanasie » et les thérapies somatiques comme des « éléments complémentaires au sein de la psychiatrie moderne » ?[29] Est-ce le cas à Strasbourg ? Sur cette question, les dossiers médicaux des patients pourraient permettre de procéder à une analyse quantitative et qualitative, d’avoir un aperçu concret des pratiques au sein de la clinique psychiatrique et par là de participer à une évaluation globale. Par ailleurs, Bostroem dirige plusieurs projets de thèse en lien avec l’électroconvulsivothérapie. D’après leurs titres, les sujets de recherche touchent aussi bien l’évaluation des résultats de cette thérapie que ses effets indésirables comme les troubles mnésiques. Il faut noter ici la grande attention portée au tableau clinique maniaco-dépressif. Les thèses ne traitent de l’utilisation de cette thérapie ni dans la schizophrénie ni dans d’autres psychoses.[30]
En plus de ces thérapies, Bostroem s’intéresse aux manifestations somatiques des pathologies psychiatriques. Des passerelles et des collaborations avec d’autres domaines tels que la neuroanatomie et la physiologie s’établissent. Bostroem soutient par exemple les travaux diagnostiques et les protocoles de test en physiologie expérimentale des docteurs Paul Link (*1892) et Frédéric Bernard (1912-2008) dans le service de neuropsychiatrie de la clinique.[31]
Psychiatrie militaire
Craignant que les névroses de guerre apparues pour la première fois pendant la Première Guerre mondiale n’affaiblissent la Wehrmacht, le professeur Otto Wuth (1885-1946), directeur de la Militärärztliche Akademie (académie de médecine militaire) de Berlin ordonne la formation d’un service de psychiatrie militaire avant même que la Seconde Guerre mondiale n’éclate. Ce service comprend les domaines suivants : « Psychiatrie, psychologie médicale, hygiène psychique, soin des cérébrolésés, psychopathie et hygiène médico-légale. » En tant que Beratender Psychiater beim Heeres-Sanitätsinspektor (psychiatre consultant auprès de l’inspecteur sanitaire des armées), Wuth est la plus haute autorité en matière de psychiatrie dans ce domaine. Bostroem qui est psychiatre militaire pour la région militaire Wehrkreis V Straßburg, lui est subordonné.[32] Les rapports d’activité que Bostroem doit transmettre à Wuth tous les quinze jours, puis tous les mois à partir du 13 janvier 1941 offrent un aperçu des tâches réalisées. Ces rapports traitent les points suivants :
« a. Ambiance et attitude des troupes, différences entre les classes en fonction de leur ancienneté ? b. Conséquences des anormalités psychopathiques et de la consommation d’alcool ? c. Accumulation de manifestations de névroses d’organes et répartition sur les classes en fonction de leur ancienneté ? d. Apparition de réactions hystériques vraies (psychogènes) (tremblements, paralysies, aphonie), causes déterminantes ?[33]
L’expérience de Bostroem en tant que médecin militaire pendant la Première Guerre mondiale et son exercice prolongé dans le « service des névrosés » à Hambourg Eppendorf l’ont prédestiné à l’exercice de la psychiatrie militaire.[34] De plus, l’une des principales tâches dans ce domaine consiste à établir des expertises psychiatriques de responsabilité en cas de délits, suicide, automutilation et d’infraction au paragraphe 175 du Code pénal allemand qui punit l’homosexualité. Là aussi, Bostroem met à profit son « vif intérêt » pour la psychiatrie médico-légale.[35] Les médecins experts se rencontrent pendant la guerre à l’occasion de plusieurs congrès.[36] Bostroem publie un article intitulé Der seelische Zustand der Truppe (L’État psychologique des troupes).[37]
L’attitude et les agissements de Bostroem quant à l’homosexualité permettent aussi de mieux comprendre où il se situe dans l’idéologie nazie. Il est indéniable qu’il défend une position opposée à l’émancipation. Dans un article appelé Seelische Schwierigkeiten in der Pubertät (Difficultés psychiques à la puberté), il se prononce en faveur d’une « protection de la jeunesse » contre les homosexuels et légitime les pratiques de persécution du régime national-socialiste à leur encontre.[38] Dans un précis de psychiatrie qu’il édite, il s’exprime de manière similaire et met en avant « la base héréditaire » (erbliche Grundlage) de l’homosexualité. Il établit de manière péjorative un lien entre homosexualité et « consommation de stupéfiants ».[39]
August Bostroem décède subitement le 3 février 1944 à Strasbourg des suites d’une maladie cardiaque non détectée.[40]
Biographie
Repères
Localisations
- 1942 - 3 février 1944 : Straßburg (France) [42]
Nationalités
- Allemand
Confessions
Publications
Relations
Directeur de thèse de
- Rudolf Bachmann ( - )→
- Paul Raeuber ( - )→
- Paul Linck ( - 22 juillet 1943)→
- Georg Letocha ( - 28 juillet 1943)→
- Wilhelm Rodenbusch ( - 23 août 1943)→
- Viktor Lanz ( - 15 novembre 1943)→
- Hans Georg Scharnke ( - 27 mai 1944)→
- Werner Ehrmann ( - 27 mai 1944)→
- Rudolf Gross ( - 30 mai 1944)→
- Paul Reinhardt ( - 12 juin 1944)→
- Fritz Karl Sippel ( - 30 juin 1944)→
Supérieur hierarchique de
- Nikolaus Jensch (1940 - 1944)→
Collègue de
- Ludwig Crusem ( - )→
- Hans-Joachim Kummer ( - )→
Liens à institutions
Giessen
1886-07-17T00:00:00Z
Vie privée
Naissance
1944-02-03T00:00:00Z
Vie privée
Décès
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Références
À propos de cette page
Rédaction : ©Léa Marquart, ©Lea Münch
Traduction : ©Marion Speisser, ©Élisabeth Fuchs
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